Actualités : DANS UN ENREGISTREMENT VIDÉO D’UN DE SES RESPONSABLES Al-Qaïda veut mettre l’Algérie à feu et à sang
Al-Qaïda a diffusé, hier, sur Internet sur les sites partisans de son terrorisme à travers le monde, l’enregistrement vidéo d’un discours de l’un de ses principaux dirigeants centraux, Abou Yahia Al-Libi, particulièrement venimeux à l’égard de l’Algérie. D’une durée de 35 minutes, l’intervention, intitulée «L’Algérie, entre le sacrifice des parents et la fidélité des enfants», est exclusivement axée sur l’Algérie et à travers laquelle Al-Qaïda appelle, sans détour et de la manière la plus brutale, à mettre le pays à feu et à sang. Après des généralités d’usage sur les vertus et la nécessité du «djihad» de manière générale, le chef terroriste, d’origine libyenne, s’adresse directement au «peuple algérien». Il commence par caresser dans le sens du poil en glorifiant la résistance du peuple algérien et la guerre de Libération nationale sur fond d’images de la répression coloniale contre des civils. Comme tout islamiste qui ne craint pas le ridicule, il marche sur les traces du FIS dissous en attribuant le recouvrement de l’indépendance à un djihad basé, orienté et mené sur un fondement strictement religieux dans le but d’instaurer un «Etat islamique» ; lequel Etat n’a pas été édifié à cause des «héritiers de la France» qui sont au pouvoir. Et c’est, selon lui, la raison du «djihad d’aujourd’hui» que conduit Al-Qaïda au Maghreb pour restituer l’Algérie à l’Islam, amenant le «sang d’aujourd’hui à rencontrer celui d’hier». Ce discours, dont a usé et abusé le FIS et qui était omniprésent dans la littérature de l’AIS et de la Djaz’ara, n’a jamais trouvé de contradicteurs crédibles parmi les historiens ou les autorités officielles pour y mettre un terme définitif afin que des énergumènes du genre de Abou Yahia Al-Libi n’aient plus à y puiser sans que n’apparaisse clairement leur imposture. Pourtant, au moins deux arguments existent et sont à portée de la main pour leur apporter la contradiction une fois pour toute. Le premier est la sentence du plus grand partisan de l’islamisme post-indépendance en Algérie que tous les islamistes algériens reconnaissent comme leur maître : Abdellatif Soltani. Il avait, dès le début des années 1970, dans son livre Sihem elislam (les flèches de l’islam), édité au Maroc, cassé à sa manière le tabou. Il a écrit que la guerre de Libération nationale n’a pas été un «djihad» au sens religieux. Selon sa formule, elle a été faite au nom d’un arbre et une pierre (entendre la patrie) et non de «Allah Akbar» et les maquisards de la guerre de Libération nationale ne doivent pas être considérés comme des «moudjahidine» et idem pour les «chouhada» (martyrs). Le deuxième argument sur lequel personne n’a encore sérieusement travaillé est le fait que le «groupe des 22», qui a été à l’origine du déclenchement de la guerre de Libération nationale, était issu de l’OS (Organisation secrète), créée par le PPA lors de son dernier congrès. Ce même congrès a adopté une résolution par rapport à la religion. Il est dit textuellement que le nationalisme algérien n’est pas une sorte de contre-croisade. Si la lutte nationale tend à libérer le culte musulman des entraves colonialistes, le Mouvement national algérien ne doit pas être confondu avec une organisation religieuse ; de même, il ne faut pas confondre nationalisme et islam. Il faut dissocier la conscience nationale de la conscience religieuse. La qualité d’Algérien ne dérive pas de la religion, pas plus qu’elle ne dérive de la race. Le silence entretenu sur cette question par les autorités officielles et académiques, aussi bien du temps du FIS ou aujourd’hui avec Al-Qaïda, n’a que trop duré alors que l’abcès aurait dû être crevé, au moins depuis la parution du livre de Abdellatif Soltani. C’est parce que les islamistes se sont autoconvaincus que l’indépendance nationale a été arrachée grâce à leur idéologie, qu’un Abou Yahia Al-Libi s’autorise dans son discours diffusé hier de faire le parallèle entre les valeureux maquisards de la guerre de Libération nationale et ses terroristes criminels d’Al-Qaïda au Maghreb, qualifiés des «meilleurs fils du peuple algérien ». Leur adressant un profond «salut» d’une manière qui se veut retentissante, et particulièrement à Droukdel, il lance un appel aux jeunes pour les rejoindre tout en les encourageant à accentuer les activités terroristes et à tuer à ne plus en finir : «Poursuivez votre campagne contre les ennemis de Dieu parmi les héritiers de la France et ses esclaves. Attaquez-les dans leurs casernes et détruisez-les sur leurs têtes. Ciblez-les dans leurs camps et leurs citadelles, et particulièrement les services de renseignement». Et tout autant, il appelle tous les «musulmans de l’ensemble du Maghreb à soutenir leurs frères moudjahidine dans l’Algérie du sacrifice et de tout faire pour éviter la dispersion qui ne profite qu’aux régimes en place qui s’en réjouissent». «Le djihad en Algérie est la porte de l’espoir pour en finir avec les régimes injustes qui ont rempli leurs prisons avec vos jeunes, vos enfants et même vos femmes et qui vous font subir leurs armées, leur police et leurs services de renseignements ». Il considère que «l’Algérie n’est qu’une étape» et c’est Dieu qui a fait de Droukdel un dirigeant pour mener ce combat. Il appelle les Maghrébins à rejoindre en masse les terroristes d’Al-Qaïda au Maghreb : «Unifiez-vous à eux vos efforts, intégrez à eux vos forces, rassemblez vos rangs sous leur bannière, sous leur commandement et leur émirat». Interpellant les «oulémas, poètes, littérateurs de la Mauritanie de la science religieuse », pour soutenir leurs «frères et voisins» envers qui ils ont le devoir de le faire. Il appellera la jeunesse du Maroc à «secouer le trône du roi et à détruire son pouvoir» et d’être pour ses «frères en Algérie un soutien et une assistance ». «Rangez-vous derrière eux», ils sont la porte de la conquête pour vous et pour eux.» Il lancera le même appel aux autres pays du Maghreb auxquels il ajoutera le Mali et le Niger. Ce discours, qui en lui-même est un grand satisfecit adressé à Droukdel, n’est pas seulement une totale approbation des crimes ignobles d’Al- Qaïda au Maghreb. Etant le premier du genre, appuyé par des interludes religieux tout au long des 35 minutes qu’a duré l’intervention, dit par une voix aux intonations qui ressemblent à celles de la voix de Zawahiri, ce discours a tout l’air de marquer le début d’un tournant dans le parcours d’Al-Qaïda au Maghreb. Il est tout simplement annonciateur de nouveaux drames à venir. Mohamed Issami
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