Polnareff .le retour

 

jeudi 1 mars 2007, 19h49 --

PARIS (AP) - Trente-quatre ans après son dernier concert en France, c'est tel le Messie que Michel Polnareff est attendu à partir de vendredi soir au Palais Omnisports Paris-Bercy (POPB), puis pour une tournée d'une trentaine de dates à travers la France, en Suisse et en Belgique.

Un visage aux traits reconnaissables entre tous, masqué par d'éternelles lunettes noires cerclées de blanc devenues une signature. De longs cheveux blonds et bouclés, tel est le Polnareff, attendu de pied ferme par plusieurs dizaines de milliers de fans pour une série de concerts exceptionnels, marquant le retour de l'enfant prodigue, et dont la dernière prestation sur scène en France remonte au 27 mars 1973 à l'Olympia, suivie après une tournée triomphale au Japon, pays où il est aussi devenu une icône, par un ultime passage en point d'orgue, au Forest National de Bruxelles (26 octobre 1975), son tout dernier concert en Europe.

Paranoïaque pour les uns, mégalomane pour les autres, mais certainement fidèle. C'est grâce au lien quasi viscéral qu'il entretient dès la fin des années 90 avec sa très large base de fans en France, notamment via son site Internet, qu'a été décidé ce très attendu retour sur scène.

"J'avais senti une envie mutuelle. Moi, de revenir, eux de me voir" expliquait-il récemment à "Paris-Match". Et de mettre fin à ce qui s'apparentait à l'Arlésienne, plusieurs retours ayant auparavant été annoncés, puis infirmés.

La légende Polnareff, elle, est pourtant bien là. Oscillant entre écrans de fumée, troubles dépressifs soignés à coups de cures de sommeil ou savants calculs mercatiques avant l'heure, comme sur l'affiche de "Polnarevolution" (1972) où il apparaît fesses nues, lui attirant au passage un procès où il devra s'acquitter de "dix francs d'amende par postérieur collé", la vraie vie de Michel Polnareff n'a rien eu d'un long fleuve tranquille.

Le frêle adolescent qu'il était, né dans une famille de musiciens très vite conscients du potentiel artistique de leur rejeton, ne lui ont pas rendu la tâche facile. Entré au Conservatoire dans sa 11e année, il en sort dès l'année suivante avec un premier Prix d'honneur, quand l'âge moyen des récipiendaires était de 15 ans. S'il est manifestement surdoué, notamment en solfège, il en paiera le prix fort.

Après une époque de vaches maigres à Montmartre, où il se fait éconduire du "Petit conservatoire de Mireille", c'est un Polnareff pugnace qui remporte en février 1966 le premier prix du tremplin organisé par le magazine "Disco Revue", avec à la clé, un contrat sur le récent et prestigieux label Barclay... qu'il décline. Cela ne l'empêchera pas de signer et d'enregistrer un peu plus tard, chez Disc AZ, son premier titre "La Poupée qui fait non", adaptée par Frank Gérald de "The Dolls Who Says No", dont aucun éditeur ne voulait en son temps, mais pour lequel Jimmy Page des Yardbirds (futur Led Zeppelin) en personne jouera les accords de guitare à l'enregistrement.

La machine Polnareff était lancée et la légende s'en suivait, auréolée d'un voile de mystère suite à son exil volontaire vers les Etats-Unis, mais sur le paquebot "France". Ruiné par son agent véreux, mais juridiquement responsable, il fut sauvé in extremis par ce billet transatlantique, acquis au temps de sa première gloire.

La suite est ponctuée de succès discographiques majeurs et de périodes de doutes, voire de réclusion comme les 801 jours passés dans la suite d'un palace parisien, période à laquelle il recours à la vodka pour noyer une angoisse, celle de devenir aveugle. Il en réchappe finalement grâce à une intervention chirurgicale réussie d'une double cataracte brune fin 1994.

Aussi, conservera-t-il sur scène ses célèbres lunettes noires, sa vision supportant toujours mal les éclairages violents. Quelque 26 chansons figurent sur la "play-list" de sa tournée 2007, dont les incontournables "Lettre à France" ou "Goodbye Marylou", "Love Me Please Love Me", "Je suis un homme".

Un moment intimiste est prévu avec "Qui a tué grand-maman" jouée à deux instruments, alors que le "Bal des Lazes" sera revisité version heavy metal ou que "When I'm in Love" sera accompagné d'une chorale gospel de 160 chanteurs -préenregistrée- mais présente sur écran géant, a confié mardi à l'Associated Press le journaliste Alain Morel, qui suivi l'artiste depuis son départ de Los Angeles, jusqu'à son arrivée à Paris.

Ceux qui n'auraient pu trouver de places en dépit du kiosque "dernière minute" situé devant le POPB, mis en place par la production pour pallier l'éventualité d'un marché noir de billets, pourront toutefois écouter vendredi soir le spécial "En attendant l'entrée en scène" de 20 h à 20h50 sur RTL, ou se consoler avec le dernier opus de leur idole, "Ophélie flagrant des lits" (Universal), sorti en décembre. AP

rao/cre/mw

 

Polnareff : "Le public ne se trompe jamais"

Propos recueillis par BERTRAND DICALE.
 Publié le 01 mars 2007
Actualisé le 01 mars 2007 : 07h35
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Polnareff :
«Je pense que le public peut se tromper ou se laisser avoir pendant un petit moment sur l'artiste mais, sur une longueur de temps, il ne se trompe jamais.»

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Polnareff :
«Je pense que le public peut se tromper ou se laisser avoir pendant un petit moment sur l'artiste mais, sur une longueur de temps, il ne se trompe jamais.»
DR.

Trente-quatre ans après ses dernières scènes en France et à la veille de sa première à Bercy, le chanteur évoque ses concerts, son long silence et sa popularité...

 
LE FIGARO. - On voit sur les photos de vos répétitions que vos lunettes à monture blanche font partie de votre décor.
 
Michel POLNAREFF
. - C'était un peu prévisible. On avait le choix entre les lunettes et le cul, qui sont les deux symboles qui m'accompagnent depuis longtemps. On a choisi la finesse. (Rire.) Je n'ai pas voulu un spectacle à grand renfort d'effets, mettre 100 000 ampoules de plus que le groupe d'avant. Je voulais que ce soit vraiment des retrouvailles. Je voulais que les retrouvailles de ­Polnareff et de son public soient fondées sur la musique.
 

 
Comment va votre voix ?
 
Tout le monde se pose cette question, moi le premier. C'est vrai que j'avais le trac, pour être franc. Ça fait un moment que je n'avais pas pratiqué sur scène, même si j'ai enregistré beaucoup de choses entre-temps - beaucoup de choses qui ne sont pas sorties à cause de problèmes légaux. J'avais la même appréhension que le boxeur qui remet les gants en se demandant si sa droite est toujours aussi bonne. Eh bien, ça a l'air d'aller plutôt bien.
 

 
Vous parlez de chansons qui n'ont pas pu sortir...
 
Les problèmes légaux sont réglés, elles vont pouvoir sortir. Mais pour ne pas trop mélanger, je pense que ce sera d'abord le CD et le DVD du spectacle qui sortiront. J'essaie dans ce spectacle de ne pas faire trop de chansons nouvelles parce qu'on a envie d'entendre les incontournables. Quand je suis allé voir Elvis à Vegas, à l'époque, et qu'il ne chantait pas Don't Be Cruel, Jailhouse Rock et toutes les chansons que je connaissais, j'ai été déçu. Donc, je reprends des chansons que je ne pensais pas avoir tant de plaisir à chanter. Et avec les musiciens exceptionnels qui m'accompagnent, les nouveaux arrangements vont beaucoup plus loin qu'au Roxy - plus rock, plus jazz, des couleurs très intéressantes.
 

 
Serez-vous fidèle aux versions originales ou y aura-t-il des surprises ?
 
Les gens sont partis pour avoir de grosses surprises. Quand j'ai commencé à chanter sur scène, j'étais très maniaque sur le fait que les chansons soient aussi proches que possible de l'enregistrement que j'en avais fait. Maintenant, c'est exactement le contraire : ce qui m'amuse, c'est de faire quelque chose de drastiquement différent parce que je crois que le public aime avoir des versions longues, des versions remixées, des versions radio, etc. Ma démarche est de montrer que ces mélodies peuvent tenir sur des rythmes beaucoup plus poussés. Au lieu d'avoir du joli sur du joli, on va avoir du joli sur du fort. Ce qui sera un grand choc et un bon choc, c'est la nouvelle version du Bal des Laze, limite heavy metal mais qui est même devenue plus lyrique que la version originale.
 

 
Vous venez de sortir une nouvelle chanson, Ophélie flagrant des lits, au refrain très années 1980...
 
C'est un collage avec des clins d'oeil dans tous les sens : les années disco, le punk, la nouvelle vague américaine à la Pink... Je me suis bien amusé.
 

 
Combien de nouvelles chansons sur scène ?
 
Ophélie et une autre surprise.
 

 
Y a-t-il des chansons que vous vous refusez absolument à chanter ?
 
Il n'y a aucune chanson dont j'ai honte, aucune que je renie, même s'il y en a qui ont pris des rides ou dont je ne sais plus très bien pourquoi je les ai faites. L'ombre qu'a porté à l'époque Y'a qu'un ch'veu sur Le Bal des Laze m'a énervé. Sur la longueur, Le Bal des Laze a gagné, mais maintenant ça m'amuse de chanter Y'a qu'un ch'veu sur scène.
 

 
Que s'est-il passé pour que, toutes ces années, vous n'ayez pas plus donné de concerts ?
 
C'est une histoire passionnante et malheureusement c'est à moi qu'elle arrive. Je ne peux pas vous donner en une phrase toutes les explications du mystère - entre guillemets - de la disparition - entre guillemets - de Polnareff, avec toutes les fausses annonces de retour qui ont exaspéré tout le monde, y compris moi. Chaque fois qu'on voyait des photos ou que sortait un livre, c'était reparti : au loup ! Le grand retour ! L'Arlésienne ! C'est pour ça que je suis allé l'annoncer moi-même au journal de Claire Chazal. Si je ne l'avais pas fait, personne n'y aurait cru. Mais, même aujourd'hui, il y a des gens qui pensent que je ne viens pas.
 

 
Là, en l'occurrence, c'est un plaisir partagé : mon public avait envie de me retrouver à un moment où j'avais envie de le retrouver - le ti­ming parfait. C'était important pour mes fans de savoir que j'étais en forme, que j'avais vaincu toutes les difficultés, parce que ça leur permet de voir pour eux-mêmes que l'on peut sortir des problèmes et gagner.
 

 
Vous disiez donc que ce n'est pas uniquement de votre fait si, depuis des années, vous ne sortez plus de nouveaux disques ?
 
Je ne veux pas non plus passer pour une victime, mais, effectivement, quand on est placé dans des situations où la musique est le dernier souci des uns et des autres, c'est sûr que ça n'encourage pas à écrire et à s'exprimer. Ces problèmes légaux ont été une entrave à l'expression musicale. Ça ne m'a pas coupé l'inspiration, mais ça m'a sûrement enlevé l'envie de sortir des choses nouvelles, parce que je savais que ce serait dans de mauvaises conditions.
 

 
Trois Bercy pleins, puis cinq, puis dix, puis une tournée française avec plusieurs concerts déjà sold out. Avez-vous été surpris ?
 
Je ne suis pas surpris, parce que sur le polnaweb.com, qui est un lien unique avec mes fans, on sentait l'envie du public de me revoir. Je ne suis pas surpris mais très heureux de constater qu'on avait raison de penser que ça se passerait bien.
 

 
L'immense majorité du public de Bercy et de la tournée vous verra pour la première fois.
 
Un mec qui sort aussi peu de disques, fait aussi peu d'apparitions mais qui est encore là au bout de tant d'années, c'est du jamais vu. C'est déconcertant et unique mais je le prends de façon assez légère, je trouve ça normal, quelque part. J'ai toujours donné au public, j'ai toujours été honnête avec lui, j'ai toujours eu envie de le provoquer pour le faire avancer. Je pense qu'il peut se tromper ou se laisser avoir pendant un petit moment sur l'artiste mais, sur une longueur de temps, le public ne se trompe jamais.
 

 
Avez-vous le sentiment d'être plus populaire aujourd'hui qu'en quittant la France ?
 
Je ne me rends pas compte. Je crois que, dans l'inconscient collectif, il n'y a pas que le chanteur mais aussi le personnage. Le public français a peut-être quelque part un petit sentiment de culpabilité face à ce mec obligé de quitter son pays en pleine gloire. Qu'on ferme la page sur cet incident lui plaît.
 

 
Votre père, le compositeur Léo Poll (qui a signé Le Galérien, des chansons pour Édith Piaf...), a-t-il eu une influence sur votre vocation de chanteur ?
 
Il a eu une assez sévère influence pour que je dise merde à la musique classique et que je me mette dans le rock. Mon père voulait que je sois fonctionnaire et n'a jamais été aussi heureux que quand j'ai été employé aux écritures dans une banque. Sinon, il aurait espéré faire de moi un grand pianiste classique. Mais il était surtout obsédé par la sécurité. C'était un réfugié politique, un immigrant passé par pas mal de chocs et je suppose qu'il voulait que je n'aie pas une vie aussi compliquée que la sienne.
 

 
A-t-il vu votre envol ?
 
Il l'a très mal vécu. Mais il était terriblement ambivalent au sujet de mon succès : j'ai trouvé plus tard des coupures de journaux dans un tiroir, mais il n'a jamais voulu montrer son admiration. J'étais parti de chez moi en claquant la porte parce que je perdais complètement ma vie dans un monde qui n'était pas le mien. Mais, avec le temps, je lui trouve toutes les ex­cuses de la terre.
 

 
Il ne vous a pas soutenu, bien qu'il soit artiste lui-même...
 
Il était un peu fonctionnaire de ce métier. Il n'avait jamais pris de risques, alors que je n'ai fait que prendre des risques. Aller à Bercy le 2 mars en n'ayant pas rodé le spectacle avant, c'est prendre des risques !
 

 
Paris-Bercy, du 2 au 14 mars, tournée à partir du 17 à Limoges.


03/03/2007
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