Actualité | dimanche 20 mai 2012
Warda El Djazaïria enterrée hier au carré des martyrs au cimetière El Alia
Des obsèques à la hauteur de l’icône
le 20.05.12 | 10h00
La dépouille de la diva de la chanson algérienne et arabe, Warda El Djazaïria, a été inhumée hier en début d’après-midi au carré des martyrs au cimetière El Alia, en présence d’une foule nombreuse composée des proches de la défunte, d’officiels, d’artistes, d’hommes de culture et plusieurs dizaines de ses fans, dont certains étaient venus d’autres régions du pays se recueillir à sa mémoire.
On pouvait remarquer Saïd Bouteflika, frère du président de la République, Ahmed Ouyahia, Premier ministre, des membres du gouvernement à l’instar de Amar Tou, Noureddine Moussa, Amar Ghoul et de commis d’Etat, dont Mohamed Laksaci, Hamraoui Habib Chawki et le patron de la centrale syndicale, Abdelmadjid Sidi Saïd. Des représentants de pays arabes étaient aussi de la cérémonie, dont le conseiller du roi du Maroc Mohammed VI, Fouad El Himma. Parmi les hommes de culture et de l’art, on notera, entre autres, la présence de Sid Ali Kouiret, Mohamed Lamari, Amine Zaoui, Azzedine Mihoubi et Mustapha Cherif, ancien ambassadeur d’Algérie au Caire.
Recouvert de l’emblème national, le cercueil de cette icône de la musique arabe a été convoyé au milieu d’un cortège funèbre à partir du Palais de la culture jusqu’au cimetière El Alia, avant de recevoir les honneurs de la Protection civile. Un représentant du ministère de la Culture avait prononcé l’oraison funèbre au milieu d’une ambiance de vif émoi. Ce responsable est revenu sur le «fabuleux» destin de la chanteuse qui a mis sa voix au service de sa patrie, avant et après la guerre de Libération. Une oraison entrecoupée de cris : «Tahya El Djazaïr» (vive l’Algérie !) «Mazal Wakfin» (nous sommes toujours debout) et «Allah ou akbar» (Dieu est grand). Moment de profonde affliction, la mise en terre de la dépouille de celle qui avait bercé tant de générations a été accompagnée des youyous stridents de nombreuses femmes. Un fait exceptionnel dans un pays musulman où seuls les hommes sont admis au cimetière, selon le rite musulman. Sur sa tombe, des gerbes de fleurs étaient déposées par des mains anonymes en signe d’un dernier adieu.
Sur place, Ryad, la cinquantaine, fils de la chanteuse, a reçu les condoléances de nombreux citoyens et autres responsables de l’Etat. «L’Algérie vient de perdre l’une de ses étoiles», commente Mohamed, fan de Warda, depuis son jeune âge. Nombreux ont salué «une femme de génie». D’aucuns n’arrivaient à pas retenir leur émotion. Dans la matinée, son cercueil était exposé au palais de la culture Moufdi Zakaria pour recevoir un dernier hommage des Algériens. Les ministres des Affaires étrangères, Mourad Medelci, de la Culture, Khalida Toumi, et de la Communication, Nacer Mehal, des artistes et des hommes de culture étaient venus accueillir le cercueil. Dans son discours, Khalida Toumi, ministre de la Culture, a rappelé que Warda «n’avait jamais hésité à offrir sa voix et même ses revenus à l’Armée de libération nationale».
Décédé jeudi dernier à l’âgé de 72 ans à son domicile au Caire, son corps a été rapatrié à Alger par un avion spécial, affrété par la présidence de la République ; où il a été accueilli vendredi soir à l’aéroport par plusieurs ministres. Le président Abdelaziz Bouteflika avait aussi rendu un hommage à celle qui avait «dédié son art entièrement» à l’Algérie. Le ministre de la Culture égyptien a déclaré que Warda avait «joué un grand rôle et concrétisé la relation entre l’Egypte et l’Algérie». Pour sa part, la presse nationale n’a pas tari d’éloges à l’égard de l’une des plus belles voix d’Algérie et du monde arabe. Jamais dans l’histoire de l’Algérie, un artiste n’a eu droit à tant d’hommages officiels au moment où certains intellectuels libres ou artistes n’ont pas bénéficié du même traitement.
Avant son décès, Warda El Djazaïria avait tourné un vidéoclip à la gloire de l’Algérie intitulé Mazal wakfin à l’occasion du 50e anniversaire de l’indépendance. Avec des millions d’albums vendus à travers le monde pour un répertoire musical comprenant plus de 300 chansons, la célèbre chanteuse orientale, de son vrai nom Warda Ftouki, est entrée assurément dans le panthéon des immortels de la chanson arabe aux côtés des Oum Kalthoum, Abdelhalim Hafez et bien d’autres.
Hocine Lamriben
Législatives à Aïn Témouchent
La défaite de «s’hab echkara»
le 20.05.12 | 10h00
S’il y a un enseignement à retenir du scrutin du 10 mai, c’est la défaite cuisante de ceux qui croyaient obtenir leur élection par l’argent.
A près la stupeur, c’est le sarcasme et la raillerie à tout-va à Aïn Témouchent. Sur le principal boulevard de la ville, après les heures de travail et juste avant d’aller suivre le JT, tous ceux qui font de la politique, élus, militants ou qui s’y intéressent se retrouvent. Tous se connaissent, quel que soit leur parti. Tous ont fréquenté la même l’école, joué aux billes et partagé bien des choses jusqu’à l’âge de raison. On ne «se la raconte pas» et on déballe tout. Le commentaire est des plus libres. On tourne réciproquement en dérision ses candidats aux législatives. En présence d’un journaliste, on prend, cependant, la précaution de préciser qu’on parle en «off the recorder» et que s’il y a citation, elle doit être anonyme.
Ces jours-ci, l’intérêt commence à se détourner de ceux qui ont remporté les élections. Ce sont «s’hab echkara», parrainés par des partis inexistants localement, tous candidats malheureux à la députation. Ils étaient à la tête d’une trentaine de listes sur les 38 qui étaient en lice. Ils font les frais des débats animés en particulier pour les sommes colossales qu’ils ont déboursées. Des petits malins, jouant avec la rivalité des uns et autres, leur en ont extorqué une bonne partie. Ainsi, des supporters du CRT, le club fanion du chef-lieu de wilaya, ont fait débourser 2 millions de dinars à un candidat dont le fief est une autre ville.
La contrepartie en nombre de voix a été nulle pour lui à Témouchent-ville. En fait, d’aucuns estiment que s’il est un enseignement à retenir du scrutin du 10 mai, c’est la défaite cuisante de ceux qui croyaient obtenir leur élection par l’argent. Au bout du compte, il n’y a eu que quatre listes qui ont dépassé la barre fatidique des 5% de voix exprimées et qui se sont ainsi partagé les cinq sièges à pourvoir. Mais au-delà des anecdotes, parfois croustillantes, les faits saillants étaient ailleurs. D’abord avec l’ébranlement qu’a provoqué le verdict de Belkhadem sur la liste des candidatures qui lui avait été soumise.
Son choix s’était porté sur les derniers de la liste, ceux qui n’avaient en théorie absolument aucune chance d’être retenus par lui et qui avaient été portés sur cette liste par les premiers pour s’imposer à lui. Personne n’y a rien compris à ce jour. Le plus étonnant, c’est que le SG venait de sanctionner ceux qui ont tenu localement le parti d’une main de fer en le préservant de l’agitation menée par les néo-redresseurs du FLN. Le minutieux échafaudage qu’ils avaient peaufiné à coups de cooptations aux postes-clés de l’appareil du parti (kasmas et mouhafadha), venait d’être balayé. Idem pour toute la machine électorale qui avait été mise sur pied. Le clientélisme avait à ce point huilé cette machine tout autant que les candidatures à la députation, celles aux futurs conseils municipaux et à l’APW avaient été réparties.
C’est la deuxième fois, rappelle-t-on, que le FLN est «émasculé» au dernier moment.
En 2007, Ould Abbès avait écarté les mêmes que ceux que Belkhadem a éjectés, à la différence que Ould Abbès s’était porté tête de liste sur celle de son choix. Ne comptant plus sur la mouhafadha ni sur sa clientèle, il avait ramené d’Alger une équipe de son ministère et mobilisé les moyens de l’Etat. Cette fois, le FLN rien de tel. Personne ne donnait cher de sa «pâle» liste. Du coup s’hab echkara et les candidats des autres partis jubilaient. Lors de la campagne, le candidat tête de liste FLN s’est retrouvé seul. Pire, des cadres du FLN, et non des moindres, faisaient ouvertement campagne pour des candidats adverses. La situation était si catastrophique que le FLN, le parti le mieux implanté et le plus structuré à travers la wilaya, n’a pu réunir des représentants qu’en 58% des centres et 43% des bureaux de vote, c’est-à-dire bien moins que des partis inexistants localement !
Si de l’extérieur du FLN, on s’étonne que ce parti ait pu obtenir «contre toute logique» deux sièges sur les cinq à pourvoir, de l’intérieur du parti de Belkhadem, on soutient qu’il a subi au contraire un revers : «Nationalement le FLN a remporté l’essentiel de l’APN, alors que dans les trois wilayas au centre desquelles se trouve Témouchent, il a raflé la majorité des sièges, avec à Sidi Bel Abbès leur totalité. C’est à l’aune de ces paramètres qu’il faut juger le score du parti à Témouchent», assène un militant connu pour n’avoir pas d’atomes crochus avec les nouveaux parlementaires ni avec ceux qui ont été éliminés de la candidature par Belkhadem. Et un autre de renchérir : «En fait, si le FLN a limité les dégâts, c’est avec seulement 12,09% des voix exprimées. Il a bénéficié de l’éparpillement des voix sur un total de 88% comme du jeu de la proportionnelle.» L’autre élément des discussions, c’est le score du RND, limité à un siège.
On croyait que le parti de Ouyahia allait profiter des malheurs du FLN : «Mais non, cela ne pouvait être possible, le RND avait contre lui la candidature de plusieurs de ses transfuges dont deux ses ex-parlementaires en particulier. En comptabilisant ses 9,76% de voix exprimées en sa faveur avec seulement les 8,36% cumulées de ses deux ex-parlementaires, il aurait raflé trois sièges.» Quant à l’Alliance de l’Algérie verte, avec un siège remporté grâce à un score de 7,69% des voix, «elle ne doit son salut qu’au choix d’un Benisafien, un libraire connu pour son action caritative de longue date. Beni Saf constitue le deuxième réservoir en suffrages après le chef-lieu de wilaya, un réservoir supérieur à celui de chacune des six daïras sur les huit que compte la wilaya. Son candidat a remporté, à Beni Saf, la moitié du score de l’Alliance de l’Algérie verte à travers la wilaya, soit 4224 voix sur les 9230 glanées».
Enfin, le dernier sujet des discussions, c’est l’élection du cinquième nouveau député, en l’occurrence le maire d’une commune en zone de montagne, Oued Berkèche. Lui, s’est porté candidat parce que son parti, le FLN, celui des éliminés par Belkhadem, l’avait écarté de la candidature. Avec son élection, il a fait la démonstration de l’injustice qu’il a subie : «Lui, c’est le vote tribal qui l’a fait député. Le soir de l’élection, ce sont près de 200 voitures dont les conducteurs et leurs accompagnateurs se sont donné rendez-vous à la sortie de Témouchent pour aller en cortège klaxonnant jusqu’à Oued Berkèche, à 20 km de là environ. ‘’Leur’’ député leur a annoncé qu’il n’a jamais quitté le FLN, puisqu’il était candidat libre. Au sein de l’hémicycle, il a annoncé vouloir être compté au nombre des députés FLN.» Ainsi, il convient d’ores et déjà de créditer le FLN d’un siège de plus que le nombre que lui a reconnu nationalement le Conseil constitutionnel.