Sunday, FEBRUARY 08, 2009
DIMANCHE 08 FEVRIER 2009
الأحد 08 فيفري 2008م
Le dicton météorologique du jour:
"A la Saint-Maur,
Ne t'Ă©tonne pas si le vent souffle fort"
Le proverbe du jour:
"Deux choses ne se peuvent cacher: l'ivresse et l'amour" (proverbe grec, in Antiphane, "Fragments")
La citation du jour:
"Chaque classe sociale a sa pathologie"(Proust) ]}@
Sunday, FEBRUARY 08, 2009
DIMANCHE 08 FEVRIER 2009
الأحد 08 فيفري 2008م
Le dicton météorologique du jour:
"A la Saint-Maur,
Ne t'Ă©tonne pas si le vent souffle fort"
Le proverbe du jour:
"Deux choses ne se peuvent cacher: l'ivresse et l'amour" (proverbe grec, in Antiphane, "Fragments")
La citation du jour:
"Chaque classe sociale a sa pathologie"(Proust)
Chronique du jour : ICI MIEUX QUE LA-BAS
Futurs abstentionnistes
Par Arezki Metref
arezkimetref@free.fr
Lâennui, dans ce plat pays, câest que mĂȘme si lâon est continuellement bombardĂ© par la propagande unique, et ça y va, on nâarrive pas Ă penser la mĂȘme chose. Tenez, par exemple, jâai fait un sondage auprĂšs de trois copains. Je voulais savoir ce quâils pensaient de la future Ă©lection prĂ©sidentielle et de tout le cinĂ©ma fait autour de ce film burlesque quâon repasse depuis le muet et qui montre un candidat pour lequel on a fabriquĂ© dâores et dĂ©jĂ une victoire Ă©crasante et qui entretient le suspense sur sa candidature.
Le profil de chacun des sondĂ©s ? Ils sont Ă peu prĂšs de la mĂȘme condition sociale â moyen, moyen ! â et de la mĂȘme gĂ©nĂ©ration, celle des quinquagĂ©naires plutĂŽt avachis plus tĂŽt que nĂ©cessaire. Ils sont du mĂȘme niveau dâinstruction. La marmite Ă bouillir est de la mĂȘme contenance, quâils remplissent de plus en plus mal avec leurs salaires stationnaires de la Fonction publique. Ils chaussent presque la mĂȘme pointure, mangent demi-sel Ă la cantine de leur boulot le midi et sâhabillent chinois. Ils parlent pareillement en catimini leur langue maternelle, ne ratent jamais ni la priĂšre du vendredi ni le thĂ© Ă la menthe du jeudi soir, conduisent la Picanto en respectant la limitation de vitesse aux endroits piĂ©gĂ©s par le radar, passent leurs vacances dâĂ©tĂ© Ă lâun des campings, le plus proche de la plage, dâAokas. Ils supportent la mĂȘme Ă©quipe de football dont, pour ne pas aggraver le rĂ©gionalisme, ils refusent de dĂ©voiler lâidentitĂ©. Ils rĂȘvent de voir leur aĂźnĂ© se tirer, mais pas en harrag, pour avoir une adresse â avec le mĂȘme nom, tu comprends ! â Ă donner lorsque, Ă la retraite, ils demanderont un visa de tourisme. Si nĂ©cessaire, ils nâopposeront pas de dĂ©menti Ă la proclamation de leur souhait de parachever leur dĂ©votion par un hadj sur le quota de lâinstitution qui les salarie. Ils lisent les mĂȘmes journaux mais, lĂ aussi, ils refusent de dire quoi, rĂ©torquant mĂȘme, courroucĂ©s, que câest une question de flic et que, Ă ce quâils sachent, ce nâest pas un interrogatoire lĂ . De mĂȘme, ils rechignent Ă dĂ©signer les chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision Ă©trangĂšres dont ils Ă©coutent les informations, ni sur quelles autres ils suivent les films de fiction ni enfin quelle est la meilleure retransmission de match de foot. Ils considĂšrent tous les trois quâils nâont pas Ă rĂ©pondre Ă la question de savoir sâils regardent le journal dâAl Jazeera et les dĂ©bats de TF1 ou lâinverse. Ils avouent par contre volontiers quâils se branchent quotidiennement sur lâUnique, Ă laquelle ils accordent une supĂ©rioritĂ© professionnelle sur toutes les autres chaĂźnes. Elle est imbattable sur lâheure prĂ©cise dâel adhan et on peut la regarder en famille sans absolument aucun risque. Ils cherchent tous les trois Ă construire une maison avec cour Ă Ouled Haddadj pour se libĂ©rer de ces cages Ă lapins dans lesquelles leurs enfants grandissent en comptant sur les doigts dâune main les carreaux du sol. Comme ils nâen ont pas les moyens et quâils ne sont pas du genre Ă en acquĂ©rir indĂ»ment, ils se contentent de fustiger ceux qui Ă©lĂšvent de guingois de soi-disant palais sur les terres agricoles sans permis de construire ni goĂ»t. Tous des dĂ©tourneurs doublĂ©s de ploucs, je te dis ! Ils dĂ©clarent sur lâhonneur tous les trois aimer lâAlgĂ©rie autant que leurs enfants, câest-Ă -dire comme la prunelle de leurs yeux, mĂȘme si, lâune comme les autres, sont transfigurĂ©s au point dâen devenir mĂ©connaissables. Les enfants Ă©coutent en boucle Reda Taliani quâils ne savent mĂȘme pas qui câest celui-lĂ et lâAlgĂ©rie nâarrĂȘte pas de couler. Ils font mĂȘme, ce qui est exceptionnel selon toutes les enquĂȘtes, partir la dĂ©gringolade de la mĂȘme pĂ©riode, celle de Boumediene. Ils souhaitent, bien entendu, que Dieu nous regarde Ă nouveau pour que la paix revienne dans nos cĆurs et dans le pays. Ils sont aussi Ă©galement convaincus, au fond dâeux, que ce nâest pas une question de vĆux pieux et que ce «qui se passe» nâa rien Ă voir avec la religion, pas plus quâavec la politique. Câest un simple partage de butin arrachĂ© Ă on ne sait qui, ni Ă lâissue de quelle guerre. Autant dire, un truc mafieux. De cela, ils sont fortement et pareillement convaincus mais, au besoin, ils sauront habiller cette incrĂ©dulitĂ© de propos politiques et pourront sâimproviser thĂ©ologiens du vendredi pour puiser des arguments dans le religieux. Cette prĂ©caution est sacrĂ©e car, on ne sait jamais, hĂ© ! Ils disent, en chĆur, que si du temps de Boumediene les flics Ă©coutaient aux portes, maintenant, ce sont les portes elles-mĂȘmes qui ont des oreilles. Mais comment ces gens qui se ressemblent comme des gouttes dâeau, soumis aux mĂȘmes sournoises menaces sâils dĂ©viaient dâun brin dâherbe, nourris aux mĂȘmes discours exclusivistes, aux yeux desquels on agite les mĂȘmes peurs, ont-ils fini par diverger ? Ce nâest pas comprĂ©hensible. Normalement, ils auraient dĂ» penser en mĂȘme temps que le bilan de Bouteflika nĂ©cessitait quâon rĂ©vise la Constitution pour quâil se cheville au trĂŽne ad vitam et quiconque a un point de vue autre doit ĂȘtre combattu comme un mĂ©crĂ©ant et un agent de lâĂ©tranger. Non, ils pensent diffĂ©remment, ce qui en bouche un coin au sondeur. Le premier rĂ©sume sa pensĂ©e ainsi : «Un troisiĂšme mandat pour Bouteflika et mĂȘme un quatriĂšme et mĂȘme un cinquiĂšme : cheuh, on le mĂ©rite !» Le sondĂ© ne prĂ©cise pas sâil a lâintention dâaller voter et quoi. Il ne tient pas non plus Ă laisser savoir sâil a votĂ© Bouteflika aux deux derniĂšres Ă©lections prĂ©sidentielles, ce qui lui rappelle, en Ă©grenant les dates, que ça fait tout de mĂȘme dix ans que dure cette tragicomĂ©die. Un dĂ©tail survenu lors de la conversation, cependant, laisse Ă croire que le sondĂ© est bridĂ©. Il y a lieu de se demander sâil parle librement. Il souligne quâil tient Ă atteindre la retraite sans accroc aprĂšs quoi peut-ĂȘtre il pourrait exprimer ce quâil pense rĂ©ellement. Pourquoi peut-ĂȘtre ? Parce quâ«ils» peuvent te priver mĂȘme de «ta» retraite, tiens ! Le deuxiĂšme, lui, soutient quâil nâest ni pour ni contre le troisiĂšme mandat mais quâil trouve aberrant que dâanciens soutiens de Bouteflika lĂšvent les bras au ciel de surprise indignĂ©e. Il savait, lui, comme beaucoup, quâil ne fallait pas en attendre moins de quelquâun qui nâa jamais cachĂ© sa conception messianique du pouvoir. Il nâest pas dĂ©favorable Ă la tenue de lâĂ©lection prĂ©sidentielle telle quâelle se dessine, avec dâun cĂŽtĂ© le prĂ©sident sortant et de lâautre, quelques figurants comme Touati et peut-ĂȘtre Louisa Hanoune. Il est pour cette formule juste pour dĂ©montrer par lâabstention que si le ridicule ne tue pas, il peut laisser des taches. Le troisiĂšme enfin, ne comprend pas quâon se focalise autant sur un non-Ă©vĂ©nement au dĂ©triment de ce qui lui paraĂźt porter lâespoir, le mouvement social qui se dĂ©veloppe Ă mesure que la vie politique se dĂ©grade. Ce qui lâintĂ©resse, dit-il, ce nâest pas de savoir si Bouteflika va ĂȘtre Ă©lu ou non, ni contre qui, ni comment, tout cela, on le sait dĂ©jĂ . Ce qui est important, câest de voir que la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne tourne la tĂȘte de lâautre cĂŽtĂ© et sâexprime, Ă dĂ©faut de cadres organisĂ©s, dans les syndicats libres, par les Ă©meutes et par lâĂ©lan suicidaire des harraga. Tout cela est, en soi, un vote contre le bilan. Mais pour le dĂ©pouiller, ce vote, il faut ĂȘtre plus sensible aux pulsations de la sociĂ©tĂ© quâau pouvoir comme fin en soi.
A. M.
p://www.lesoirdalgerie.com/articles/2009/02/08/article.php?sid=79234&cid=8