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A l’instar d’autres villes du pays (Sétif, Jijel, Oran, Biskra, etc.), une marche a été organisée, dans la nuit de jeudi, au centre d’Alger.
Trouhou bi idhnillah» (Vous partirez par la grâce de Dieu). La main tenant un mahraz (mortier), un vieil homme répète à tue-tête cette phrase. Sa petite-fille sur les épaules, il défie les policiers antiémeute qui tentent d’empêcher les groupes de jeunes de se rassembler sur la rue Didouche Mourad (Alger). Sa femme, drapée de l’emblème national, lance, les mains levées au ciel : «Nous les aurons, rien n’arrêtera le peuple, grâce à Allah !»
A l’instar d’autres villes du pays (Sétif, Jijel, Oran, Biskra, etc.), une marche nocturne a été organisée, jeudi, au centre d’Alger. Les groupes de manifestants rassemblés d’abord à la Grande-Poste et place Audin, pour la traditionnelle «opération mahraz», se sont dispersés. Ils se regroupent en plusieurs points de la grand-rue, scandant des slogans hostiles – «Makach l’vote !» (Pas d’élection), «Dawla madania, machi askariya !» (Etat civil, pas militaire), «Dégage Gaïd Salah, il n’y aura pas d’élection cette année !» – ponctués de coups de pilon et de youyous…
Les policiers chargent. Des jeunes sont interpellés. Ils sont traînés vers les fourgons cellulaires stationnés place Audin, sous les cris réprobateurs des marcheurs. «Nous sortons chaque jeudi pour l’opérationmahraz. D’habitude, la police laisse faire et nous disperse avec juste trois Vito. Maintenant, ils sont plus nombreux et plus violents. Ils ne veulent pas qu’on se rassemble, qu’on marche la nuit. Mercredi, il y a eu au moins 150 personnes arrêtées et tabassées.
C’est de la pure provoc’. La police est partout, mais les gens sont déterminés à empêcher l’élection», dénonce un jeune, la vingtaine, le visage en sueur. La police s’est fortement déployée dans plusieurs points de la capitale, principalement à Bab El Oued ; ses effectifs ont été renforcés, jeudi, sur la place des Trois-Horloges et sur les grands boulevards et les rues de ce quartier populaire.
Il n’était pas question de laisser la population marcher à nouveau. Des jeunes de Bab El Oued ont en effet répondu, mercredi, à l’appel lancé sur Facebook pour une marche à 17h. La répression était «féroce», selon des témoignages recueillis sur place. «La police a quadrillé le quartier. Elle a utilisé des tasers, des matraques, des bâtons. Visiblement, il n’était pas question qu’elle laisse les manifestants rejoindre le centre-ville. Il y a eu beaucoup de blessés», raconte un sexagénaire rencontré sur le boulevard Mira, témoin de scènes «très dures».
«Ghar hirak» occupé
Rassemblés rue Mustapha Ferroukhi, des marcheurs se donnent rendez-vous pour la marche de vendredi et pour les prochaines nuits. «Je suis sorti la première fois le 26 avril à Tindouf, alors que j’étais enrôlé dans l’armée. Depuis, je ne rate ni les mardis ni bien sûr les vendredis. Maintenant, notre objectif c’est de sortir toutes les nuits.
C’est le mot d’ordre relayé lors de la marche des étudiants, et en petits groupes», nous confie un jeune originaire d’une wilaya de l’Est. «Une trentaine de manifestants ont été arrêtés mercredi soir. Le lendemain, jeudi, le tribunal de Baïnem a libéré 21 personnes sur les 29 présentées devant le procureur et en a placé 8 sous mandat de dépôt pour « association de malfaiteurs », « atteinte à l’unité nationale », « attroupement illégal » et « désobéissance civile ».
Les avocats de la défense se sont retirés pour ne pas cautionner cette mascarade», signale le Comité national pour la libération des détenus (CNLD). Dans la nuit de jeudi aussi, plus de 80 personnes ont été interpellées, dont des mineurs et des journalistes. «C’est la confirmation de la chute du système et la panique générale avec ces arrestations spectaculaires», estime le CNLD.
Vers 22h, camions et véhicules 4×4 quittent le centre d’Alger par le tunnel des Facultés sous les cris des manifestants. «Ghar hirak» est occupé pour un temps. Au bout de quelques minutes, des policiers réinvestissent la place et poursuivent les hirakistes. Certains sont roués de coups sur la rue menant à la Grande-Poste. Leur besogne achevée, les policiers retournent dans leurs véhicules. Accalmie. Un cri déchire soudain le silence de la nuit : «Ya Ali !»
Mise en détention de l’activiste Laalami
L’activiste de Bordj Bou Arréridj, Brahim Laalami, a été placé, jeudi 21 novembre, en détention provisoire par le procureur du tribunal de BBA, au lendemain de son arrestation «spectaculaire» par des éléments de services de sécurité à Djaafra, a précisé le CNLD dans un post sur sa page Facebook. Le Comité précise que le détenu a été violenté à l’intérieur du commissariat de BBA durant la nuit de mercredi.
Lors de sa présentation devant le juge, jeudi, il avait «le visage tuméfié et ne pouvait même pas se tenir debout», précise le CNLD. Même version de l’avocat Abdelghani Badi qui a évoqué l’état du détenu.
Blogueur très actif du mouvement populaire à Bordj Bou Arréridj, «Laalami a fait l’objet d’un acharnement policier, surtout depuis son arrestation à Alger le 31 octobre, à la veille de la marche du 1er novembre, puis kidnappé et transféré dans un centre de DRS à Constantine avant d’être transféré à BBA après 8 jours de recherche et d’alerte. Et il a été obligé de payer une amende de 100 000 da, le 20 novembre, alors qu’il était sous contrôle judiciaire», détaille le CNLD. N. Iddir
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Abdelaziz Belaïd à Chlef :
«Les manifestants du Hirak ont raison» De notre envoyé spécial à Chlef, Abdelhalim Benyellès La campagne électorale du président du Front El Moustakbal se poursuit à l’ouest du pays. Hier à Chlef, au Centre culturel islamique, le meeting populaire se tenait sous haute surveillance policière, avec, toutefois, aucun incident qui mérite d’être signalé. Dehors, aux alentours du lieu du meeting populaire, tout porte à croire que la présidentielle constitue un non-événement. Aucun des activistes n’a donné signe de vie. Dans son allocution d’ouverture, le candidat a fait savoir que « l’élection est la solution à la crise ». Parmi les thèmes sur lesquels il s’est attardé, figure le volet social par l’ouverture du dossier des handicapés de guerre, l’éducation, l’amélioration des conditions de vie des salariés. Dans le cadre de l’investissement, Abdelaziz Belaïd dira que Chlef détient un potentiel naturel non négligeable, pour « une région qui s’étend sur une distance de 120 km sur le littoral. Dans le même contexte, il a promis l’ouverture de l’investissement dans le domaine du transport aérien, tout en rejetant le monopole détenu par Air Algérie. Et de poursuivre que « les 2 milliards de dollars qui circulent dans l’ informel doivent être transférés dans le circuit formel par l’ouverture des banques aux véritables investisseurs qui ne détiennent pas l’argent sale ». S’adressant aux activistes du Hirak, Abdelaziz Belaïd dira que « ces manifestants ont raison ». Et d’ajouter : « Ils aiment l’Algérie à leur manière », avant de poursuivre par la promesse d’ouvrir un dialogue avec « tous les opposants ». En conclusion, le candidat à la présidentielle du 12 décembre s’est engagé devant ses partisans à faire de Chlef un pôle de tourisme et d’agriculture, « grâce à vos voix», leur lancera-t-il. A. B.
A partir de Batna Tebboune s'engage à éradiquer «définitivement» les crises du logement et du chômage Le candidat indépendant à l'élection présidentielle du 12 décembre prochain, Abdelmadjid Tebboune, s'est engagé, samedi depuis Batna, à éradiquer «définitivement» les crises du logement et du chômage et à œuvrer à la transmission du flambeau aux jeunes et à la révision de la Constitution et du code électoral. Animant un meeting populaire à la Maison de la culture au centre-ville de Batna, au 7e jour de sa campagne électorale placée sous le slogan
«Engagés pour le changement, capables de le réaliser», M. Tebboune a déclaré :
«Je m'engage, si le peuple me cautionne, à éradiquer définitivement les crises du logement et du chômage» soulignant, dans le même cadre, «son engagement à la mise en œuvre rapide de la décision d'intégration de 400 000 fonctionnaires» ce qui contribuera à l'éradication du problème de chômage. Au volet politique, le candidat à la magistrature suprême a réitéré son engagement à réviser la Constitution et le code électoral «au cours des premiers quatre mois» de son mandat présidentiel, s'il était élu, en vue de «réaliser le changement escompté et transmettre le flambeau aux jeunes», a-t-il dit. Par ailleurs, il s'est engagé à «mettre fin à l'emprise de l'argent sur les élections et la vie politique», ajoutant que «l'usage de l'argent dans la politique a contribué à la marginalisation des jeunes et des compétences nationales de la vie politique». Après avoir réitéré son engagement à «maintenir les poursuites contre la bande qui a dilapidé les deniers publics», Tebboune a tenu à «rappeler avoir été, en 2017, victime d'un complot ourdi par cette bande, et qui continue à le viser en 2019». Evoquant son programme électoral, qui comprend 54 engagements, Tebboune a expliqué qu'il «vise outre la consolidation de l'unité nationale et la lutte contre la fraude, le changement des comportements ainsi que l'analyse profonde des problèmes de tous les secteurs, politique, économique et social». Dans ce sens, il a promis de régler «tous les problèmes des retraités et invalides de l'Armée nationale populaire (ANP) engendrés par les années de la tragédie nationale». Soulignant l'importance de la tenue du prochain rendez-vous électoral, le prétendant à la magistrature suprême du pays a affirmé que «cette élection est à même de réaliser le changement», et qu'elle constitue «le moyen à travers lequel le peuple exercera sa souveraineté conformément aux articles 7 et 8 de la Constitution, revendiqués par le Hirak populaire». Par ailleurs, M. Tebboune a appelé au respect «des opinions des parties, non convaincues par l'élection», ajoutant que «c'est l'urne qui tranchera en toute démocratie». En conclusion, il a m
Grandeur et misère du journalisme algérien en temps de hirak populaire
L’Histoire du journalisme dans le monde est jonchée de dynamiques collectives et d’actes professionnels individuels qui ont sédimenté et imprimé au métier les meilleurs chemins de se construire en forges multiples de résistance contre trois pouvoirs constitués à l’égard des droits humains : politique (et militaire en Etat de non-droit comme le nôtre), d’argent et de religion. Et ainsi de pouvoir tracer au mieux les règles et le sens de ses fondamentaux d’identité à même d’instituer son statut dans la société.
La production du journalisme d’Algérie en ce temps de neuf mois de vigoureux et pacifique hirak est marquée dans ses ressorts de survie contre les métastases des propagandes instituées depuis l’indépendance, renouvelées en versions soft de communication institutionnelle depuis le système Bouteflika. Cependant que via les nouveaux médias une communication sociale – même si souvent cacophonique – offre de formidables et libres expressions de l’opinion publique nationale. De fait, il en ressort de faibles contre-feux via les médias traditionnels.
Ces contre-feux ranimés au lendemain du 22 février, sans que pour autant malheureusement il n’y ait eu depuis une forte dynamique d’organisation professionnelle des journalistes (incontournable processus à notre sens), se retrouvent confrontés gravement ces derniers jours, notamment dans les télévisions et radios de droit public au regain féroce des pires formes de censures exercées brutalement par les tenants du pouvoir.
Dans le sillage de l’agenda médiatique militaire imposé par le commandement militaire, de nouvelles chefferies des offices de télévision et de radio du Boulevard des Martyrs viennent de prendre les commandes avec pour mission principale de mettre fin aux «ouvertures contrôlées» de près de neuf mois, discréditer par tous les moyens le hirak populaire ; et accréditer la mascarade du scrutin présidentiel du 12 décembre comme seule solution immédiate possible.
Cette amulette est sans cesse ressassée par le général Gaïd Salah, et introduite en leitmotiv dans les journaux radiotélévisés, en contrebande car jamais questionnée à partir des principes fondamentaux de production du journalisme. Relayée par des officiants journalistes, elle tient lieu d’épine dorsale des programmes d’information des radios et télés gouvernementales, des télés commerciales offshore et de la majorité des journaux privés survivants encore, et en quémande de retour de services rendus pour l’après-scrutin.
Cette feuille de route est instaurée dans l’audiovisuel gouvernemental en redoutable retour aux années de plomb ; elle y crée un marécage de misère professionnelle. A la suite des télés qui ont sevré la nation de se voir en marches populaires festives de vivre-ensemble, les radios (sous monopole d’Etat, comme seule la Corée du Nord continue de le faire survivre) s’appliquent à rendre inaudibles les clameurs chroniques de la vox populi. Surréaliste est ce spot sonore d’autopromotion «La radio chaîne 3 au cœur de l’information» ; surréalistes sont les journaux radiotélévisés de ce week-end gonflés d’infos bruits sur le Sahara occidental et l’Irak, et pas un mot sur la nation constructive neuf mois durant de son hirak.
C’est ainsi que sont inculquées les ficelles de propagandes dans les (mauvaises) écoles de communication : quand on ne trouve pas de recettes à même de produire une propagande/désinformation susceptible d’efficacité, on recourt à celle du fameux «trou de mémoire» imaginé par le visionnaire George Orwell. Il faut jeter carrément dans ce trou/oubliettes l’info ou l’idée – comme s’il était impossible, «la yadjouz», qu’elle soit. Le black-out orchestré Boulevard des Martyrs sur les manifestations populaires est de cette veine. Question intelligence de saisie des réalités, ce black-out est similaire au geste de l’idiot qui casse le thermomètre parce que son mercure montre trop.
Cependant, la grandeur du journalisme d’Algérie demeure. Elle est bien plus forte que les misères d’embrigadement grotesquement administrées par les pouvoirs mal définis des temps actuels. Elle a sédimenté pour édifier une base de socle à la liberté de la presse depuis les premiers journaux de droit privé des années 90’, contre la peste (de l’islamisme intégriste) et le choléra (du pouvoir politique). Au prix d’une centaine de professionnels massacrés, et de tant d’exilés…
C’est dans cet entre-deux de lumière et pénombre qu’il demeure bon et sain d’entrevoir encore et conforter de réception tant de signes nouveaux de riposte aux nouveaux dispositifs de répression de la liberté d’informer. Même si a priori ils peuvent paraître minimes, ces signes nous disent bien que de dignes journalistes algériens continuent de se battre contre les nouveaux jougs de domination. Point besoin de citer des noms de journalistes qui régénèrent la flamme de la grandeur du journalisme national : ils (elles) démissionnent de responsabilités administratives antinomiques avec leur conscience professionnelle ; ils (elles) refusent de réciter une copie à prétention de production journalistique ; ils (elles) produisent des reportages réellement «au cœur de la société». Parce que la conscience professionnelle en journalisme est de première ligne de défense de sa propre dignité, en partage avec son peuple.
Abdelaziz Rahabi : « Il faut que nos dirigeants admettent que le système actuel a fait son temps »
Cette figure de l’opposition, qui a connu le système de l’intérieur, estime que l’Algérie a, pour la première fois, l’opportunité d’une transition démocratique pacifique.
Ancien ministre et diplomate, Abdelaziz Rahabi a dirigé en juillet les travaux de la conférence nationale de dialogue dite de Aïn Benian, au cours de laquelle une plate-forme de revendications a été adoptée par plusieurs partis politiques, personnalités et associations de la société civile.
Les Algériens ont chassé Abdelaziz Bouteflika et manifestent depuis trente-cinq semaines. Qu’est-ce qui a changé en Algérie ?
Abdelaziz Rahabi Le Hirak [mouvement populaire] a surpris tout le monde. Par sa cohérence, par son caractère massif, national, pacifique. Ce n’est pas l’expression d’un ras-le-bol du système Bouteflika, c’est l’expression de l’accumulation de toutes les frustrations politiques et des aspirations à la justice sociale depuis des décennies. Le peuple s’est réapproprié l’espace public et politique. Ce mouvement transcende les idéologies, il veut rompre avec le système autoritaire, la corruption, c’est ce qui fait son caractère éminemment politique.
C’est aussi une opportunité historique dans un pays qui procède et n’avance que par ruptures violentes. La colonisation a été une très grande violence. L’indépendance a été marquée par la violence de la lutte pour le pouvoir. Puis vint le coup d’Etat de Houari Boumediene en 1965. La nationalisation des terres agricoles, qui a été une forme de violence économique. Le printemps berbère de 1980, les émeutes d’octobre 1988, le mouvement civique en Kabylie de 2001…
Pour la première fois, nous envisageons de sortir d’un système non démocratique de façon pacifique. C’est une immense avancée. Une sorte de coup d’Etat civil, un coup d’Etat de la société contre ses propres institutions, incapables de se réformer, de se mettre en rapport avec le temps réel.
Comment expliquer cette surdité et cette résistance du pouvoir ?
C’est le pays le plus fermé de la Méditerranée alors que le peuple est mondialisé. Il y a un décalage profond entre la société, en lien avec le temps réel, et la structure gouvernementale, le fonctionnement de l’Etat, qui est archaïque et qui manifeste une très forte résistance au changement. Soit parce qu’il n’a aucune vision de l’avenir, soit par crainte de perdre sa rente, ses intérêts. Il est incapable d’accompagner la transformation de la société sans vouloir en contrôler tous les tenants et aboutissants.
Prenons Bouteflika. Pendant vingt ans, il n’a pas construit un Etat, il a construit un pouvoir. C’était un président omnipotent qui décidait de tout, qui a construit son pouvoir à coups de complicités étrangères, en dépensant la rente… Or il s’est effondré en une semaine, car il n’a pas construit d’Etat. Il a neutralisé toute forme d’intermédiation entre lui et le peuple. Son pouvoir ne reposait que sur des allégeances.
Par le Pr Belkacem Mostefaoui
École nationale supérieure de journalisme et des sciences de l’information, Alger.