Lâenvenimation scorpionique reprĂ©sente lâun des plus importants problĂšmes de santĂ© publique en AlgĂ©rie et plus particuliĂšrement au niveau des rĂ©gions des Hauts-Plateaux et du Sud.
Câest lĂ une pathologie spĂ©cifique contrĂŽlable par lâhygiĂšne du milieu. Chaque annĂ©e, plusieurs milliers de personnes sont piquĂ©es par les scorpions et une centaine, en moyenne, en dĂ©cĂšdent. La premiĂšre victime par envenimation scorpionique dans la wilaya de GhardaĂŻa vient dâĂȘtre, malheureusement, enregistrĂ©e dans la daĂŻra dâEl MenĂ©a. Il sâagit dâune fillette de 5 ans, rĂ©sidante au quartier de Zouitel, qui a Ă©tĂ© mordue la nuit par un scorpion alors quâelle dormait profondĂ©ment. RĂ©veillĂ©s par ses pleurs et remarquant que leur fillette se tordait de douleur accompagnĂ©s de vomissements, les parents lâont Ă©vacuĂ©e Ă lâhĂŽpital du colonel ChĂąabani, oĂč elle rendit lâĂąme. Le venin ayant eu tout le temps de se propager dans son frĂȘle corps qui nâa pu lâen supporter, elle succombera ainsi effroyablement. Sa mort a jetĂ© lâĂ©moi parmi ses parents et la population locale qui, encore une fois rĂ©clame des autoritĂ©s locales lâĂ©clairage public, absent totalement dans ces quartiers pauvres et surtout la reprise des campagnes de ramassage des scorpions tel que cela se faisait avant. En effet, les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes et Ă lâapproche de chaque Ă©tĂ©, le comitĂ© de wilaya de lutte contre les zoonoses et la direction de la santĂ© de GhardaĂŻa lançaient une campagne de lutte contre lâenvenimation scorpionique. Elle dĂ©butait gĂ©nĂ©ralement par un sĂ©minaire pour lâamĂ©lioration de la prise en charge thĂ©rapeutique des cas de piquĂ©s de scorpions et diminuer le taux de lĂ©talitĂ© ainsi que le recyclage des mĂ©decins urgentistes et paramĂ©dicaux dans le domaine de la prise en charge. La rĂ©partition du sĂ©rum antiscorpionique fourni en quantitĂ© suffisante par lâInstitut Pasteur dâAlger Ă©tait aussitĂŽt ventilĂ©e sur lâensemble des structures sanitaires de la wilaya. En parallĂšle, une campagne de ramassage des scorpions, lâunitĂ© Ă©tait payĂ©e Ă 40 DA. Ă cet effet, une enveloppe consĂ©quente Ă©tait dĂ©gagĂ©e par la wilaya et mise Ă la disposition de toutes les APC. Aussi, et afin que lâopĂ©ration atteigne le but escomptĂ©, une campagne de sensibilisation Ă©tait lancĂ©e tant sur les ondes de la radio locale que par des journĂ©es dâinformation dans les Ă©coles et collĂšges de la wilaya. Lâimplication des services des APC est fondamentale, notamment dans le maintien de lâhygiĂšne environnementale tout comme le ramassage systĂ©matique des ordures mĂ©nagĂšres et des gravats, ainsi que lâentretien des trottoirs, la crĂ©ation dâespaces verts, lâentretien de lâĂ©clairage public par le remplacement immĂ©diat des ampoules grillĂ©es sachant que le scorpion est un animal photophobe. Câest entre autres, quelques-unes des mesures adĂ©quates et efficaces Ă appliquer contre la prolifĂ©ration des scorpions, car il faut souligner que le scorpion est un animal millĂ©naire, qui a survĂ©cu Ă tous les alĂ©as. Câest un insecte nocturne qui peut se passer dâalimentation trĂšs longtemps, voire plus dâune annĂ©e. Morphologiquement blindĂ©, il rĂ©siste mĂȘme aux irradiations puisque, paraĂźt-il, il a Ă©tĂ© retrouvĂ© vivant aprĂšs les essais nuclĂ©aires français Ă Reggane en 1956. Selon des statistiques, les piqĂ»res de scorpion reprĂ©sentent la premiĂšre cause de dĂ©cĂšs par lâenvenimation en AlgĂ©rie, ce qui induit donc selon les spĂ©cialistes, des facteurs de gravitĂ© Ă©pidĂ©miologiques, cliniques et thĂ©rapeutiques. Par consĂ©quent, et afin dâinflĂ©chir la tendance Ă la baisse du taux de morbiditĂ© et de mortalitĂ© causĂ©s par les piqĂ»res de scorpions, une stratĂ©gie de lutte contre les piqĂ»res et envenimation a Ă©tĂ© alors Ă©laborĂ©e Ă lâĂ©poque par le ministĂšre de la SantĂ©, de la Population et de la RĂ©forme hospitaliĂšre. Lâun des segments de cette stratĂ©gie reposait sur la formation du personnel mĂ©dical et paramĂ©dical, sur lâinformation, lâĂ©ducation et la communication par implication intersectorielle. Un comitĂ© national de lutte antiscorpionique (CNLAS) constituĂ© des secteurs de la santĂ©, des collectivitĂ©s locales et de la Protection civile a mĂȘme Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1987 Ă cet effet. Câest dire la dangerositĂ© de cet animal, qui chaque annĂ©e provoque des dĂ©gĂąts, quelques fois irrĂ©versibles, voire des dĂ©cĂšs dus, le plus souvent, comme câest le cas de cette pauvre fillette, aux transferts tardifs des piquĂ©s vers les centres sanitaires. Sur la douzaine dâespĂšces rĂ©pertoriĂ©es, deux sont particuliĂšrement dangereuses et sont, malheureusement, les plus rĂ©pandues dans nos rĂ©gions, il sâagit de lâAndroctonus Australis et du Buthus Occitanus. Les prĂ©dateurs du scorpion sont gĂ©nĂ©ralement les oiseaux, surtout les poules, les chats et les hĂ©rissons dont les populations du Sud et des Hauts-Plateaux sont encouragĂ©es Ă en disposer chez elles. La prolifĂ©ration des scorpions qui augmente le risque dâenvenimation est dĂ» Ă plusieurs facteurs, dont le manque dâhygiĂšne, la promiscuitĂ© et lâobscuritĂ©. Il y a, au nombre de ces facteurs, la misĂšre des populations qui dans leur immense majoritĂ©, vivent dans des maisons trĂšs anciennes, sans aucun entretien. Selon un rapport du ministĂšre de la SantĂ© datant de lâannĂ©e 2000, sur la situation Ă©pidĂ©miologique en AlgĂ©rie, il est prĂ©cisĂ© que dans la 10e classification internationale des maladies (CIM 10), lâenvenimation scorpionique est classĂ©e dans le groupe âEffet toxiques de substance dâorigine essentiellement mĂ©dicinaleâ. Lâenvenimation scorpionique demeure un problĂšme majeur auquel il faut trouver des solutions urgentes en accorder tous les moyens adĂ©quats pour le combattre et Ă©viter ainsi des pertes humaines.
Edition du Dimanche 25 Juillet 2010
Nouveautés en matiÚre de traitement contre le VIH
Le professeur Kamel sanhadji résume les travaux de la 18e conférence internationale sur le sida
Par : Pr Kamel Sanhadji (*)
La 18e ConfĂ©rence internationale sur le sida sâest ouverte dimanche 18 juillet en Autriche. Vienne sera la capitale mondiale de la lutte contre le sida durant toute la semaine. Plus de 20 000 scientifiques (chercheurs, experts, mĂ©decins , associations de malades et journalistes) participent Ă cette manifestation organisĂ©e, Ă travers le monde, toutes les deux annĂ©es. Pour rappel, 33 millions de personnes vivent avec le virus de lâimmunodĂ©ficience humaine (VIH) sur la planĂšte et 25 millions sont mortes depuis le dĂ©but de lâĂ©pidĂ©mie en 1981. Plus de 58 millions de personnes ont donc Ă©tĂ© contaminĂ©es par le virus du sida. La maladie tue encore plus de 2 millions de personnes par an. Sur le plan scientifique, la confĂ©rence de Vienne a tout de suite donnĂ© le ton : selon une Ă©tude, il faut commencer trĂšs tĂŽt les traitements antisida pour protĂ©ger le systĂšme immunitaire. Le schĂ©ma thĂ©rapeutique classique a ainsi Ă©tĂ© bouleversĂ©. En effet, il Ă©tait dâusage de ne dĂ©marrer le traitement antirĂ©troviral avec la multithĂ©rapie (dite trithĂ©rapie) que lorsque la propagation du virus devient importante (charge virale Ă©levĂ©e) dans lâorganisme du patient et que le systĂšme de dĂ©fenses immunitaires est affaibli (nombre de globules blancs dits T4 bas). La derniĂšre Ă©tude stipule de dĂ©buter le traitement de prĂ©fĂ©rence dĂšs la contamination par le VIH. Ce traitement prĂ©coce permettrait dâĂ©radiquer le virus avant quâil ne se multiplie dâune façon importante dans lâorganisme. Les nouvelles contaminations (transmission du virus Ă un tiers par voie sexuelle ou par injection) seront ainsi arrĂȘtĂ©es. Cette nouvelle stratĂ©gie thĂ©rapeutique implique, par voie de consĂ©quence, un dĂ©pistage massif et gĂ©nĂ©ralisĂ©. Selon les experts et avec une telle dĂ©marche, lâĂ©pidĂ©mie pourrait probablement disparaĂźtre dans quelques dĂ©cennies (environ en 2050) si toutes les personnes infectĂ©es par le VIH Ă©taient dĂ©pistĂ©es et recevaient des mĂ©dicaments antiviraux. Les Ătats doivent sâimpliquer davantage dans cette stratĂ©gie qui reste insuffisante. Aujourdâhui dans le monde, 12 millions de personnes sont dĂ©pistĂ©es et seulement 5 millions sont traitĂ©es sur un total de 33 millions de personnes vivant avec le VIH. Une avancĂ©e importante et intĂ©ressante en matiĂšre de prĂ©vention de la contamination chez la femme considĂ©rĂ©e comme personne vulnĂ©rable dans de nombreuses sociĂ©tĂ©s. Le flĂ©au est dĂ©vastateur, principalement en Afrique sub-saharienne. Il sâagit de la mise au point dâun microbicide (gel Ă usage intravaginal) contenant des antirĂ©troviraux ayant fait lâobjet dâune Ă©tude sur une large population de femmes en Afrique du Sud durant les trois derniĂšres annĂ©es. Lâutilisation du gel, par la femme, 12 heures avant le rapport sexuel Ă risque et la poursuite du gel 12 heures aprĂšs, rĂ©duirait de 50% le risque de contamination chez la femme. Cette dĂ©marche concernant la mise en place et la diffusion Ă grande Ă©chelle du gel microbicide (son prix de revient est intĂ©ressant pour les pays pauvres) est soutenue par le multimilliardaire Bill Gates et son Ă©pouse MĂ©linda. Un autre fait scientifique important a Ă©tĂ© confirmĂ© dans la diminution du risque de contamination par le VIH. Il sâagit de la circoncision puisquâelle rĂ©duit de plus de 50% les risques de contamination par le virus du sida chez lâhomme. Ă ce propos, lâex-prĂ©sident amĂ©ricain Bill Clinton sâest fait, Ă cette confĂ©rence de Vienne, un dĂ©fenseur acharnĂ© des bĂ©nĂ©fices de la circoncision. Il prĂ©conisera de concentrer les efforts de prĂ©vention âlĂ oĂč ils ont plus dâimpactâ en citant lâexemple de la circoncision. La ConfĂ©rence de Vienne a choisi le thĂšme âDroits ici et maintenantâ cette annĂ©e qui manifeste un symbole et un accent mis sur les droits et la protection des personnes les plus vulnĂ©rables (les sĂ©ropositifs, les femmes, les enfants, les toxicomanes, les prisonniers⊠), victimes de la stigmatisation et qui nâont pas facilement accĂšs aux soins et Ă la prĂ©vention dans plusieurs pays. Ce sera la confĂ©rence des âsans voixâ. Sur le plan politique, la crise Ă©conomique mondiale sâinvite dans le dĂ©bat, remettant ainsi en cause le financement de la lutte contre le sida. Serait-elle Ă lâorigine de la pĂ©nurie dâantirĂ©troviraux Ă laquelle on assiste ? En effet, lâinquiĂ©tude des organisateurs est trĂšs saillante en cette pĂ©riode de crise Ă©conomique en fustigeant le fait que âlâan dernier, les dirigeants de beaucoup de pays nâont eu aucun problĂšme pour trouver au moment propice de lâargent pour renflouer les banquiers avides de Wall Street et que le porte-monnaie est subitement vide dĂšs lors quâil sâagit de santĂ© publiqueâ. Ban Ki-moon, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de lâorganisation des Nations unies (ONU) a montrĂ© du doigt les gouvernements qui nâont pas hĂ©sitĂ© Ă rĂ©duire leur contribution Ă la lutte contre le sida. Il regrette la restriction de lâaide accordĂ©e par certains gouvernements. Les Ătats annonceront leurs contributions en septembre prochain Ă New York. Quelque 25 milliards de dollars seraient nĂ©cessaires cette annĂ©e pour combattre le sida dans les pays les plus pauvres, selon une estimation de lâOnusida. Pour le moment, il manque 11,3 milliards, selon une analyse de lâexcellent journal scientifique Science. Lâex-prĂ©sident amĂ©ricain Bill Clinton est intervenu dans le dĂ©bat sur les ressources pour le sida en plaidant pour une utilisation plus efficace des fonds mobilisĂ©s en ces temps de crise Ă©conomique. Le richissime et philanthrope Bill Gates (fondateur de Microsoft) prend le relais de Bill Clinton en insistant, lui aussi, sur le message dâune optimisation des fonds existants. Soulignons que Bill Gates contribue financiĂšrement Ă un niveau Ă©gal Ă celui de lâOrganisation mondiale de la santĂ© (OMS) au profit de la lutte contre le sida. Par ailleurs, et en marge de la confĂ©rence, certaines stars se sont engagĂ©es Ă aider la lutte contre le sida, en particulier Elizabeth Taylor comme pionniĂšre depuis la mort de son ami, lâacteur Rock Hudson en prĂ©sidant lâAmerican Foundation for AIDS research. Lâactrice Sharon Stone en accompagnant la chanteuse Kylie Minogue et reversant ensuite les fonds pour la lutte contre le sida. Et aussi Carla Bruni-Sarkozy, sensibilisĂ©e grĂące Ă la mĂ©moire de son frĂšre aĂźnĂ© Virginio, victime du sida en 2006.
K. S.
(*) Directeur de recherches au CHU de Lyon, adjoint chargé des hÎpitaux auprÚs du maire de Lyon.