L’acharnement du clan présidentiel à reconduire Abdelaziz Bouteflika à la tête de l’Etat a sans doute précipité le bras de fer au sein de l’armée. La «grande muette», dont le rôle a été de tout temps décisif dans le choix du chef de l’Etat, apparaît aujourd’hui peu assurée sur la marche à suivre. A quelques semaines seulement du rendez-vous électoral, le consensus peine à s’établir entre les différents compartiments du régime.

La première semaine du mois en cours a révélé l’ampleur du clivage au sommet, avec une ligne de fracture qui semble indiquer un désaccord entre le chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, et le patron du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le général de corps d’armée Mohamed Médiène, dit Toufik.

Le médiateur international pour la Syrie n’avait d’autre choix, hier, que de mettre fin aux discussions, véritable dialogue de sourds entre l’opposition et le gouvernement syriens, qui étaient dans l’impasse depuis trois semaines à Genève. Plus que cela, Lakhdar Brahimi qui refusait de parler d’échec, car, selon lui, la négociation n’a jamais commencé, n’a fixé aucune date pour une reprise. «Je pense qu’il est préférable que chaque partie rentre et réfléchisse à ses responsabilités, et (dise) si elle veut que ce processus continue ou non», a déclaré M. Brahimi qui s’est dit «tout à fait désolé» et s’est excusé «auprès du peuple syrien dont les espoirs étaient si grands».   

Une telle issue était inévitable. Faut-il s’en étonner ? Certainement pas, quand le texte portant accord de Genève est interprété différemment dans ses clauses essentielles, alors qu’il s’agissait d’en établir les mécanismes. Le régime de Bachar Al Assad a effectivement tenté de réécrire le texte en suggérant une solution entre Syriens, s’éloignant du principe même de la transition, seul objet de négociation, selon la rébellion. Damas en a donné la substance en mettant en premier la lutte contre ce qu’elle qualifie de terroristes, et qui implique tous ceux qui ont pris les armes pour arracher le changement de régime.

C’était en 2012, quand le combat pour la démocratie et les libertés s’est militarisé, mais pas que cela, puisque des dérives extrémistes ont été enregistrées, et que la rébellion a cessé d’être homogène. Ou encore, ce conflit  s’est internationalisé, impliquant, selon Damas, de nombreux Etats. «Ceux qui portent des armes contre leur peuple et leur gouvernement sont des terroristes», a ainsi déclaré le vice-ministre syrien des Affaires étrangères. «Nous n’avons pas de problème pour discuter du terrorisme initié par le  régime (...), mais sans une autorité gouvernementale de transition, on n’aboutira à rien», a répliqué le représentant de l’opposition, soulignant que sa délégation a présenté, jeudi, un document écrit sur les missions d’une telle autorité.

La délégation du gouvernement n’a même pas voulu le prendre. Il a rappelé que le document présenté prévoit le départ «de Syrie de tous les combattants étrangers», un objectif qui vise aussi bien les miliciens libanais du Hezbollah venus aider le régime, que les djihadistes étrangers que désormais l’opposition combat. Fatalement, l’impact sur la négociation est réel, il est même important. Ce qui explique au moins le constat fait hier par M. Brahimi. «Des discussions pour la galerie n’ont pas de sens»,