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Soutien Nicolas Sarkozy avait fait rebaptiser le 17 janvier 2007 l'aéroport de Fort-de-France/Le Lamentin aéroport Martinique/Aimé Césaire, alors que le poète soutenait Ségolène Royal pendant la campagne présidentielle 2007.
Martin Bureau AFP ¦ Le Premier ministre François Fillon reçu par le poète Aimé Césaire, le 5 janvier 2008 à Fort-de-France
Aimé Césaire, la figure la plus emblématique de la Martinique, est décédé le 17 avril 2008, à l’âge de 94 ans. L'écrivain et homme politique, fondateur du concept de «Négritude» était hospitalisé depuis le 9 avril.
Il naît le 26 juin 1913 à Basse-Pointe (Martinique), où il passe une partie de son enfance. Elève brillant, Césaire poursuit ses études en classe d'hypokhâgne au lycée Louis-le-Grand (Paris, 5e) où, il fait la connaissance de son grand ami Léopold Sédar Senghor. Loin du doudouisme de mise dans le milieu artistique des années 30, avec d’autres étudiants afro-antillais, dont le Sénégalais Léopold Sédar Senghor, il fonde le journal «L'étudiant noir», où est abordé pour la première fois le concept de «Négritude».
«La négritude», notion forgée en réaction à l’oppression culturelle du système colonial français, vise à rejeter le projet français d’assimilation culturelle et à promouvoir l’Afrique et sa culture, dévalorisées par le racisme issu de l'idéologie colonialiste. Il sort de l’Ecole Normale Supérieure en 1938 et revient s’installer en Martinique, où il commence à enseigner. Son «Cahier d’un retour au pays natal», œuvre poétique sous forme de vers libres, est publié en 1947. André Breton lui rendra hommage dans son texte «Martinique charmeuse de serpents».
Parallèlement à la littérature, il s’illustre sur un terrain plus politique. Elu maire de Fort-de-France en 1945, il conservera son mandat jusqu’en 2001. Un engagement politique qui s’étend à toutes les fonctions, puisqu’il sera aussi successivement président du conseil régional de la Martinique, conseiller général de Fort-de-France et député de la Martinique. Il lutte aussi en s’engageant pour l'égalité des droits des ex-colonisés, pour le créole dans les médias publics locaux.
Poète reconnu, il est joué en Avignon en 1989, à la Comédie française en 1991, ses textes les plus célèbres «Cahier d'un retour au pays natal» et «Discours sur le colonialisme» sont inscrits pour la première fois au programme du baccalauréat de français en 1998. Lors de la première commémoration officielle de l’abolition de l’esclavage le 10 mai 2006, des extraits du «Cahier d'un retour au pays natal» sont lus dans les Jardins du Sénat.
Figure tutélaire des Antilles françaises, Aimé Césaire aura influencé nombre d’intellectuels caraïbéens. Comme le déclare son ami l’écrivain haïtien René Deprestre ,«son oeuvre aura été le journal de bord de plusieurs générations d'Antillais et d'Africains».
Martin Bureau AFP ¦ Le Premier ministre François Fillon reçu par le poète Aimé Césaire, le 5 janvier 2008 à Fort-de-France
Le grand poète et homme politique Aimé Césaire, vient de s’en aller à 94 ans. Aurais-je dû utiliser le mot noir? Noir? Il préférait nègre ! Il adorait ce mot qui bravait l’aliénation culturelle et disait avec force à la fois l’identité assumée et la conscience d’être noir. Nègre il se disait, nègre il restera pour la postérité. Nègre certainement, mais un nègre sublime, un nègre universel.
>> Voici un entretien inédit que j'ai eu la chance de faire avec lui en juillet 2006 (l'enregistrement s'est fait sur microcassette ce qui explique les problèmes de qualité audio du document). Il y parle de la négritude, du racisme français et du CRAN:
Cette identité que lui seul savait nommer « nègre », n’était pour lui, nullement contradictoire avec une visée universelle; bien au contraire. En liant avec génie le « nègre » à l’universel, il a réussi à raccrocher les Noirs à cet universel dont il a longtemps été accepté que ces populations puissent être exclues.
Universaliste certes mais sans concession. Il a audacieusement tourné lé dos au climat assimilationniste très répandu à l’époque de son arrivée à Paris en 1931. Loin de céder à l’humeur ambiante il a plutôt cherché à promouvoir l’Afrique et sa culture, qu’il estimait dévalorisées par le colonialisme sous ses formes.
C’est ainsi qu’il décida en septembre 1934, avec d’autres étudiants dont le Guyanais Léon Gontran Damas, le Guadeloupéen Guy Tirolien, les Sénégalais Léopold Sédar Senghor et Birago Diop, de créer le journal "L'Etudiant noir". Noirs mais sans distinction idiote y compris dans la création du mot « négritude » dont on lui attribue la paternité, mais que lui - oh! élégance - préférait partager à travers le concept de création collective. La négritude, il définissait ce mouvement comme de la résistance au racisme… Les intellectuels noirs de tous les mondes, rassemblés, mais sans ressentiment, et surtout avec les intellectuels blancs pour, ensemble, combattre l’oppression. Au rang de ces intellectuels figurait notamment Jean-Paul Sartre qui définissait la négritude comme « la négation de la négation de l'homme noir".
« Comment se porte le racisme en France ?» nous a lancé Aimé Césaire lorsque, quelques mois après la création du CRAN nous sommes allés lui en parler dans le bureau qu’il avait conservé dans l’ancienne mairie de Fort-de-France. De l’alliance entre les noirs d’Afrique, des Antilles et d’ailleurs il nous a dit « C’est difficile, et délicat, mais c’est essentiel.» Du CRAN il a dit « C’est une très bonne chose mais il ne faut pas croire que c’est facile ! En tout cas pour nous antillais c’est important » AIME CESAIRE était nègre, universel, mais aussi révolté. Même très affaibli, il retrouvait de l’énergie pour raconter sans se départir de son célèbre humour, le caractère si « particulier » de ce racisme à la française. Révolté il le redevenait lorsqu’il racontait, que marchant un jour dans une rue parisienne dans les années 30, il a été apostrophé par un quidam qui lui a lancé un : « Hé petit nègre ! » il avait répondu : « Très bien! Bravo, mais le nègre t’emm… ! »
Révolté il l’était également jusqu’au dernier souffle contre le colonialisme.
C’est ma fierté personnelle, juste après lui avoir rendu visite, d’avoir eu le courage de contester les définitions des mots « colonisation » et « coloniser » inchangées dans le dictionnaire le Petit Robert depuis 1967, date de la première édition de ce dictionnaire! C’est justice pourAIME CESAIRE que les Editions le Petit Robert aient décidé un an après cette contestation, de compléter la définition du mot colonisation en y intégrant une de ces citations « colonisation = chosification ». Cette fulgurance est tirée du “ Discours sur le colonialisme ”*, Présence Africaine, 1955 et 2004.
Si le ciel existe, je veux bien parier que le premier qui là haut, osera dire à M. Césaire « Hé petit nègre ! » s’entendra répondre un cinglant : « Le nègre t’emm… ! »
*« J’ai dit – et c’est très différent – que l’Europe colonisatrice est déloyale à légitimer a posteriori l’action colonisatrice par les évidents progrès matériels réalisés dans certains domaines sous le régime colonial, attendu que la mutation brusque est chose toujours possible, en histoire comme ailleurs ; que nul ne sait à quel stade de développement matériel eussent été les même pays sans l’intervention européenne (…) A mon tour de poser une équation : colonisation = chosification. J’entends la tempête. On me parle de progrès, de vies élevées aux dessus d’elles-mêmes. Moi je parle de sociétés vidées d’elles-mêmes, des cultures piétinées, d’institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, d’institutions minées, de magnificences artistiques anéanties, d’extraordinaires possibilités supprimées….»
AIME CESAIRE , “ Discours sur le colonialisme ”, Présence Africaine, 1955 et 2004.
Martin Bureau AFP ¦ Le Premier ministre François Fillon (G) rencontre le poète Aimé Césaire (D), le 5 janvier 2008 à Fort-de-France
Wikipedia a encore tiré plus vite que son ombre. Jeudi, à 20 heures, l’AFP annonçait l’hospitalisation d’Aimé Césaire. L’écrivain et homme politique avait été admis pour «un certain nombre d'explorations» la veille. Une information diffusée par Serge Letchimy, le maire de Fort-de-France.
Aimé Césaire a 94 ans, les Wikipédistes trouvent que ça sent le sapin. Il n’en faut pas plus pour actualiser la notice de l’illustre homme. Vendredi à 12h05, tout va bien, Aimé Césaire est juste «hospitalisé pour des examens médicaux». A 12h57, l’internaute «Mehdi 19» annonce son décès. La notice est ensuite régulièrement actualisée jusqu’à ce qu’à 14h11, un contributeur anonyme rétablisse enfin la vérité: jusqu’à preuve du contraire, Aimé Césaire n’est pas mort. Dans le doute, la mention de son hospitalisation est même supprimée.
Joint par 20minutes.fr au téléphone, le directeur de cabinet du maire de Fort-de-France, agacé par la polémique, a annoncé la prochaine publication du bulletin de santé d’Aimé Césaire «Le pronostic vital n’est pas engagé», a-t-il tenu à préciser.
Martin Bureau AFP ¦ Le Premier ministre François Fillon (G) rencontre le poète Aimé Césaire (D), le 5 janvier 2008 à Fort-de-France
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