L’Algérie et l’internet ne font pas bon ménage
Classée à la 161e place mondiale
L’Algérie et l’internet ne font pas bon ménage
le 02.08.12 | 10h00
Le conflit opposant l’ARPT à trois opérateurs d’accès à internet et de solutions de télécommunication risque de perdurer. Si le premier oppose un argument réglementaire et commercial, les seconds dénoncent une «mesure arbitraire qui pénalise les consommateurs, compromet l’essor des TIC et met en péril la survie des quelques rares acteurs qui subsistent encore».
Cette polémique rappelle étrangement un autre litige qui avait défrayé la chronique, qui opposait l’Eepad, premier fournisseur privé algérien d’accès à internet haut débit, à son fournisseur de bande passante, Algérie Télécom.
Après deux ans de conflit, ce dossier avait trouvé son épilogue suite à une décision de justice définitive en décembre dernier. Celle-ci a arrêté à 2,2 milliards de dinars la dette commerciale de l’opérateur ADSL vis-à-vis d’Algérie Télécom. Loin des 3,8 milliards de dinars exigés initialement. Ces conflits récurrents posent avec acuité la problématique du développement d’internet et de la qualité du débit. Président de l’Association des sociétés de services et des éditeurs de logiciels, Mokhtar Aiad est scandalisé par le peu d’importance accordée par les pouvoirs publics à ce secteur. «Nous assistons à une situation dramatique et inconcevable. Si nous sommes classés les derniers aujourd’hui, c’est parce que nous avons entamé un mauvais départ. Aujourd’hui, l’informatique reste sous la coupe du ministère de la Poste et des TIC. Or, vouloir développer l’informatique implique une structure au niveau ministériel.
Par exemple, les autoroutes et les barrages disposent d’une agence nationale. Ce qui n’est pas le cas de l’informatique», fustige M. Aiad, dans un entretien avec El Watan. En 2006, des professionnels ont alerté le président de la République sur cette situation peu reluisante, selon lui. Sans grand résultat. «L’informatique a été noyée dans la téléphonie mobile et les problèmes de la poste. On continue encore à parler de problèmes alors qu’on devrait déjà lancer de grands projets dans ce domaine», s’emporte-t-il. Pourtant, selon lui, l’Algérie dispose d’un fort potentiel et de moyens financiers à même de la hisser à une bonne place dans le classement mondial. Au passage, M. Aiad charge l’ARPT de «freiner » l’essor des TIC, en citant la nouvelle réglementation relative aux cybercafés qualifiée de «catastrophique». «Les textes d’application relatifs à l’exonération de la TVA n’ont pas encore été publiés», dit-il, soutenant que l’ARPT devait encourager la démocratisation des TIC et l’émergence de nouveaux acteurs. Interrogé sur l’échec du projet de E-Algérie 2013, lancé en grande pompe par le gouvernement et auquel il a contribué, il confie que celui-ci n’a pas été suivi «d’une bonne gouvernance, de feuille de route et d’objectifs réalisables».
«Au début, il devait y avoir une structure ministérielle pour piloter ce projet. Mais, cela n’a pas été suivi d’application. Le projet est resté au stade de document», dénonce encore M. Aiad, estimant qu’un tel projet, de par son ampleur et son importance stratégique, devait être confié au Premier ministère ou au chef de l’Etat. Autre explication : pour avoir été trop ambitieux, le projet est passé à la trappe, ajoute-t-il. D’après notre interlocuteur, la fuite des cerveaux est également l’une des conséquences du retard dans le développement des TIC. «L’université algérienne forme 1500 informaticiens par an. Certains quittent le pays et d’autres ne font que bricoler. A ce rythme, on serait obligé de faire appel à des spécialistes étrangers», prévient le président de l’Association des sociétés de services et des éditeurs de logiciels.
Il y a lieu de rappeler que le report sin die de la 3G ne fait que compliquer la situation.
Hocine Lamriben
Lenteurs, coupures et pannes récurrentes
Débit très faible, le dernier au monde
le 02.08.12 | 10h00
L’essor d’internet que tentent de faire accréditer vaille que vaille les autorités est contredit pas les classements mondiaux. Dernier en date et celui dressé par NetIndex, une source pour les statistiques globales à large bande qui classe l’Algérie la 176e place en matière de débit internet.
Avec 0.95 Mbps, l’Algérie est la dernière, selon le même organisme. Les analyses ont été réalisées sur la bande passante durant la période du 23 janvier au 9 juin 2012. Les conclusions de ces analyses ont été tirées sur la base de tests de 248,564 adresses IP uniques qui ont été prises en Algérie. Selon NetIndex, certains organismes ne disposent pas eux non plus d’une meilleure bande passante. C’est le cas du Cerist (6.36), Télécom Algérie (1.37), Algérie Télécom – Fawri (0.98) et Wataniya Telecom Algérie (0.15). «Cet organisme ne fait que confirmer ce que nous remarquons déjà sur le terrain, en termes de coupure, de débit, de lenteur de dépannage, et même de satisfaction en matière de demandes de nouvelles lignes téléphoniques», estime Younès Ggrar, ancien conseiller auprès du ministère des PTIC (lire entretien). «A l’international, des normes sont mises en place afin de définir des seuils à partir desquels on peut parler de haut débit.
Il est de 4 mégabits pour certains et de 10 mégabits pour d’autres. En Algérie, on peut voir que l’offre la plus commercialisée est d’un demi-mégabit. On ne peut donc pas parler de haut débit en Algérie», ajoute-t-il, affirmant que «les moyens existent pour la mise en place de véritables services internet haut débit, de même que la demande pour ces services». «Reste à savoir ce qui empêche la concrétisation de tels projets. La question demeure entière quant à l’existence d’une volonté cachée de bloquer ce développement», se demande M. Grar.
Les pays voisins sont mieux lotis. La Libye est arrivée à la 95e place avec 3,99 Mbps, le Maroc à la 98e place avec 3.85 Mbps et la Tunisie à la 141e place avec 2.33 Mbps. En haut du tableau, on retrouve le Luxembourg (41.75), l’Afrique du Sud (27.45), le Japon (23.49), la France (12.21), les Etats-Unis (12.78), la Mauritanie (10.38). Le Bangladesh (1.13) et le Soudan (1.0) ferment la marche. En 2010, le taux de pénétration en Algérie était de 13,6% sur une population de 34 millions d’habitants, selon Nielsen Online, service de la société américaine Nielsen.
L’Algérie ne représentait que 4,3% des utilisateurs du net en Afrique. La première place revenait à l’Egypte, avec plus de 17 millions d’utilisateurs d’internet avec un taux de pénétration de 21,2%. Le voisin marocain occupait, quant à lui, la seconde place avec 10,4 millions d’utilisateurs d’internet et un taux de pénétration de 33%. La troisième place revenait à l’Arabie Saoudite avec 9,8 millions d’utilisateurs et un taux de pénétration de 38%.
Plus de lignes internet à l’horizon 2014
La Tunisie arrivait à la 8e place avec 3,6 millions d’utilisateurs et un taux de pénétration de 34%, soit le cinquième taux dans la région et le premier dans le Maghreb. D’après les derniers chiffres communiqués par l’Union internationale des télécommunications des Nations unies, l’Algérie comptait 4,1 millions d’usagers d’internet en 2009 et affichait un taux de pénétration de 12%. Le nombre d’abonnements ADSL s’élevait fin février 2011 à 830 000, portant le taux de pénétration à 10%, selon l’ARPT. Ce chiffre représente une croissance de plus 18% par rapport à l’année 2009, au cours de laquelle, le nombre d’abonnements a plus que doublé, passant de 300 000 en 2008 à 700 000 en 2009. Le principal opérateur télécoms fixe en Algérie prévoit d’augmenter le nombre de lignes internet à haut débit, qui passerait de 1,8 million à 6 millions à l’horizon 2014.