Ecran libre Le silence républicain de l’Algérie face à la polémique cannoise 03 Mai 2010
«On fait la guerre quand on veut, on la termine quand on peut» Nicolas Machiavel "Extrait de Le Prince"
C’est une véritable guerre des mots qui a éclaté sur les forums de discussions autour de la polémique sur le film Hors la loi de Rahid Bouchareb. Après une première phase de la polémique lancée dès la sélection du film en compétition à Cannes, le député de L’UMP, Lionel Lucas, a trouvé une nouvelle formule magique et belliqueuse pour s’attaquer dans une deuxième phase, le jeudi 29 avril, au film de Bouchareb, à travers une interview. Cette fois, le député de la droite n’attaque pas le film sur la nationalité, mais sur les faits historiques et cela sans même voir une seule image du film, en se basant seulement sur des déclarations d’un militaire qui n’a lu que le scénario. Mais cette polémique ne gagne pas seulement les médias, elle gagne aussi les forums de discussions sur Facebook, et sur les forums des principaux sites qui mettent en ligne la polémique. Ainsi, sur le site électronique du journal Le Figaro, on a déjà recensé depuis jeudi, plus de 550 personnes (un record par rapport aux autres articles), qui ont échangé des mots sans tabous pour débattre non pas de la polémique, mais des relations tumultueuses entre l’Algérie et la France. La plupart des interventions sont anonymes et sont rédigées par des français et des Algériens vivant en France. Un internaute dira, notamment: «La plupart d’entre vous, si ce n’est la totalité, n’ont pas vu le film. A quoi bon commenter le commentaire d’un film?» Car il est vrai que cette polémique a démarré alors qu’aucune image du film n’a été diffusée. Même l’affiche pourrait être sujette à polémique, estiment les adversaires de Bouchareb. Elle a été maintenue secrète, car elle englobe, selon certaines indiscrétions, le drapeau algérien. On se souvient que Bouchareb avait mis le drapeau français sur l’affiche du film Indigènes, ce qui a déplu aux Algériens; cette fois, c’est la France qui sera gênée devant les partisans de l’Algérie française. Dans leurs échanges, les internautes remettent sur la table tous les maux qui existent entre l’Algérie et la France. Le plus curieux dans cette polémique, c’est le silence inquiétant des proches du cinéaste: Jamel Debbouze pourtant un des producteurs des films, Jean Bréhat, son ami de toujours. Est-ce une stratégie ou une préparation pour une meilleure contre-attaque? En tout cas, à Alger, on observe également un silence républicain comme face à l’Égypte; aucun média public n’a voulu commenter cette polémique. Même réaction au niveau des autorités concernées, que ce soit au niveau du ministère de la Culture, ou au niveau de l’Aarc, puisque le DG Orif qui avait accordé une interview exclusive à l’Expression, se refuse aujourd’hui à tout commentaire sur cette affaire. Même les cinéastes et producteurs algériens qui se sont réunis à Alger, n’ont pas fait de commentaire sur cette polémique. La réponse aux imbéciles est venue du délégué général, Thierry Frémaux, qui a réagi pour tenter de mettre de l’eau sur le feu. Même si sa réaction reste insuffisante, elle intervient au bon moment, avant que cela ne prenne des proportions plus importantes. Il reste cinq jours avant la publication du programme détaillé du festival avec notamment l’horaire de la projection du film Hors la loi, c’est à ce moment-là que les adversaires de Bouchareb et de l’Algérie, feront entendre leurs voix sur les marches «rouges» de la Croisette de Cannes.
amirasoltane08@live.fr Amira SOLTANE
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