BARACK OBAMA :son parcours

 
   




 

Jeudi 6 novembre

 
   

   
 

Barack Obama, 44e président des Etats-Unis, salue la foule rassemblée au Grant Park, à Chicago mardi 4 novembre (photo Gash/AP).

 

 C’était le 18 mars, à Philadelphie, dans un discours majeur sur la question raciale. En quelques mots, Barack Obama résumait son histoire. « Je suis le fils d’un homme noir du Kenya et d’une femme blanche du Kansas. J’ai été élevé en partie par un grand-père blanc qui, après avoir survécu à la Grande Dépression, servit sous les ordres de Patton durant la Seconde Guerre mondiale, et par une grand-mère blanche qui travaillait sur une chaîne de montage de bombardiers à Fort Leavenworth pendant qu’il combattait outre-mer. »

« J’ai étudié dans certaines des meilleures écoles d’Amérique, vécu dans un des pays les plus pauvres du monde, disait-il. Je suis marié à une Américaine noire qui a en elle du sang d’esclave et du sang de propriétaire d’esclaves – un héritage que nous transmettons à nos deux filles adorées. J’ai des frères, des sœurs, des nièces, des neveux, des oncles et des cousins de toutes races et de toutes couleurs de peau, dispersés sur trois continents, et jusqu’à mon dernier jour je n’oublierai jamais que mon histoire n’aurait été possible dans aucun autre pays du monde. »

Sept mois et quelques jours plus tard, sa victoire représente l’aboutissement d’une trajectoire exceptionnelle, de son enfance chaotique entre l’Indonésie et Hawaï, jusqu’à son enracinement à Chicago. Barack Obama, 47 ans, a toujours été conscient du lien quasi génétique existant entre son itinéraire personnel et celui de son pays.

Le fils ne reverra son père qu’une seule fois, à l’âge de 10 ans

Africain, Américain, Asiatique, Blanc et Noir, il a transformé son hybridité culturelle en atout politique, persuadé que la nation pouvait reconnaître en lui la nouvelle incarnation du rêve américain, quarante-quatre ans après la signature par Lyndon Johnson de la loi sur les droits civiques.

Barack Obama est né en 1961, un an après la vague de sit-in et de marches non violentes des étudiants américains contre la ségrégation. Sa mère, Ann Dunham, étudiante à l’université d’Hawaï, avait rencontré Barack Obama senior, un étudiant africain, originaire du Kenya (
voir son itinéraire en images).

Deux ans plus tard, il les abandonnera pour aller faire un doctorat d’économie à Harvard, avant de repartir en Afrique. Le fils ne reverra son père qu’une seule fois, à l’âge de 10 ans, et il apprendra sa mort, une dizaine d’années plus tard, par un coup de téléphone d’une tante au Kenya.

Barack Obama vit à Djakarta, entre 6 et 10 ans, après le remariage de sa mère avec un ingénieur indonésien. Incapable de lui payer des études à l’école internationale et inquiète de l’éducation qu’il reçoit dans les écoles locales, sa mère l’envoie à Honolulu chez ses grands-parents qui lui trouvent une bourse pour la Punahou Academy, la meilleure école privée d’Hawaï.

« Black » malgré lui

Pour Barack Obama, c’est le temps des états d’âme solitaires et des crises identitaires. Entre sa passion obsessionnelle du basket et ses sorties avec son grand-père, l’adolescent navigue sans repères. « Black » malgré lui, tiraillé entre les codes et les signes, il fait deux ans de collège universitaire à Los Angeles, puis rejoint l’université Columbia à New York où il obtient un diplôme de sciences politiques.

Après un premier job à Manhattan, Barack Obama débarque à Chicago en 1985, recruté sur une petite annonce pour un emploi d’animateur social à Developing Communities Project, une association de développement social. Le jeune déraciné découvre South Side, le quartier noir déshérité de Chicago, et construit son identité afro-américaine.

L’expérience communautaire comble le vide laissé par l’absence du père. Éloigné de la religion par une mère agnostique et ses instincts sceptiques, Barack Obama adhère à la Trinity United Church of Christ du pasteur Jeremiah Wright, connu pour sa théologie de la libération noire et afrocentrique.

En 1988, il part à la Harvard Law School dont il revient diplômé magna cum laude en 1991. Au cours d’un stage dans un cabinet d’avocats, il rencontre Michelle Robinson, elle aussi juriste diplômée de Harvard. Son mariage avec cette fille de contremaître noir, proche de la mouvance du maire de la ville, Richard Daley, achève de l’ancrer à Chicago, la ville tremplin de toutes ses ambitions.

Sa tendance au compromis semble instinctive

En 1992, pendant la campagne électorale présidentielle, il dirige avec succès une campagne d’inscription de 150 000 électeurs noirs sur les listes électorales. Avocat et professeur à la faculté de droit, Barack Obama cultive méticuleusement un vaste réseau de relations. Parmi les généreux donateurs sollicités pour financer ses campagnes, une personnalité douteuse, Antoin Rezko, promoteur immobilier, condamné en mai 2008 pour fraude et blanchiment d’argent.

Barack Obama se fait élire en 1996 au Sénat de l’Illinois. En 2004, quatre ans après un échec cuisant pour un siège à la Chambre des représentants, il entre au Sénat des États-Unis.

Très vite, Barack Obama se révèle être un redoutable « animal politique », maître dans l’art de reformuler une question pour ménager les camps opposés. Plus qu’un simple opportunisme politique, sa tendance au compromis semble instinctive, presque un réflexe.

Le 2 octobre 2002, dans un discours devant des manifestants anti-guerre au centre de Chicago, il se prononce contre l’invasion de l’Irak en préparation, tout en prenant ses distances avec les pacifistes. « Je ne suis pas opposé à toutes les guerres », insiste le sénateur.

Décontraction, placidité, réserve distante

« Barack Obama n’est pas un révolutionnaire anti-establishment, affirme Ryan Lizza, journaliste au New Yorker. Chaque étape de sa carrière a été marquée par un désir de se concilier les institutions existantes plutôt que de les détruire ou les remplacer. Quand il était animateur social, il a travaillé avec les Églises de Chicago parce qu’elles étaient les principaux centres de pouvoir dans le quartier. Il était agnostique quand il a commencé et le travail l’a amené à devenir un chrétien pratiquant. À Harvard, il a été nommé président de la Law Review parce qu’il plaisait aux conservateurs du comité de sélection. Au Sénat de l’Illinois, plutôt que d’entrer en conflit avec les chefs de la vieille garde démocrate, il a construit avec eux une relation mutuellement bénéfique. »

Pragmatisme ultime, il n’a pas hésité à renier certains engagements en décidant, en juin, de ne pas entrer dans le cadre du financement public de la campagne présidentielle qui a pour contrepartie le plafonnement des dépenses et l’interdiction d’utiliser des fonds privés.

Décontraction, placidité, réserve distante. Derrière l’apparente facilité, Obama dispose d’une sorte de gyroscope qui maintient ses réactions à niveau. Au fil de ses transformations, il cherche toujours à garder le contrôle.

« C’est notre moment »

Très jeune, la vie lui a appris à développer une forme d’autovigilance, comme s’il voulait éviter les surprises. L’organisation de sa campagne électorale a reflété sa personnalité : une structure très centralisée et disciplinée, dirigée par un petit groupe qui ne tolère pas les fuites. Son ambition, sa confiance en lui et son calme étonnent ses critiques et agacent ses adversaires.

Le président élu n’aime pas agir sous pression et ne renonce pas facilement à un plan. Avant de se faire une opinion, il fait sa propre recherche, sollicite l’avis d’experts, étudie les scénarios probables, élabore un plan et anticipe les objections.

« Il a le genre d’esprit qui fait son chemin à travers des questions complexes en écoutant et en donnant une légitimité à différents points de vue avant d’adopter le sien et ce point de vue embrasse la complexité », explique Anthony Lake, ancien conseiller à la sécurité nationale de Bill Clinton.

Avec Obama, l’expérience de la vie, le tempérament et les idées forment un tout, comme si sa biographie symbolisait le destin de l’Amérique. « C’est notre moment », a répété le président élu
après sa victoire. Avec lui, c’est une nouvelle Amé

François d’Alançon

 

 

  Barack Obama, élu 44e président des Etats-Unis

 

 

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rique qui entre à la Maison-Blanche.

 

 

 

 

 
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Barack Obama est né le 4 août 1961 à Honolulu, Hawaii. Ses parents, d'origine sociale modeste, divorcent en 1964 après 4 ans de mariage. (AP Photo/Obama for America, File)


06/11/2008
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