SORTIE CINÉMA DU 20 AVRIL Tomboy, du cinéma beau et puissant
SORTIE CINÉMA DU 20 AVRIL
Tomboy, du cinéma beau et puissant
Par Thomas Baurez (Studio Ciné Live), publié le 19/04/2011 à 18:00
Après Naissance des pieuvres, Céline Sciamma confirme la puissance de son cinéma avec cette exploration des tourments d'un garçon manqué. Un coup de coeur.
En même temps que surgissaient ses pieuvres en 2007 - créatures adolescentes qui mettaient au défi quiconque de les apprivoiser - jaillissait une cinéaste : Céline Sciamma. Même pas 30 ans et déjà des certitudes d'auteur. Dans un territoire aussi balisé que le malaise de nos 15 ans, sa Naissance des pieuvres sortait du grand bain de la piscine et ses lourds symboles afférents (l'eau comme source de vie et de pureté) pour se rapprocher des corps de jeunes filles presque en fleur, aussi étranges qu'obsédants. Un choc et des certitudes critiques aussi, que ce Tomboy, deuxième long de ladite Sciamma, vient confirmer. Les tentacules ont ici laissé la place à un tout autre système de défense, plus innocent, moins violents (quoique...) : Laure/Michael a 10 ans. Il/elle nous est présenté(e) dans toute son ambiguïté sexuée. Tomboy, pour garçon manqué, en VF. Fille ou garçon donc, le spectateur ne sait pas et ne s'en fiche pas, puisque ce mystère tient presque lieu d'intrigue. Sensation étrange, mais jamais de malaise. La délicatesse et l'intelligence de la mise en scène viennent dévoiler, sans forcer, cette intimité cachée, et confirment, du même coup, que cette question de sexe non identifié n'était pas un prétexte scénaristique foireux, ni une fin en soi, mais posait intelligemment la problématique du film : soit l'observation des codes et des rites régissant l'appartenance à un groupe. Laure/Michael vient, en effet, d'arriver avec ses parents dans un nouveau quartier pendant les vacances d'été et doit s'intégrer. Mais comment imposer sa présence quand celle-ci peut poser problème ? Ou comment un mensonge, a priori insignifiant, signifie au contraire beaucoup. On est bien obligé d'être sérieux quand on a 10 ans. Ce sera la leçon de vie de Laure/Michael. Saluons la justesse de l'interprète principal (on taira ici son nom pour ne rien déflorer). La réalisatrice reste à hauteur de son protagoniste et parvient à capter ses incertitudes en l'encadrant d'une mise en scène assurée. Toujours à bonne distance, la caméra a tout de l'ange bienveillant qui observe son sujet d'un oeil inquiet, voire passionné. Car Tomboy est aussi une histoire d'amour naissante. Le film peut d'ailleurs se regarder, par certains aspects, comme un puissant mélodrame, où tout ce qui entoure les jeunes amants (les êtres comme les éléments extérieurs : forêt, quartier...) les oblige à se dévoiler et donc à briser la magie de leur insouciance. Film aussi réaliste que poétique qui, à l'instar de Naissance des pieuvres, joue habilement des symboles pour mieux transcender ses images. C'est peu dire que ce Tomboyest notre coup de coeur du mois... et forcément plus encore ! 77777777777777777
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