6 mètres sur 3, c’est pas assez suspect !

Il faut lui trouver une place. A elle aussi. S’il n’y en a pas, à première vue, il va falloir en faire, pousser un peu, se serrer, cohabiter. Eh oui ! Cette nouvelle brigade de surveillance du train de vie des Algériens doit trouver sa place dans le cimetière à commissions. Le grand cimetière à commissions. L’immense cimetière où sont enterrées les commissions créées et tuées dans le courant de la même journée. Commission de lutte contre la corruption. Allah Yerham ! Commission de suivi des investissements hors hydrocarbures. Allah Yerham ! Commission d’enquête sur la pomme de terre. Allah Yerham ! Commission d’enquête sur les terres agricoles reversées au foncier constructible. Allah Yerham ! Commission d’enquête sur l’emploi des enfants des pontes du régime. Allah Yerham ! Les processions se suivent et ne se ressemblent pas vers le cimetière. Ne se ressemblent presque pas. Car, au fond, c’est le même cheminement pour tous. A peine installés, les membres des commissions sont gentiment mais fermement priés d’endosser le «K’fen», la tenue funéraire, et de se laisser conduire docilement à leur dernière demeure. Aurons-nous l’insigne honneur avant l’enterrement de voir déambuler dans nos rues quelques inspecteurs téméraires de ladite commission ? J’en doute ! Quel inspecteur aussi téméraire et inconscient soit-il sortirait en mission sans son arme ? Une arme purement et simplement confisquée avant même de lui avoir été attribuée. Eh oui ! Son arme, à cet inspecteur, c’est l’impôt sur la fortune. Sortir nu, alors ? Comme un policeman londonien, sans flingue approprié ? Même le maire de Londres songe sérieusement à réviser cette vieille loi sur le désarmement des Bobbies. J’imagine déjà le flic en quête de fortunes douteuses et qui rendrait un rapport relevant des anomalies contre une grosse poêle, la poêle étant un instrument essentiel dans la cuisine du Palais. Même s’ils ne l’envoient pas tout de suite au cimetière à commissions, le pôvre inspecteur se verra conseiller un bon ophtalmo-maison, une cure de repos à Hammam Righa ou carrément un départ à la retraite vachement anticipée. Et puis, au fond, pourquoi chicaner, hein ? Un cimetière, c’est bon pour des limiers censés s’user les yeux à guetter l’argent sale. A trop écarquiller les mirettes, à trop fouiller dans des endroits où il ne fait jamais bon se trouver en dehors des horaires officiels, on risque la cécité, un troisième œil au milieu du front ou l’hôpital psychiatrique. Donc, l’un dans l’autre, le cimetière, c’est tout de même mieux. Ça repose les yeux, ça apaise définitivement le front et ça évite de s’enrhumer dans son voyage vers «El Akhra», sa destinée. A quand une commission de surveillance des … cimetières à commissions ? Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.
H. L.

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