DRAME en BIRMANIE

 

 Une rue de Rangoun aprĂšs le passage du cyclone Nargis, le 4 mai 2008

Bilan des débgats en Birmanie aprÚs le passage du cyclone Nargis ce week-end. Durée: 1mn14

L'opposante birmane Aung San Suu Kyi le 30 janvier 2008 Ă  Rangoun

Distribution d'eau potable aux habitants de Rangoun, le 5 mai 2008 

 
 

Cyclone en Birmanie: plus de 22.000 morts et 41.000 disparus

Des bateaux dévastés aprÚs le passage du cyclone Nargis, le 4 mai 2008 dans le port de Rangoun

Khin Maung Win AFP/Archives Š Des bateaux dévastés aprÚs le passage du cyclone Nargis, le 4 mai 2008 dans le port de Rangoun

Les forces de sécurité birmanes ont tué 36 détenus d'une prison proche de Rangoun à la suite d'une mutinerie déclenchée au passage de Nargis. C'est ce qu'a annoncé lundi l'Association d'assistance aux prisonniers politiques de Birmanie (AAPPB).

Hla Hla Haty AFP Š Une rue de Rangoun aprÚs le passage du cyclone Nargis, le 4 mai 2008

 
Le bilan ne cesse de s'alourdir: le cyclone Nargis en Birmanie a fait plus de 22.000 morts et 41.000 disparus, selon le dernier bilan annoncé par la télévision officielle birmane.

La ville de Bogalay est de loin la plus touchĂ©e avec 10.000 morts dans cette seule localitĂ© du sud-ouest du pays oĂč 95% des habitations ont Ă©tĂ© dĂ©truites.
Le cyclone a dĂ©vastĂ© la principale rĂ©gion rizicole de Birmanie oĂč vivent 24 millions de personnes, soit prĂšs de la moitiĂ© de la population totale du pays.

L'association World Vision, une des rares ONG Ă  ĂȘtre autorisĂ© Ă  opĂ©rer en Birmanie, est trĂšs pessimiste aprĂšs avoir pu survoler en hĂ©licoptĂšre le pays dĂ©vastĂ©.
«Les consĂ©quences de la catastrophe pourraient ĂȘtre pires que celles du tsunami car elles sont aggravĂ©es par le manque de moyens disponibles et les difficultĂ©s de transport», a dĂ©clarĂ© Ă  l'AFP un conseiller de l'ONG.

L'ONU déplore le défaut d'alerte des autorités birmanes

Devant l'ampleur de la catastrophe les autorités birmanes, trÚs fermées à l'aide extérieure, «ont manifesté leur disposition à recevoir de l'aide internationale [...] mais les modalités restent à déterminer», a indiqué lundi l'ONU.
La mobilisation internationale se met actuellement en place.

L'agence de l'ONU pour la prévention des catastrophes a déploré mardi l'absence d'alerte précoce qui aurait permis d'épargner de nombreuses vies humaines lorsque le cyclone Nargis a frappé la Birmanie. Une critique qu'avait formulé lundi Laura Bush, la femme du président des Etats-Unis.

Pas de victime française

Une source sûre a précisé à 20minutes.fr qu'aucune victime française n'était à déplorer. 234 expatriés français sont «immatriculés» auprÚs de l'ambassade de France de Rangoun et de nombreux touristes visitent le pays chaque année. Mais la plupart des sites touristiques se situent dans le nord du pays, épargné par le cyclone.

Selon le porte-parole de la Fédération internationale de la Croix Rouge, contacté par 20minutes.fr, la priorité des secours est de trouver un logement aux villageois de la cÎte dont les habitations ont été «ravagées complÚtement». Autre «priorité»: la distribution d'eau potable et de moustiquaires alors que les risques de propagation du paludisme grandissent. La Croix-Rouge, l'une des principales ONG en Birmanie, a débloqué dimanche soir 122.000 euros d'aide humanitaire.

Difficile d'obtenir des informations

Mais les informations tombent au compte goutte car la plupart des lignes téléphoniques ont été coupées par la catastrophe. L'ONG «Médecins du monde» a ainsi expliqué à 20minutes.fr n'avoir aucune nouvelle de ses équipes sur place. «Il nous est pour l'instant impossible d'évaluer les besoins médicaux», explique la structure humanitaire.
«Nous savons qu'il y a plusieurs centaines de milliers de personnes qui ont besoin d'un abri et d'eau potable, mais nous ne savons pas exactement combien», a confirmé à Reuters
Richard Horsey, qui coordonne à Bangkok les réponses de l'ONU aux situations d'urgence.

A Rangoun, 70% des arbres sont tombĂ©s, selon la presse officielle, tandis que les unitĂ©s de cardiologie et de cancĂ©rologie de l'hĂŽpital gĂ©nĂ©ral ont Ă©tĂ© dĂ©truites. Un homme de 60 ans, dans un abri de fortune, raconte qu'il se trouvait dans le centre de Rangoun quand le cyclone est arrivĂ©. «De nombreux toits volaient au dessus de ma tĂȘte et j'ai dĂ» me cacher derriĂšre un bĂątiment. C'Ă©tait Ă©pouvantable. J'ai marchĂ© pendant quatre heures pour rejoindre ma maison qui a Ă©tĂ© Ă  moitiĂ© dĂ©truite.»

Le référendum maintenu

La junte militaire en Birmanie a décidé de maintenir pour samedi un référendum. Le scrutin est cependant reporté dans 47 localités affectées par le cyclone, a indiqué mardi la télévision d'état.
   
     
 Bilan des dĂ©bgats en Birmanie aprĂšs le passage du cyclone Nargis ce week-end. DurĂ©e: 1mn14

AFPTV/DVB/MRTV Š Bilan des débgats en Birmanie aprÚs le passage du cyclone Nargis ce week-end. Durée: 1mn14

 
François Raillon est chercheur au CNRS, spĂ©cialiste de l’Asie du Sud-est. InterrogĂ© par 20minutes.fr, il dĂ©taille les implications politiques du cyclone qui a dĂ©vastĂ© la Birmanie.

Face Ă  l’ampleur des Ă©vĂ©nements, la junte birmane autorise l’aide internationale Ă  rentrer sur son territoire. Est-ce une premiĂšre?
Pas tout Ă  fait. Les ONG sont prĂ©sentes sur le territoire birman depuis plusieurs annĂ©es mais elles ont beaucoup de difficultĂ©s Ă  opĂ©rer car le gouvernement, mĂ©fiant, est extrĂȘmement tatillon. Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est qu’il semble que la junte ait accordĂ© des visas d’urgence Ă  des membres d’ONG. Face Ă  l’ampleur de la catastrophe, les autoritĂ©s birmanes se sont rĂ©solu Ă  rĂ©pondre «oui» du bout du lĂšvres aux propositions d’aide de la communautĂ© internationale. C’est une premiĂšre car ce n’est pas du tout dans leur culture.

La situation politique empĂȘche-t-elle les autoritĂ©s birmanes d’ĂȘtre efficaces pour venir en aide Ă  la population?
Depuis les Ă©vĂ©nements de septembre 2007 (des manifestations de moines bouddhistes avaient Ă©tĂ© sĂ©vĂšrement rĂ©primĂ©es par l’armĂ©e), il y a une forte tension entre le gouvernement et la population qui reproche Ă  la junte d’avoir tirĂ© sur les bonzes. Cette fragilisation du pouvoir rend difficile pour le gouvernement d’organiser les secours.

Pourquoi la junte s’obstine-t-elle Ă  organiser le rĂ©fĂ©rendum sur la Constitution samedi, alors que Ban Ki-Moon, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l'ONU, demande son report?
Ce rĂ©fĂ©rendum est trĂšs important pour la Birmanie. Il constitue une premiĂšre Ă©tape de ce que l’on appelle la «feuille de route», un processus de dĂ©mocratisation Ă  pas d’escargot du rĂ©gime autoritaire. Cette Constitution marque quelques timides avancĂ©es comme l’organisation d’élections lĂ©gislatives dans deux ans. Le rĂ©gime politique rĂ©pond ainsi aux sanctions infligĂ©es par les Etats-Unis et l’Union europĂ©enne qui demandent plus de dĂ©mocratie. Cela Ă©tant, il sera difficile d’organiser ce rĂ©fĂ©rendum et il n’est pas impossible qu’ils finissent par le repousser (la junte a dĂ©jĂ  ajournĂ© le scrutin dans 47 localitĂ©s touchĂ©s par le cyclone, ndlr). Mon sentiment est que pour le moment, les autoritĂ©s nagent.

Est-ce que cette catastrophe naturelle pourrait amener d’une maniĂšre ou d’une autre plus de dĂ©mocratie en Birmanie?
Difficile de se prononcer Ă  l’heure qu’il est. Mais ce n’est pas impossible, on a dĂ©jĂ  vu cela ailleurs. Par exemple, dans la province nord d’Aceh, en 2005, Ă  l’issue du dĂ©sastre du tsunami, le gouvernement indonĂ©sien et des sĂ©paratistes ont signĂ© un accord de paix qui a mis fin Ă  30 ans de guerre.


Propos recueillis par Vincent Glad

   
     
     



06/05/2008
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