Tunisie: Le vendredi de tous les dangers

Tunisie: Le vendredi de tous les dangers

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Créé le 20/09/2012 à 20h46 -- Mis à jour le 21/09/2012 à 10h11
L'ambassade de France sera fermée à Tunis vendredi, jour de prière dans les mosquées.

L'ambassade de France sera fermée à Tunis vendredi, jour de prière dans les mosquées. V.WARTNER / 20 MINUTES

MONDE - Le ministère de l'Intérieur a interdit la tenue de manifestations après la prière de vendredi...


L'ambassade de France à Tunis s'est réveillée ce jeudi entourée de barbelés, plusieurs blindés de l'armée lui faisant face. Signe que les autorités tunisiennes sont sur les dents après le fiasco de vendredi dernier et le saccage de l'ambassade américaine par des individus proches de la mouvance salafiste. Pour éviter de devoir faire face à la même situation, quelques jours seulement après la publication de caricatures de Mahomet dans Charlie Hebdo, le ministère de l'Intérieur a interdit jeudi soir la tenue de manifestations pour le lendemain, jour de la prière la plus importante pour les musulmans.

 Des appels ont été lancés depuis le début de la semaine par les salafistes, incitant à défendre vendredi «les valeurs du sacré». Le ministère de l'Intérieur a aussi évoqué la présence d'appels «à la violence sur Facebook». La police tunisienne, cible d'attaques politiques, a été taxée d'attentisme par une partie de la presse tunisienne et les opposants d'Ennahdha, le parti islamiste au pouvoir, qui conteste ces accusations mais reconnaît des erreurs dans la gestion de la crise. «Vous avez vu, on est là», insistait ce jeudi un policier, à proximité de l'ambassade française. Des renforts de forces de sécurité venus de province devraient par ailleurs venir gonfler les rangs dans la capitale.

Manifester contre la violence

«On le sent bien en ce moment, il y a comme un air de flottement dans le pays. Tout le monde semble attendre de voir ce qui va se passer vendredi», atteste Mohamed-Salah, un interne en médecine de 28 ans. «Mais si les intérêts français sont touchés, cette fois-ci, on va tout droit à la catastrophe», poursuit une mère de famille.

Comme eux, des dizaines de manifestants se sont réunis jeudi à l'heure du déjeuner sur la place des droits de l'homme à Tunis pour «protester contre la violence» et «montrer un autre visage de la Tunisie». «Ce pays n'est pas violent. Nous ne sommes pas le Soudan ni la Syrie. Une poignée de salafistes sont en train de gâcher notre image à l'étranger», s'énerve Ridha, 58 ans, un artiste tunisien. «Le peuple de Tunisie doit être proactif. On a fait tomber une dictature, ce n'est pas pour s'en laisser imposer une autre», estime Rim, une jeune femme de 28 ans qui travaille sur des projets de développement de l'éducation enTunisie.

L'insécurité cache les problèmes de pauvreté

Pour bon nombre de Tunisiens, la journée de vendredi est perçue comme déterminante pour les prochaines semaines. «Si le gouvernement n'arrive pas à tenir la sécurité dans le pays, le message envoyé aux investisseurs va être terrible. Le pays n'a plus d'argent, on a beaucoup de choses à construire. Il ne faut pas que la violence d'une minorité cache des sujets plus importants comme le social, l'économie et les problèmes de pauvreté», poursuit un responsable d'association.

Cet appel pacifique à manifester avait rassemblé environ 1.500 personnes sur les réseaux sociaux. Mais dans la rue, ce jeudi midi, seule une cinquantaine de personnes étaient présentes, pancartes à la main. «Il me semble que les Tunisiens sont lassés et se complaisent dans cette situation. C'est beaucoup plus difficile aujourd'hui de les mobiliser», regrette Moez, 23 ans, étudiant en finances.

 William Molinié (texte) et Vincent Wartner (photo)

A Tunis, les Français n'aiment pas les caricatures

Le lycée français Gustave-Flaubert était protégé par la police, mercredi.

Le lycée français Gustave-Flaubert était protégé par la police, mercredi. V. WARTNER / 20 MINUTES

TUNISIE - Les écoles françaises sont fermées jusqu'à lundi et les représentations sécurisées...

De nos envoyés spéciaux à Tunis (Tunisie)

Dès la mi-journée, mercredi, à Tunis, une dizaine de fourgons encadraient l'ambassade de France, place de l'Indépendance, après que plusieurs messages réagissant aux caricatures de Mahomet de Charlie Hebdo ont été diffusés sur les réseaux sociaux.

Un pays en danger

Le Quai d'Orsay a demandé de fermer les écoles et les ambassades vendredi dans une vingtaine de pays musulmans. Mais en Tunisie, le consulat a décidé d'avancer à mercredi les fermetures d'établissements, qui pourraient rouvrir lundi. «On en a ras le bol d'être sous pression et de vivre dans la terreur», s'agace une employée du lycée français Pierre-Mendès-France de Tunis, qui préférerait «qu'on arrête de se moquer de toutes les religions». «D'ailleurs peut-on appeler ça de l'humour?», s'interroge-t-elle.

Dans cet établissement, les surveillants ont conseillé aux enfants de rentrer chez eux. «Les réactions sont vraiment excessives des deux côtés. Mais j'ai l'impression que Charlie Hebdo ne mesure pas les conséquences de ses actes. Il met en danger tout un pays», s'indigne Malek. «Ces caricatures mettent en danger les Français à l'étranger», insiste-t-il. La communauté française enTunisie représente environ 30.000 personnes. Son camarade, Selim, 19 ans, estime que c'est surtout «l'ensemble des Tunisiens qui est pris en otage». Au lycée Gustave-Flaubert de La Marsa, des policiers patrouillent. «Il n'y aura rien aujourd'hui», souffle l'un d'eux, mêmes si les contrôles répétés des badauds trahissent l'appréhension de revivre les saccages de l'ambassade et d'une école américaines, vendredi dernier, au cours desquelles quatre personnes sont mortes.William Molinié

 William Molinié (texte) et Vincent Wartner (photo)

Caricatures de Mahomet par «Charlie hebdo»: «La liberté d'expression a bon dos»

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Créé le 19/09/2012 à 18h35 -- Mis à jour le 20/09/2012 à 11h09
Charlie Hebdo en kiosque, le 19 septembre 2012.

Charlie Hebdo en kiosque, le 19 septembre 2012. G. VARELA / 20 MINUTES

 - Les internautes de «20 Minutes» ont réagi à la publication de caricatures de Mahomet par l’hebdomadaire satirique...

Avec plus de 1.000 commentaires, site, page Facebook et Twitter réunis, la publication des caricatures de Mahomet dans Charlie hebdo a largement fait réagir les internautes de 20 Minutes. Liberté d’expression à tout prix, provocations de mauvais goût ou joli coup de pub, les sentences sont aussi diverses et tranchées que nombreuses.

«Contre les intégristes, rien ne vaut la dérision»

«Merci», «Longue vie à Charlie hebdo»… Nombre d’éloges sont arrivés par mail à la rédaction. Nelly, 29 ans, est abonnée à Charlie et «fière de l’être». «J'aime ce journal parce chez eux la liberté d'expression a un sens et c'est de plus en plus rare», regrette-t-elle. Même fierté pour Alain. «Cela fait plus de 40 ans queCharlie hebdo ou Hara Kiri défraient la chronique et ce n’est pas dans ce contexte qu’ils doivent s’arrêter. Contre les intégristes, rien ne vaut la dérision», estime cet internaute. Convaincu aussi, Toto trouve ces dessins «drôles et couillus». «On dit qu'on peut rire de tout mais pas avec tout le monde, Charlie hebdo rit de tout, mais pas avec les extrémistes, il se rit des extrémistes, analyse-t-il. Je ne vois pas ces caricatures comme une moquerie envers le prophète de l'islam, mais envers les dingues de religion. Provocation? Sans doute, mais ces gens doivent comprendre que notre presse est libre et qu'ils ne peuvent nous imposer leur mode de pensée.»

Plus modéré, Olivier avoue ne pas avoir été séduit par les caricatures. Il comprend aussi que «certains puissent être choqués ou contrariés». Mais privilégie la liberté d'expression. «Il faut accepter d'être parfois un peu "secoué" par des idées ou des principes qui ne sont pas les siens.»

«Ce n’est pas le moment de mettre de l’huile sur le feu»

Malgré son «adoration» pour Charlie hebdo, Maryline, elle, regrette ces publications. «Ce n’était pas le moment de mettre de l’huile sur le feu» croit-elle savoir, tout comme Frisker. «Après les événements des derniers jours, je ne vois franchement pas l'intérêt pour Charlie hebdo d'en rajouter une couche», confirmeGavroche. Qui nuance toutefois: «Sauf si le but est de rappeler à ceux qui ont plastiqué leurs locaux il y a un an qu'ils sont toujours là et qu'ils continueront à s'exprimer comme ils l'entendent. Mais il ne faut pas négliger le retour de flammes. Est-ce que ça en vaut la peine?»

Plusieurs internautes confient même, à contre-courant de la majorité, avoir été blessés par ces dessins. Alors que Karima trouve ce numéro «insultant», Dalila développe, par mail. «Le directeur de ce journal est irresponsable. Ce qui ne choque pas les Français peut choquer des individus de religion et de culture différente. La tension est palpable dans certains pays et ce type de journal permet de rajouter de l’huile sur le feu», craint cette internaute.

Olivier, qui tient à préciser qu’il n’est ni musulman, ni «en lien avec cette religion», juge ces caricatures simplement «inadmissibles». «La liberté d'expression n'empêche pas de respecter les convictions religieuses des autres, quelles qu’elles soient», estime-t-il. Une conviction complétée par un constat de provocation gratuite. «Ces unes sont justes faites pour dire "on a le droit" ou "oui, mais c'est la liberté d'expression"».

«La liberté d’expression a bon dos»

La liberté d’expression ne serait en effet, selon certains internautes, qu’un prétexte, une liberté «qui a bon dos», estime JulianCharlie hebdo nous proposerait donc qu’une «provocation grossière» pour Patlok.

L’hebdomadaire «se cache derrière la liberté d'expression afin de faire du fric sur des faits tragiques», tranche Bobysponge. «Les dessins ne sont pas choquants, mais la démarche est vraiment ridicule et ceux qui prennent cela comme une ovation à la liberté d'expression ne sont pas plus aidés que ceux qui se font endoctriner par des intégristes.» Le journal aurait ainsi simplement trouvé «une très bonne occasion pour faire parler de lui, dont il aurait tort de se priver», selonDedettam. Un joli «coup de pub» salué par PerdreauUranie et Bernard. Une manière de «faire feu de tout bois» plus contestable, pour Christian et Denkam. Tous deux voient dans ces caricatures un «opportunisme de provocation». «Ces caricatures ne sont même pas drôles, mais pour faire du fric tout est bon.»

 Témoignages édités par Christine Laemmel
«http://www.20minutes.fr/societe/1006613-caricatures-mahomet-charlie-hebdo-la-liberte-expression-bon-dos



21/09/2012
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