Le ministre de la Santé et un syndicat du secteur accusés de déstabiliser le mouvement
LĂ©ger recul de lâadhĂ©sion Ă la grĂšve des praticiens et praticiens spĂ©cialistes
17-05-2011
Par Karima Mokrani
Les praticiens et praticiens spĂ©cialistes de la santĂ© publique ont rĂ©pondu en nombre considĂ©rable, hier, Ă lâappel Ă la grĂšve illimitĂ©e, lancĂ© par le SNPSP et le SNPSSP. Ils Ă©taient moins nombreux que lâannĂ©e derniĂšre lorsque les deux corps ont observĂ© une grĂšve illimitĂ©e de quatre mois. En effet, Ă Alger, par exemple, Ă lâEtablissement public de santĂ© de proximitĂ© (EPSP) du boulevard Abderrahmane Mira, Bab El Oued, lâadhĂ©sion au mouvement est massive. Praticiens et praticiens spĂ©cialistes sont sur les lieux, en blouse blanche, mais nâassurent pas les soins. «Nous sommes en grĂšve», affirme un ancien mĂ©decin. En revanche, Ă lâEPSP Bouchenafa, Ă Belouizdad, seuls les spĂ©cialistes un nombre limitĂ© de mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes sont en grĂšve. «Nos mĂ©decins travaillent normalement, il nây a pas de grĂšve. Seuls les cardiologues et les autres spĂ©cialistes nâassurent pas les soins», affirme un agent de rĂ©ception. La division fait son chemin dans le corps des praticiens, semble-t-il. Elle est peu visible pour le moment mais elle risque de progresser dans les jours Ă venir de maniĂšre Ă affaiblir les protestataires. Ce ne sont pas les derniĂšres augmentations de salaire annoncĂ©es en faveur des deux corps, par le biais dâun syndicat jusque-lĂ inconnu sur le terrain de la protestation, qui ont fait lĂ©gĂšrement reculer le taux dâadhĂ©sion. Ni dâailleurs les menaces de ponctions sur salaires, prononcĂ©es sĂ©vĂšrement par le ministre, Djamel Ould AbbĂšs. Des syndicalistes accusent directement le ministre et le «syndicat de service» de verser carrĂ©ment dans la «menace» et «lâintimidation». Selon ces mĂȘmes syndicalistes, un travail de «sape» et de «division» est en marche pour dĂ©mobiliser les praticiens en grĂšve. «Djamel Ould AbbĂšs est convaincu que la grĂšve ne pouvait rĂ©ussir grĂące au travail de proximitĂ© rĂ©alisĂ© par les directeurs dâEPSP et dâEPH. Il a fait carrĂ©ment dans la menace et lâintimidation devant la camĂ©ra de la tĂ©lĂ©vision. Le ministre a appelĂ© au lynchage de la blouse blanche sous le couvert du droit citoyen aux soins», sâindigne le Dr Lyes Merabet, prĂ©sident du SNPSP. Djamel Ould AbbĂšs utilise tous les moyens pour «casser» les mouvements de protestation dans son secteur, accusent des syndicalistes. Il dit une chose et son contraire. Il prĂŽne le dialogue avec le partenaire social et saisit la justice pour dĂ©clarer la grĂšve illĂ©gale. Praticiens, praticiens spĂ©cialistes et mĂ©decins rĂ©sidents font front aux tentatives de «casse» et engagent une lutte commune pour «la dignité».
Karim Djoudi défend le Crédoc
17-05-2011
Photo : S. Zoheir
De notre correspondant Ă Oran Samir Ould Ali
Lors dâun point de presse improvisĂ© en marge de la rĂ©union des directeurs rĂ©gionaux de la comptabilitĂ© de lâOuest, le ministre des Finances, Karim Djoudi, a rĂ©pondu aux interrogations des journalistes qui se sont presque toutes cristallisĂ©es autour du crĂ©dit documentaire (CrĂ©doc), du crĂ©dit Ă la consommation et de la non-disponibilitĂ© des nouveaux billets de 2 000 DA. Pour la premiĂšre question, Karim Djoudi a indiquĂ© que le crĂ©dit documentaire a eu le mĂ©rite de mettre un coup dâarrĂȘt au poids des importations de biens qui, de 2006 Ă 2008, sont passĂ©es de 20 Ă 39 milliards de dinars : «Depuis lâentrĂ©e en vigueur du CrĂ©doc en 2009, les importations se sont stabilisĂ©es (en 2010, elles Ă©taient de lâordre de 40 milliards) et nous observons aujourdâhui une forte croissance», a-t-il signalĂ© en rappelant que le crĂ©dit documentaire est une formule internationale qui obĂ©it Ă des rĂšgles bien dĂ©finies : «Il est vrai quâun certain nombre dâopĂ©rateurs rĂ©clament plus de flexibilitĂ© sur lâimportation dâun certain nombre de produits. Il faut, dans ce cas, ouvrir le dialogue entre ces agents et lâadministration de rĂ©gulation et de contrĂŽle pour trouver des terrains dâentente», a-t-il indiquĂ©, assurant que les portes du dialogue sont ouvertes. Concernant le crĂ©dit Ă la consommation, il a rappelĂ© que la suppression Ă©tait intervenue pour plusieurs raisons, dont le risque de surendettement des mĂ©nages, lâimportation massive des vĂ©hicules, la crĂ©ation dâemplois et de richesses ailleurs quâen AlgĂ©rie. «Câest pour ces raisons que nous avons rĂ©solu de le suspendre et dâinstaller la taxe sur les vĂ©hicules», a-t-il indiquĂ©, expliquant que malgrĂ© toutes les apparences cette taxe prĂ©sente deux avantages prĂ©cieux : dâun cĂŽtĂ©, elle rend lâinvestissement dans le marchĂ© algĂ©rien plus compĂ©titif et, de lâautre, elle a permis la crĂ©ation dâun fonds de stabilisation des prix de transport.Le ministre des Finances nâĂ©carte pas «la rĂ©activation du crĂ©dit Ă la consommation pour peu quâil serve le produit national, y compris automobile». InterrogĂ© sur lâĂ©vasion fiscale (des chiffres non confirmĂ©s lâĂ©valuent Ă 100, voire 200 milliards de dinars), il prĂ©fĂšre parler de non-dĂ©claration fiscale que son dĂ©partement dĂ©couvre lors des opĂ©rations de contrĂŽle.Dans ce cadre, il y a lieu de rappeler quâentre 2009 et le premier trimestre 2010, au cours de 3 000 inspections dans des entreprises, les services de lutte contre lâĂ©vasion fiscale ont rĂ©cupĂ©rĂ© plus de 120 milliards de dinars.
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TESTATIONS DE RUE, PÉNURIES, FLAMBÉE DES PRIX ET SPÉCULATION Le gouvernement Ă bout de souffle Mohamed TOUATI - Mardi 17 Mai 2011 - Page : 3
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La contestation sociale dure depuis plusieurs semaines | Les ministres ont lamentablement Ă©chouĂ© sur lâessentiel, lĂ oĂč les attendaient les AlgĂ©riens: lâamĂ©lioration de leurs conditions sociales et Ă©conomiques.
LâAlgĂ©rie sâest distinguĂ©e depuis de nombreux mois par des mouvements de grĂšve dont le leitmotiv a portĂ© sur des augmentations de salaires. Tous les corps de mĂ©tiers, pratiquement, ont Ă©tĂ© touchĂ©s. Les travailleurs de lâEducation nationale, de la santĂ©, de lâenseignement supĂ©rieur, les mĂ©tallurgistes, les sidĂ©rurgistes, les gardes communaux... tous ont battu le pavĂ©. Signe dâun malaise qui couvait depuis trop longtemps. Pour ceux qui auraient dĂ©jĂ oubliĂ©, voici le constat que faisait le Premier ministre lors de lâouverture du 3e congrĂšs du RND Ă propos des progrĂšs rĂ©alisĂ©s par lâAlgĂ©rie au cours de la derniĂšre dĂ©cennie. Le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Rassemblement national dĂ©mocratique sâĂ©tait interrogĂ©, malgrĂ© des performances jugĂ©es notoires: «Est-ce Ă dire par lĂ que tout va bien? Est-ce Ă dire que lâAlgĂ©rie sâest enfin libĂ©rĂ©e dâune dĂ©pendance Ă©conomique excessive envers lâextĂ©rieur? Est-ce Ă dire quâelle a libĂ©rĂ© ses citoyens de la dĂ©pendance envers lâaide de lâEtat? Est-ce Ă dire que tous nos compatriotes sont heureux dans leur quotidien et rassurĂ©s pour leur avenir?» Quâavait- il conclu? «La rĂ©ponse est assurĂ©ment non!» avait fait remarquer Ahmed Ouyahia au cours de lâallocution quâil avait prononcĂ©e au mois de juin 2008. Cela se passe de commentaires. Des dĂ©clarations prĂ©monitoires qui auguraient dâun front social qui allait se mettre en Ă©bullition et qui continue de tonner comme un ciel en colĂšre annonciateur de gros orages. Le risque dâune violente tempĂȘte nâest pas encore passĂ©. La contestation est toujours aussi vive, menaçant une paix sociale fragilisĂ©e par des mouvements de protestation qui ne font pas relĂąche. Ahmed Ouyahia avait en quelque sorte prĂ©venu. Le constat du prĂ©sident de la RĂ©publique est aussi implacable, sinon plus. «Nous avons Ă©choué», avait renchĂ©ri Abdelaziz Bouteflika au mois de juillet 2008. «Il est temps dâĂ©tablir une autocritique. Nous devons faire une auto-rĂ©vision. Il est temps de rĂ©flĂ©chir avec honnĂȘtetĂ© et sincĂ©ritĂ©. Il ne faut pas fuir la vĂ©ritĂ©. On ne peut pas Ă©chapper Ă la rĂ©alitĂ©. Le chemin que nous avons empruntĂ© ne mĂšne pas au paradis», a solennellement dĂ©clarĂ© le chef de lâEtat dans son discours prononcĂ© Ă lâoccasion de sa rencontre avec les 1541 P/APC que compte lâensemble du territoire national. Trois annĂ©es plus tard, le contexte nâest guĂšre reluisant. Les 160 milliards de dollars de rĂ©serves de change se sont avĂ©rĂ©s impuissants pour sortir lâAlgĂ©rie de sa dĂ©pendance par rapport aux hydrocarbures. La fabuleuse manne financiĂšre engrangĂ©e grĂące Ă une flambĂ©e historique des cours de lâor noir (les prix du pĂ©trole avaient atteint 147 dollars au mois de juillet 2008 et lâAlgĂ©rie avait Ă la fin de la mĂȘme annĂ©e rĂ©coltĂ© quelque 78 milliards de dollars) a tout juste permis dâattĂ©nuer la grogne sociale. Ces bons rĂ©sultats de lâĂ©conomie nationale nâont pas outre mesure amĂ©liorĂ© le quotidien des AlgĂ©riens. Ils nâont pas non plus permis de poser les jalons dâune Ă©conomie productive hors hydrocarbures. A qui la faute? Lâagriculture et le tourisme, qui pourraient constituer le fer de lance dâune Ă©conomie compĂ©titive, nagent en plein marasme. La stratĂ©gie industrielle initiĂ©e et annoncĂ©e avec grand fracas par Abdelhamid Temmar, a connu un enterrement de premiĂšre classe. «Nous avons prĂ©sentĂ© au gouvernement un projet sur la stratĂ©gie industrielle, dont le cadre a Ă©tĂ© approuvĂ©. Nous allons nous rencontrer chaque semaine pour approfondir le dialogue sur le sujet, point par point», avait laissĂ© entendre lâex-ministre de lâIndustrie et de la Promotion des investissements vers la fin de lâannĂ©e 2006 pour ensuite dĂ©clarer au mois de dĂ©cembre 2007 Ă lâoccasion dâune rencontre organisĂ©e Ă lâhĂŽtel Aurassi par lâUnion des entrepreneurs algĂ©riens: «Nous nâavons pas de grande stratĂ©gie industrielle.» Le clou a Ă©tĂ© enfoncĂ© par le Premier ministre. «Pour cette stratĂ©gie industrielle, je vais ĂȘtre brutal, elle a fait beaucoup plus lâobjet de communications que dâactions. Elle nâa jamais Ă©tĂ© adoptĂ©e en Conseil des ministres», avait dĂ©clarĂ© Ahmed Ouyahia le 11 mars 2009 sur les ondes de la ChaĂźne III. Lâancien ministre du Tourisme sâest fixĂ© comme objectif dâatteindre les 2,5 millions de touristes dâici Ă lâhorizon 2015. Une chimĂšre. De maniĂšre rĂ©currente, lâAlgĂ©rie a dĂ» faire face Ă la pĂ©nurie de la pomme de terre, au problĂšme du renouvellement de ses stocks de blĂ©, Ă la crise de la filiĂšre du lait, Ă lâimportation des viandes ovines et bovines et Ă une flambĂ©e des prix des produits de large consommation et des fruits et lĂ©gumes sans prĂ©cĂ©dent. Quant au prix de la sardine, il a atteint un prix prohibitif: 350 dinars le kilogramme. Dans un peu plus de deux mois avec le dĂ©but du mois sacrĂ© du Ramadhan, le phĂ©nomĂšne de la spĂ©culation sâaccentuera. Pour y faire face, le gouvernement fera appel Ă des importations tous azimuts, comme ce fut le cas lâannĂ©e derniĂšre avec la viande de buffle...Le ministre du Commerce sortira un Ă©niĂšme «plan anti-pĂ©nurie» qui se distinguera comme dâhabitude par son inefficacitĂ©. Il y a dĂ©jĂ bien longtemps que les diffĂ©rents gouvernements, qui se sont succĂ©dĂ© depuis lâindĂ©pendance Ă nos jours, se sont illustrĂ©s par un manque dâimagination flagrant. Lâaddition se paie cash: elle sâĂ©lĂšve Ă 40 milliards de dollars dâimportations par an. | |
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