Les islams… diversité structurelle et questions d’aujourd’hui.

     

La diversité de l’islam dans le monde actuel

  Une diversité structurelle

Les quatre grands chantiers développés par les penseurs modernistes

1) Une nouvelle manière de repenser l’histoire       

2) Une nouvelle approche de la loi

3) Repenser la société et la place de l’islam dans cette société

4) Pour une nouvelle interprétation du Coran

Conclusion                   

    http://www.pelerin.info/theologia/article.jsp?docId=2276760&rubId=16597                                                            

 NOUVEAU) Henri de La Hougue, spécialiste de l'islam et enseignant à l'Institut catholique de Paris, donne quelques repères géographiques et historiques qui aident à découvrir le caractère structurel de la diversité de l’islam. Il examine aussi les chantiers de réforme proposés aujourd’hui par les penseurs modernistes de cette tradition.

"L’islam se radicalise", "l’islam s’ouvre", "l’islam en crise",… les titres accrocheurs ne manquent pas dans nos quotidiens. Pourtant lorsque l’on se plonge dans les articles auxquels ces titres se réfèrent, la complexité des situations apparaît aussitôt. On s’aperçoit qu’il s’agit de l’islam dans un pays déterminé, avec une situation politique précise, un contexte culturel spécifique… autant d’éléments qui font que l’islam dont l’article parle n’est pas du tout représentatif de ce qui se vit ailleurs. Derrière le mot islam se cache des réalités multiples : réalités économiques avec l’augmentation régulière du prix du pétrole et l’achat par les pays du Golfe des technologies américaines et européennes ; réalités politiques avec la question d’Israël ou la crise du nucléaire en Iran ; réalités démographiques avec l’énorme potentiel démographique que représente l’Asie (70% des musulmans du monde) ; réalités religieuses avec la diversité des écoles sunnites, les conflits entre sunnites et chiites, les relations interreligieuses plus ou moins tendues dans le monde ; réalités culturelles avec toutes les composantes extrêmement diverses de l’islam (islam maghrébin, indonésien, subsaharien, etc.

Sans oublier le fait que l’islam, comme les autres grandes religions, est, dans les différents endroits où il est présent, constamment en prise avec un monde qui ne cesse d’évoluer. Le monde bouge, les musulmans évoluent, de même que les chrétiens, les hindous, les bouddhistes… Il est donc bien difficile de dire ce qu’est l’islam aujourd’hui dans le monde, d’autant qu’il n’y a pas de structure unificatrice à laquelle on pourrait se raccrocher pour essayer, au-delà des spécificités locales, d’en déterminer l’essence. C’est justement pour éviter cette réduction essentialiste que nous souhaitons aider le lecteur à entrer dans une meilleure compréhension d’un islam multiple.

Pour cela, nous donnerons quelques repères géographiques et historiques qui nous aideront à découvrir le caractère structurel de la diversité de l’islam. Nous essaierons ensuite de repérer les éléments de cette diversité dans le monde d’aujourd’hui et nous regarderons les chantiers de réforme proposés aujourd’hui par les penseurs modernistes.

Une diversité structurelle

On rêve parfois d’un âge d’or d’une religion, période pendant laquelle celle-ci aurait été clairement identifiable, sans divergences essentielles, mue par un principe transcendant et unificateur dans lequel tous se retrouvaient. Or, il faut se faire une raison, un tel age d’or n’a jamais existé. Nul chrétien ne peut parler de la communauté chrétienne primitive en évoquant seulement le passage des Actes de Apôtres où "tous ceux qui étaient devenus croyants étaient unis et mettaient tout en commun" (1) sans voir les divergences qui ont rapidement marquée la communauté, et dont parle le même livre des Actes (2). Sayyid Qutb (3), maître à penser de la branche radicale des frères musulmans, peut toujours faire référence à une "génération coranique unique" à laquelle il faudrait exclusivement se référer pour que l’Islam puisse retrouver son dynamisme originel, une telle unité n’a jamais existé dans l’islam. La diversité y est structurelle. Elle est présente dès les débuts de l’islam et à engendré, dès la succession de Muhammad, de sanglants conflits internes, au point que les musulmans y font référence en parlant de la grande épreuve, la Fitna.

La querelle de succession qui a suivi la mort de Muhammad n’a pas été sans impact sur la nature même de l’islam. La communauté musulmane s’est divisée à propos de l’autorité que pouvait avoir le responsable de la communauté musulmane et de l’autorité qui pouvait l’instituer. La rupture entre chiites et sunnites qui en a découlée est bien plus qu’une querelle de pouvoir. C’est un véritable désaccord sur le charisme du prophète et le rôle de ses héritiers. Pour les chiites, les successeurs de Muhammad par ‘Alî reçoivent un charisme d’interprétation qui est plus important que le Coran lui-même. Le Coran ne donne que des règles, le sens apparent de la Parole de Dieu. Mais seul le sens caché du texte donne accès à la vérité de Dieu, seule l’interprétation ésotérique qui en est faite, donne accès à la lumière de Dieu. Les sept ou douze imams chiites reconnus par la communauté (4) ont donc un statut tout à fait à part. Ils sont omniscients et ne forment ensemble qu’une seule réalité, toujours présente à travers le dernier imam ; lequel n’est pas mort, mais caché, jusqu’au jour de son retour à la fin des temps. Aujourd’hui les musulmans chiites (5) restent, à travers leurs autorités religieuses, en communion avec l’imam caché. Pour cela, ils n’hésitent pas à revivre la passion du deuxième imam, Husayn, martyrisé à Kerbela (Irak actuel) en 680, grâce aux pèlerinages et aux divers actes de piété dont les télévisions nous ont permis de voir quelques images (flagellations, processions,…). La spiritualité chiite a engendré elle-même différentes scissions au bord de la dérive incarnationiste : les druzes pour qui le calife fatimide al-Hakim (au pouvoir de 996-1021) est une ultime représentation (incarnation pour certains) de l’Un. Ils sont environ 500.000 dans le monde, essentiellement au Liban, en Syrie et en Israël. Les Alaouites de Syrie considèrent que c’est le dixième imam de la lignée de Muhammad par ‘Alî qui est l’ultime porte-parole de Dieu (incarnation pour certains) : ‘Alî-al Nâqî.

Par rapport au sunnisme qui représente 90% de la population musulmane actuelle, la doctrine chiite est donc complètement hétérodoxe. Beaucoup de hadîths auxquels se réfèrent les chiites ne sont pas reconnus par les sunnites et réciproquement. Quant aux Druzes ou aux Alaouites, ils ont leur propre livre sacré, plus important (dans la pratique) que le Coran lui-même. Du reste, l’histoire des relations entre chiites et sunnites n’a été que celles de rivalités de pouvoir et de guerres intestines.

Au-delà du schisme radical entre sunnites et chiites (6), n’imaginons pas que la communauté sunnite soit elle-même uniforme dans sa pensée juridique ou théologique, ni même dans ses différentes formes de vie.

Théologiquement, trois grandes questions ont divisé la communauté dès les premières années : la relation entre la foi et les œuvres, la question de l’origine de l’acte humain et la nature du Coran. La première question est liée au soupçon porté sur Alî d’avoir participé à l’assassinat de son prédécesseur ‘Uthmân. Un homme qui commet une grave faute peut-il toujours être considéré comme faisant partie de la communauté musulmane ? La deuxième question porte sur l’idée de la toute puissance de Dieu : Si Dieu est tout puissant, l’homme peut-il être considéré comme responsable de ses actes ? La troisième question tient au statut donné par les musulmans au Coran : est-il Parole de Dieu incréée ou est-il une création humaine à travers laquelle Dieu parle ? Ces trois questions ne sont pas étrangères à celles que se sont posées d’autres religions et notamment la religion chrétienne. Mais, à la différence de cette dernière, l’islam n’a pas de principe d’autorité, de hiérarchie ou de magistère (7). Si bien que les différentes écoles théologiques et juridiques ne vont cesser de s’affronter sur ces différents points et proclamer haut et fort leur prétention à être porteuse d’un consensus en fait inexistant. Aujourd’hui encore, les différentes écoles théologiques : mu‘tazilite, hanéfite, ash‘arite et hanbalite, ainsi que les rites juridiques qui en découlent : hanéfisme, malékisme, chaféisme et hanbalisme, donnent aux pratiques musulmanes des tonalités très différentes, au point que des observateurs extérieurs peuvent se demander si, à part les cinq piliers, l’islam en Arabie Saoudite où est pratiqué le hanbalisme le plus rigide (vu à travers le prisme d’Ibn Taymiyya puis de ‘Abd al-Wahhab) a quelque chose à voir avec l’islam maraboutique de l’Afrique de l’Ouest. De l’école en vigueur, vont dépendre les règles d’interprétation du Coran, l’usage des coutumes et de la raison dans l’élaboration de la théologie et du droit, la place faite à la liberté de l’homme dans la société, etc (8).

A ce tableau, il conviendrait d’ajouter la diversité apportée par la culture propre à chaque région, ainsi que par l’histoire politique et religieuse de chaque pays. Dans certains pays d’Asie et d’Afrique subsaharienne, les confréries mystiques (tariqa - pluriel : turuq) constituent un véritable poids politique et religieux… rien ne peut se faire sans l’accord de leurs responsables (9). Ces confréries ont une grande influence dans les milieux populaires. Ce sont parfois elles qui organisent la solidarité, la justice, ou l’éducation… les autres structures religieuses étant peu aptes à le faire. Souvent assez rigoureuses, voire ascétiques, ces confréries donnent à leur membres une perspective spirituelle et communautaire que ne donne pas la pratique musulmane des cinq piliers (à part lors du pèlerinage à la Mecque, mais cela n’arrive en général qu’une fois dans la vie). Elles réintroduisent les médiations sensibles nécessaires à l’accroissement de la vie spirituelle (liturgies, rites spécifiques, étapes initiatiques, encadrement spirituel…) et invitent par l’ascèse, la tempérance, la pureté à une relation plus intériorisée avec Dieu. Pourtant ces confréries ne sont pas bien vues par les grandes universités sunnites, encore moins par le rigorisme wahhabite, pour lequel toutes ces médiations constituent des innovations blâmables contre lesquelles il faut absolument combattre.

La diversité de l’Islam ne tient donc pas qu’à la conjoncture actuelle, elle est structurelle. Il y a eu dès le départ, et dans toute l’histoire de l’islam des divergences doctrinales et pratiques très importantes. Mais à la fin du XIXe siècle, la prise de conscience d’un retard de la pensée musulmane sur l’Occident va cristalliser encore davantage les divergences.

La diversité de l’islam dans le monde actuel

La prise de conscience massive d’un retard de la pensée musulmane sur le monde occidental commencera au début du XIXe siècle. On donne parfois les expéditions napoléoniennes en Egypte comme point de repère. Ce thème sera omniprésent dans la presse égyptienne à la fin du XIXe siècle et sera repris par trois figures de ce que les réformateurs nommeront la "renaissance" de l’islam (nahda) : Al-Afghânî (1838-1897), Muhammad ‘Abduh (1849-1905) et Rashîd Ridâ (1865-1935).

Si la plupart des intellectuels musulmans sunnites acceptent, à leur suite, la nécessité d’une réforme en profondeur de la société musulmane, il y a cependant une divergence de fond sur la manière d’engager cette réforme. On peut distinguer trois grandes orientations qui vont marquer le XXe siècle et le début du XXIe : l’orientation laïque nationaliste et socialiste, la réaction fondamentaliste et l’essor des pensées modernistes.

L’orientation laïque, nationaliste et socialiste a été l’orientation dominante durant la période de la décolonisation. Symbolisée par l’évolution laïque de la Turquie à la chute de l’empire ottoman avec l’abolition du califat, par la création du parti Baas au proche Orient, l’influence de Nasser sur le monde arabe,… la réforme de l’islam était imprégnée des idéaux occidentaux de patrie, de liberté, de laïcité. Elle mettait en avant l’islam comme culture et non comme religion qui devait régir le temporel (10).

L’échec économique et social des gouvernements mis en place à la décolonisation, l’écart toujours grandissant entre les pays pauvres et les pays riches (vus par les musulmans comme "l’Occident chrétien"), la création de l’Etat d’Israël (un Etat fondé avec l’appui de l’Occident sur un principe religieux), la montée en puissance du wahhabisme saoudien grâce aux pétro-dollars,… tout cela a contribué à voir se développer une réaction de rejet de tout ce qui était occidental et un enfermement dans un fondamentalisme strict. L’idée est simple : il faut revenir à l’idéal coranique. "Nous, Frères musulmans, considérons que les préceptes de l’islam et ses enseignements universels intègrent tout ce qui touche l’homme dans ce monde et que ceux qui pensent que ces enseignement ne touchent que l’aspect cultuel ou spirituel, à l’exclusion des autres, sont dans l’erreur. L’islam est en effet foi et culte, patrie et citoyenneté, religion et Etat, spiritualité et action, livre et sabre" (11). L’islam doit se débarrasser de toutes les impuretés dont il s’est souillé depuis des siècles à cause de ses relations avec l’Occident. Lorsque les musulmans pratiqueront le "vrai islam", alors Dieu saura les récompenser, comme il le fait déjà avec l’Arabie Saoudite. Ce modèle de réforme regroupe des factions très diverses, à l’instar des frères musulmans, difficilement assimilables de manière globale à leur franges les plus extrémistes (12). Néanmoins c’est dans leurs interprétations les plus radicales que puise aujourd’hui le terrorisme islamique.

Une telle approche, si elle redonne un idéal à certaines couches sociales défavorisées, ne satisfait pas la plupart des intellectuels musulmans qui, pour beaucoup, appellent à un véritable renouveau de la pensée musulmane. Il est nécessaire, de leur point de vue, que l’islam affronte en face le décalage entre l’éducation traditionnellement donnée dans la culture arabo-musulmane et les mille et une questions que posent le monde moderne : la famille (polygamie, tuteur matrimonial, répudiation, adoption…), l’économie (banque, emprunts, intérêt, les asssurances…), l’éducation (statut de la femme, enseignement des matières profanes, réformes des écoles coraniques,…), la technologie (la télévision, internet, le statut des images…), la société (démocratie, laïcité,…), la religion (statut des religions non citées dans le Coran, dialogue interreligieux,…) etc. Cette tendance "moderniste" est représentée par beaucoup de musulmans vivant en Occident, dans le Maghreb, le Proche Orient ou l’Asie. De nombreuses publications font part de leurs préoccupations et de leurs propositions (13). L’ouverture en 2002 de l’Institut d’études des civilisations musulmanes de l’Aga Khan University à Londres, dirigé par l’un d’entre eux (A. Filali-Ansari), témoigne de l’importance de ces recherches. On peut résumer leur approche à quatre grands chantiers : une nouvelle approche de l’histoire, une nouvelle compréhension de la loi, une nouvelle perception du rôle de l’islam dans la société et une nouvelle interprétation du Coran.

Les quatre grands chantiers développés par les penseurs modernistes

1) Une nouvelle manière de repenser l’histoire

Selon la lecture que l’on fait de l’histoire, on va réagir assez différemment aux questions posées dans la société. Pour les penseurs modernistes, l’âge d’or auquel se réfèrent les fondamentalistes n’a jamais existé, l’histoire de l’islam a été marquée dès le départ, par une interpénétration complexe de la religion et des cultures dans lesquelles l’islam s’est enraciné. C’est l’islam qui s’est adapté aux cultures locales et non le contraire. L’autorité politique de l’Islam n’a jamais été fondée exclusivement sur le Coran et le hadîth, elle a subit tout un tas d’autres influences : penseurs chrétiens et juifs, influence perse au temps des abbassides, influence de la philosophie grecque…

A partir du XIe siècle la religion musulmane s’est sclérosée. Pendant cette période, on a présenté l’islam comme religion et mode de gouvernement de la cité politique. La loi religieuse devait tout gouverner. Cela reposait historiquement sur la fiction de l’Etat islamique de Médine (622-632) ou de l’époque idéalisée des califes "bien dirigés". Théologiquement, on justifiait ce comportement par le principe d’unicité de Dieu (tawhîd) qui permettait de ne pas distinguer le droit et la foi. A partir du moment où, suivant les principes de l’école hanbalite et d’Ibn Taymiyya, l’interprétation (ijtihâd) bannissait l’opinion personnelle, la religion ne pouvait que se scléroser dans une imitation et une redite de tout ce qui avait précédé.

Aujourd’hui, si c’est le discours fondamentaliste qui se fait le mieux entendre, celui-ci n’est pas du tout représentatif de l’ensemble des musulmans du monde. Il faut donc affronter avec courage les défis auquel les musulmans sont confrontés, pour y répondre avec réalisme. "Les sociétés arabo-musulmanes ont connu depuis plus d’un siècle et à des degrés divers, des changements significatifs dans tous les domaines, est-il envisageable que ces changements soient sans répercussion au niveau de la connaissance et de la conscience religieuse ? Certes, les mutations auxquelles on assiste sont dues dans la plupart des cas à des facteurs exogènes. Et c’est là probablement l’origine de tant de déphasage entre le réel et l’imaginaire, le vécu et le théorique. De toute évidence il y a une inadéquation flagrante du discours religieux traditionnel, figé, sclérosé ; cependant il est normal que dans une situation de retard historique, de fragilité économique, de dépendance politique et militaire, de quasi stérilité culturelle et technologique, on ait peur du nouveau. Ajoutons que le monopole exercé par les représentants de l’institution musulmane traditionnelle sur ce qui est 'religieusement correct' et l’intérêt des détenteurs du pouvoir politique dans un contexte de déficit démocratique, ne favorisent guère le débat d’idées et la confrontation pacifique des opinions." (14)

2) Une nouvelle approche de la loi

Les penseurs modernistes soulignent que la charia (15) (sharî‘a), telle qu’elle est appliquée dans certains pays musulmans, ne peut pas permettre à la société musulmane de répondre aux questions posées par le monde contemporain. Elle favorise au contraire une société renfermée sur elle-même, incapable d’entendre les défis auxquels elle doit faire face.

Ces penseurs soulignent d’abord la difficulté du recours aux sources du droit musulman (usûl al-fiqh). Le Coran n’est pas un code juridique et ne peut apporter de réponses aux questions du monde contemporain. Seuls 214 versets sur 6236 contiennent des éléments sur lesquels le droit musulman (fiqh) peut s’appuyer. Et encore si l’on enlève les versets liés à l’exercice du culte, le nombre passe en dessous d’une centaine. De plus, l’ensemble de ces versets coraniques ne sont pas à interpréter de la même manière : certains donnent des règles fondamentales, d’autres évoquent des attitudes liées à telle ou telle circonstance et ne sont donc pas nécessairement à prendre comme règle universelle. Le Coran a lui même évolué au cours des 23 années de la révélation. D’autre part, le Coran donne souvent une direction, mais ne va pas forcément jusqu’au bout de la logique. Par exemple, le Coran prône l’affranchissement de l’esclave mais ne prohibe pas l’esclavage ; pourtant, l’abolition de l’esclavage aujourd’hui va dans le sens du Coran. Il est donc très artificiel de vouloir fonder à tout prix la jurisprudence sur des versets coranique. Quant aux hadîths, sur lesquels repose en grande partie le fiqh, il faudrait en faire une sélection plus rigoureuse. La plupart ont été inventés après la mort de Prophète pour affermir des positions théologiques, juridiques ou politiques. Plus encore que le hadîth lui-même, c’est sans doute l’usage qui en est fait qui est remis en cause : les méthodes d’interprétation de la jurisprudence à partir de l’analogie ou du consensus ne font que renfermer l’islam sur des perspectives anciennes. Les vraies questions ne sont pas affrontées.

Les penseurs modernistes critiquent vivement ceux qui réclament l’installation de la charia au nom de l’islam. D’abord parce que les sources du fiqh étant en réalité pleines d’emprunts étrangers (pendant les premiers siècles de l’islam, l’administration économique, juridique et sociale était restée aux mains des byzantins ou des perses), l’application d’une loi purement islamique est un mythe. Ensuite parce que beaucoup de ceux qui veulent appliquer la charia ne cherchent en fait qu’à appliquer les peines légales prévues par le Coran ; ce qui revient en Occident au débat sur l’application de la peine de mort. Le débat n’est donc pas d’abord religieux, mais veut répondre à un besoin de sécurité. La charia apparaît à certains, surtout aux plus pauvres, comme un remède miracle, mais elle n’est pas capable de répondre aux vrais problèmes que constituent la pauvreté, la corruption,… Finalement, l’application de la charia dans certains pays musulmans est un moyen politique d’affermir l’autorité des dirigeants ou de satisfaire la conscience de quelques-uns, mais elle ne correspond ni au charisme de l’islam, ni aux attentes du monde moderne.

Pour pouvoir adapter le fiqh aux questions actuelles, il est donc nécessaire de repenser le rapport aux sources de l’islam, en s’attachant non pas à la lettre des textes, mais aux finalités de la loi (maqâsid al-sharî‘a) : la protection de la religion, des personnes, de la raison, de la descendance et des biens… Dieu a créé l’homme libre et responsable de la création. La loi doit donc être au service de cette responsabilité.

3) Repenser la société et la place de l’islam dans cette société.

Les penseurs modernistes constatent l’échec de l’islam politique dans ses réalisations actuelles. L’islam politique n’apporte pas de solutions économiques dans les pays pauvres ; la charia, là où elle est appliquée, entraîne le fanatisme et maintient l’ignorance. Quant au terrorisme, un des fruits de cet islamo politique, il porte le contre témoignage absolu de ce qu’est l’islam dans son aspiration religieuse. Il est donc nécessaire de s’orienter vers nouvelle compréhension de l’islam dans la société, d’aller résolument vers une société sécularisée et pluraliste, de lutter pour bâtir une société plus équitable avec un code de la famille adapté à la modernité et respectueux de l’égalité de chacun. Il ne faut pas chercher à appliquer littéralement le Coran, mais regarder plutôt ce que le Coran a voulu instaurer à son époque : une meilleure liberté, une plus grande égalité de chacun, etc. Une loi comme celle de l’apostasie qui se justifiait dans la situation de guerre, aujourd’hui donne un contre témoignage de ce qu’est l’islam et de la liberté que Muhammad voulait pour chaque homme.

L’islam s’est figé en s’institutionnalisant. Un accent excessif a été mis sur les aspects juridiques aux dépens de la théologie et de la vie spirituelle. Aujourd’hui les musulmans doivent laisser une plus grande place à la raison critique, accepter de remettre en cause l’absolutisme si communément répandu et admettre la liberté de conscience de chacun. L’unicité de Dieu, la peur de tomber dans le shirk (le fait d’associer à Dieu autre chose que lui), la crainte de ne pas préserver absolument la frontière Créateur/créature,… tout cela empêche l’homme de s’affirmer comme être autonome. "Toute approche rationnelle qui ne vise pas à montrer la précellence de Dieu sur les hommes et sur celle de l’islam sur les autres religions est invalidée d’avance" (16). Accorder trop de crédit à la raison humaine conduirait à minimiser l’importance de la révélation, laquelle couvre tous les domaines, selon le verset : "Nous avons fait descendre le Livre sur toi comme un éclaircissement de toute chose" (16,89).

Malek Chebel (17) souligne par exemple que théologie classique du Coran incréé est finalement peu favorable à l’affirmation du sujet autonome en islam. Directement parce qu’elle nie au Prophète toute implication de sa personnalité dans le discours religieux de l’islam. Elle fait de lui un simple porte-parole "matériel" de Dieu. Selon Chebel et d’autres modernistes, la thèse de l’analphabétisme du prophète ne tient pas… Mise en place pour valoriser l’idée d’un Coran miraculeux et incréé, elle est aujourd’hui un facteur important de la négation de l’être dans l’islam. Or le prophète a été érigé en modèle de croyant… ce qui signifie que le croyant n’a pas de parole religieuse à dire autre que de celle de réciter le Coran. Indirectement parce que la théologie du Coran incréé met en exergue de manière indubitable la langue arabe des premiers siècles de l’islam comme langue de la révélation de Dieu. Or dans cette langue, il n’y a pas de nom personnel : l’homme est défini comme "père de…" ou "fils de…", mais jamais par son nom personnel. Il n’y a pas non plus de verbe être en arabe ; il y a bien un verbe kâna mais celui-ci a un sens d’action, d’advenir ou d’avoir été (au passé). L’homme arabe n’exprime pas ce qu’il est.

Du coup, il faut souligner le peu de place laissé au doute en islam. Le doute est un péché, une tentation satanique contre laquelle l’homme doit absolument résister. La responsabilisation de la foi s’en trouve du coup effacée. Certes le Coran rappelle qu’il n’y a pas de contrainte en religion (2,256), mais il n’y a pas non plus de possibilité de penser son rapport à Dieu, de faire le choix d’y adhérer. On y est… et toutes les questions qui pourraient remettre en cause cette appartenance sont considérées comme diaboliques. Il n’y a donc pas d’idée de responsabilité humaine dans la réponse de foi donnée à Dieu, ni d’idée de progrès dans le rapport à Dieu ou le rapport aux autres.

4) Pour une nouvelle interprétation du Coran

Enfin, et c’est peut être le chantier le plus important, parce que sous-jacent aux autres, les penseurs modernistes invitent à une nouvelle interprétation du Coran. Traditionnellement l’exégèse musulmane (tafsîr) repose essentiellement sur deux piliers : le Coran lui-même (18), et les hadîths rapportés par les proches compagnons. Beaucoup de commentaires classiques ne s’aventurent pas sur des terrains douteux et renoncent à expliquer les passages obscurs. Quant à la plupart des commentaires contemporains, ils ne font que recopier et compiler les commentaires classiques ; s’ils abordent quelque fois des questions nouvelles, ils restent sur les mêmes bases intellectuelles et culturelles que les commentaires traditionnels, ce qui empêche tout renouvellement de la pensée. Pour être sûr ne pas toucher à l’intégrité du Coran incréé, ils ne prennent aucun risque sur une interprétation actuelle de la Parole de Dieu. H’mida Ennaifer réfute cette pensée en montrant qu’elle ne tient pas compte du fait que, si les commentaires coraniques anciens étaient conformes au système épistémologique et culturel de leur époque, les commentaires contemporains qui reprennent ces principes ne le sont pas du tout. En reprenant des principes vieux de quatorze siècles, ils érigent ces principes en système a-culturel et a-chronique. Or ce ne peut pas être le but d’un commentaire qui, par définition, éclaire une parole à un moment donné et pour un public précis (19).

Il faut d’abord repenser le statut du texte et de l’inspiration coranique. Pour la plupart de ces auteurs, la révélation ne peut plus être considérée comme une dictée littérale provenant Dieu. La révélation doit se comprendre comme un message donné par la médiation de Muhammad, lequel a saisi des significations supérieures, les a exprimées dans la langue parlée qui était la sienne et celle de ses contemporains. Muhammad n’est pas qu’un « transmetteur matériel », les révélations qu’il a reçues ont été préparées par des années d’écoute et de méditation. La Parole de Dieu l’a touché dans son cœur et il a lui-même témoigné, avec ces propres mots, du message qu’il avait reçu. Ainsi le Coran peut être à la fois Parole de Dieu et parole du Prophète Muhammad.

Le thème de l’inimitabilité coranique (i‘jaz) n’est pas une conception magique, comme ont voulu le faire croire pendant des années ceux qui justifiaient par le Coran leur pouvoir temporel. La beauté littéraire de cette œuvre est inimitable comme d’autres grands textes littéraires sont inimitables. Théologiquement, l’inimitabilité renvoie au message véhiculé à travers le texte… elle renvoie au mystère de Dieu et non à la littéralité du texte. La notion de "livre" dans le Coran ne renvoie pas à un livre matériel, mais au contenu que Dieu a voulu charger les prophètes de transmettre. Le langage coranique, lui, utilise, comme les autres langages religieux, des symboles, des figures, des métaphores, des allusions... Il essaie de traduire l’indicible : la relation de l’homme à Dieu. Cela signifie qu’il y a toujours une réduction : il s’agit de "mesurer l’invisible à l’aune du visible" selon l’expression d’Abdelmajid CHARFI (20): il faut donc "plier le transcendant aux catégories nécessairement limitées de l’humain".

Contre les lectures concordistes (21), ces penseurs affirment que le Coran est un livre littéraire et spirituel qui n’a pas de prétention scientifique ou historique. Les contradictions et imprécisions y sont d’ailleurs très nombreuses, contrairement à ce qu’ont pu en dire les tenants d’une perfection littérale de Coran. Certains versets mettent en scène des personnages historiques, mais dans le but de dire quelque chose de l’attention de Dieu aux hommes et non de "prouver" le caractère historique du Coran. D’autres versets du genre parabolique, font allusion a des événements qui n’ont jamais existé, mais dont "l’histoire" a du sens pour les gens (22). D’autres versets reprennent des traditions véhiculées par d’autres religions, d’autres des poésies pré-islamiques, etc. Il n’y a rien de dévalorisant pour le Coran de dire qu’il utilise des genres littéraires divers, que l’on retrouve dans d’autres grandes œuvres littéraires.

Pour tout cela, il est temps de favoriser une nouvelle exégèse du Coran basée, non plus sur l’imitation et la reproduction de commentaires anciens, mais sur une relecture en profondeur à l’aide des sciences analytiques et de l’usage de sa raison. Cette nouvelle exégèse sera à même de donner à l’islam les clefs d’interprétations qui lui manquent pour trouver sa place dans la société moderne et mettre en valeur le charisme qui lui est propre.

Conclusion

Nous avons cherché tout au long de cet article à montrer la complexité de l’islam. Il n’y a pas un islam, mais des visages de l’islam qui diffèrent suffisamment, conjoncturellement et structurellement pour que l’on ne puisse pas déterminer un visage qui serait plus représentatif qu’un autre. Les druzes sont musulmans, les alaouites sont musulmans, les ismaélites, sont musulmans, les chiites duodécimains sont musulmans, les zaydites sont musulmans, les wahhabites sont musulmans, les marabouts de la Casamance qui font boire de l’encre coranique en guise de médicaments sont musulmans, les derviches tourneurs sont musulmans sont musulmans,… ceci d’autant plus que les grandes universités de l’islam sunnite (al-Azhar au Caire, Zitouna à Tunis ou Qaraouine à Fez) qui fédéraient le monde sunnite perdent progressivement de leur influence au profit d’autres courants plus diffus.

Quand on lit "l’islam se radicalise" ou "l’islam s’ouvre", de quel islam parle-t-on ? En plus de ces diversités structurelles, les musulmans n’échappent pas aux phénomènes générationnels qui fait que les enfants ne se retrouvent plus dans l’islam de leurs parents ou grands-parents. En France, il suffit de voir la difficulté de mettre en place un Conseil français du Culte musulman (CFCM) et les tensions qui, trois ans après sa création, minent encore son fonctionnement, pour toucher du doigt cette diversité.

Depuis un siècle, beaucoup de penseurs souhaitent un renouveau de l’islam, une renaissance. Mais les modalités de cette réforme ne font pas l’unanimité. Si l’islam laïc nationalise semble historiquement céder le pas aux revendications islamiques radicales, il ne faudrait pas passer sous silence la toile qui se tisse lentement par les penseurs modernistes. Les réflexions de des penseurs sont plus complexes à saisir et à résumer que les propositions caricaturales des penseurs fondamentalistes parce qu’elles essaient de prendre en compte la complexité du monde d’aujourd’hui. Du coup, on n’en parle moins. Cependant l’influence des "modernistes" ne cesse de croître. L’effondrement des frontières physiques, culturelles et religieuses, auquel est affronté le monde d’aujourd’hui nécessitera dans chaque religion l’élaboration de nouveaux repères identitaires, sociaux et religieux. Ces penseurs y contribuent largement par leurs nombreuses publications partout dans le monde.

 
 

Notes :

1. Cf la description de la communauté après le Pentecôte en Ac 2, 42-47.
2. Cf. le concile de Jérusalem au ch. 15.
3. Penseur égyptien condamné à mort en 1966 pour sa complicité dans des attentats islamistes, Sayyid Qutb rédige en prison un commentaire du Coran, ainsi qu’un petit livre Ma°âlim fî-l-tariq (Jalons sur la route) où il invite les musulmans à une réforme radicale qui ne se référerait qu’au Coran, à l’image de ce qu’a vécu la première génération de musulmans.
4. Les chiites "septimains" (ou ismaéliens) reconnaissent ce charisme à sept imams descendant de Muhammad. Ils sont peu nombreux et se retrouvent essentiellement autour de l’Agha Khan. Les chiites "duodécimains" reconnaissent ce charisme à douze descendants du prophète. Ce sont les chiites essentiellement présents en Iran, en Irak et au Liban. L’ensemble des chiites représente 10% de la communauté musulmane.
5. Pour mieux comprendre le chiisme, on lira avec intérêt le livre de Yann RICHARD, L’Islam chi’ite, croyance et idéologies, Paris, Fayard, 1991 (303 p.) ou ceux d’ Henry CORBIN, En Islam Iranien : aspects spirituels et philosophiques, 4 volumes, Collection Tel n° 189-192, Gallimard, Paris, 1971-1972. Pour les Ismaéliens, on pourra se référer au livre de Farhad DAFTARY, Les islaméliens, Histoire et traditions d’une communauté musulmane, Fayard, Paris, 1998 (371p.).
6. Je n’évoque ici ni kharijites, ni les zaydites qui représentent moins d’1% de la population musulmane actuelle.
7. Le califat, aboli par le parlement turc en 1924, n’était plus guère représentatif de l’unité du monde musulman sunnite depuis la fin de la période abbasside (1258) .
8. Pour en savoir plus, on pourra se référer au livre de Sami A. ALDEEB ABU-SALIEH, Introduction à la société musulmane, Fondements, sources et principes, Eyrolles, Paris, 2006 (462p.).
9. Pour en savoir plus, on pourra se référer au livre rédigé sous la direction de POPOVIC et VEINSTEIN : Les voies d’Allah : les ordres mystiques dans le monde musulman des origines à aujourd’hui, Fayard, Paris, 1996. (711 p.)
10. Le parti Baas a d’ailleurs été fondé par un chrétien, un sunnite et un alaouite.
11. Extrait du message de Hassan al-Banna lors du 5ème congrès au Caire en 1951. Cf. Pisai, Etudes Arabes n° 61, p. 35-37
12. On pourra se référer à la minutieuse enquête menée par Xavier TERNISIEN, Les frères musulmans, Arthème Fayard, Paris, 2005 (363p.)
13. Parmi les auteurs les plus connus on peut citer : Ali MERAD, Mohammed CHARFI, Abdelmajid CHARFI, Mohamed TALBI, Abdou FILALI-ANSARI, Malek CHEBEL, Nasr Hamid ABOU ZEYD, Mahmoud TAHA, FAZLUR-RAHMAN, Mohammed ARKOUN, Mustapha CHERIF, Hmida ENNAIFER, Sayyid AL-‘ASHMAWI, Hasan HANAFI, Muhammad SHARUR, Farid ESACK, Abdolkarim SOROUCH… Tous ont rédigé des articles et des livres ces dernières années pour promouvoir un islam différent. En français, trois publications récentes rendent compte de ces réflexions : Abdou FILALI-ANSARI, Réformer l’islam, La Découverte, Paris, 2003 ; Rachid BENZINE, Les nouveaux penseurs de l’islam, Albin Michel, Paris, 2004, Alain ROUSSILLON, La pensée islamique contemporaine, Teraèdre, Paris, 2005.
14. in Mohamed Talbi, Plaidoyer pour un Islam moderne, Ceres, Tunis, 1998, 195 p., p. 7.
15. Il convient ici de distinguer la sharî‘a qui signifie la révélation dans laquelle puise la jurisprudence musulmane (fiqh) et cette jurisprudence elle-même. Par abus de langage on parle d’application de la charia, mais en fait, c’est toujours une certaines jurisprudence qui est appliquée. Celle-ci est établie par les différentes écoles juridiques.
16. Malek CHEBEL : Le sujet en Islam, Seuil, Paris 2002, p. 17.
17. Malek CHEBEL est un des auteurs vivant et publiant en France les plus productifs. On lira avec intérêt son Manifeste pour un islam des lumières (27 propositions pour réformer l’islam), Hachette Littératures, Paris, 2004 (216 p.). Le développement qui suit est Ã©laboré dans Le sujet en islam, op. cit.
18. Ibn Kathîr dans l’introduction de son tafsîr explique que la meilleure façon de comprendre le Coran est d’écouter comment Dieu lui-même l’explique. Il s’agit donc de chercher dans d’autres versets des sens analogues qui pourraient aider à faire comprendre ce que Dieu a voulu dire dans tel autre verset. Lorsqu’il n’y a pas de solutions, il faut avoir recours aux explications du Prophètes, rapportées par les compagnons les plus proches. Et s’il n’y a pas d’explication claire, mieux vaut ne pas s’aventurer à donner des explications hasardeuses : "Dieu est le plus savant !" (Allâhu a‘lâm).
19. H’mida ENNAIFER est un penseur tunisien, ancien professeur de théologie de l’université de la Zitouna à Tunis. En plus de nombreux articles, il a écrit un livre intitulé Les commentaires coraniques contemporains, Analyse de leur méthodologie, Pisai, Rome, 1998 (version bilingue 105 p. dans chaque langue). Il rassemble dans ce courant traditionaliste, les auteurs suivants : Al-Alûsî (de Bagdad, mort en 1854), Al-Qanûjî (d’Inde mort en 1889), Al-Bayrakhtî (d’Iran, mort en 1894), Atfayyash (d’Algérie, mort en 1914), Al-Sa‘dî an-Nâsirî (d’Arabie Saoudite, mort en 1956), Al-Chinqîtî al-Juknî (de Mauritanie, mort en 1973), Al-Sâbûnî (né en 1928 en Syrie) et Al-Qattân (Égyptien contemporain).
20. Abdelmajid CHARFI, L’islam entre le message et l’histoire, Albin Michel, Paris, 2004, p. 61
21. La plus célèbre étant celle de Maurice Bucaille, La Bible, le Coran et la science, Seghers, Paris, 1976.
22. L’impact de l’exégèse chrétienne sur leur réflexion est explicité par beaucoup de ces auteurs, certains comme Mohamed Arkoun (cf. Lectures du Coran, Alif Méditerranée, Tunis, 1991) appelant de leurs vœux le développement d’un langage et de concepts commun pour parler de révélation, d’Ecritures et de Parole de Dieu dans nos traditions respectives. Ici, la distinction rappelle la distinction classique dans l’exégèse chrétienne entre Historie et Geschichte.

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Henri de La Hougue
Spécialiste de l'islam, enseignant à l'Institut de science et de théologie des religions (Institut catholique de Paris) et membre du Groupe de recherches Islamo-Chrétien (GRIC).


http://www.pelerin.info/theologia/article.jsp?docId=2276760&rubId=16597

 
 
 
 
 
 
 
 


10/10/2006
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