Egypte 2011: Manifestation place Tahrir au Caire, le 25 novembre 2011
Egypte: Ganzouri nommé Premier ministre, rejeté par les manifestants
Des dizaines de milliers d'Egyptiens se sont rassemblés vendredi au Caire pour réclamer à nouveau le départ du pouvoir militaire, qui a nommé comme Premier ministre Kamal el-Ganzouri, 78 ans, un ancien chef de gouvernement sous Hosni Moubarak rejeté par les manifestants. Cette manifestation dite "de la dernière chance" s'est déroulée sans violences, après plusieurs jours marqués par de graves affrontements au Caire et dans d'autres villes, qui ont fait officiellement 41 morts et plus de 3.000 blessés. Vendredi 25 novembre 2011, 20h32 Confronté à la plus grave crise depuis la chute de M. Moubarak en février, il a déclaré qu'il ne présenterait pas son équipe gouvernementale avant le début du scrutin législatif, qui doit s'ouvrir lundi, dans un climat tendu. Cet économiste formé aux Etats-Unis succède à Essam Charaf, nommé en mars et dont le gouvernement a jeté l'éponge face à l'ampleur de la crise.
M. Ganzouri, ancien fidèle de Hosni Moubarak, été immédiatement rejeté par les manifestants de la place Tahrir. Des centaines d'entre eux ont bloqué dès vendredi soir l'entrée du siège du gouvernement pour empêcher M. Ganzouri d'y pénétrer, et s'apprêtaient à camper sur place. "Dégage!", "Ganzouri est un feloul (vestige)", "Révolution!" scandaient les manifestants. Plusieurs mouvements de jeunes ont présenté une liste de cinq noms pour le remplacer, parmi lesquels celui de Mohamed ElBaradei, ancien chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et prix Nobel de la Paix, qui s'est joint vendredi à la foule sur la place Tahrir. Le grand imam de l'institution théologique renommée d'Al-Azhar, cheikh Ahmed el-Tayyeb, a fait savoir par un représentant aux manifestants qu'il soutenait et priait pour leur "victoire". Une prise de position contre le pouvoir rare de la part d'une institution dont le grand imam est nommé par le chef de l'Etat. Les manifestants scandaient "Maréchal, réveille-toi, c'est ton dernier jour!", faisant allusion au maréchal Hussein Tantaoui, chef de l'armée et à ce titre dirigeant de fait du pays.
"On a beaucoup patienté, maintenant il y a une crise de confiance", a expliqué à l'AFP Hazem Diab, 26 ans, employé dans l'informatique. Parallèlement à la mobilisation de la place Tahrir, quelques dizaines de milliers de partisans de l'armée se sont rassemblés à quelques kilomètres plus loin dans le quartier d'Abbassiya, en scandant "L'armée, la police et le peuple, d'une seule main". "A bas Tahrir, vive le maréchal", ont scandé ces manifestants qui prônaient un retour à "la stabilité" dans un pays dont l'économie est de plus en plus affectée par les incertitudes politiques. "Je dis aux jeunes de Tahrir: +merci, maintenant ça suffit+", a affirmé Khaled Bchir, 37 ans. A Washington, la Maison Blanche a plaidé pour un "transfert complet de pouvoir à un gouvernement civil" et un retour "dès que possible" à une gouvernance civile en Egypte. L'Union européenne a condamné la violence "excessive" des forces de l'ordre égyptiennes au cours des derniers jours, et a appelé l'armée à un transfert "rapide" du pouvoir à une autorité civile. M. Ganzouri a quant à lui rappelé la promesse du maréchal Tantaoui de ne pas s'éterniser au pouvoir. L'armée avait écarté jeudi une nouvelle fois l'hypothèse d'un départ immédiat du pouvoir, des hauts gradés assurant que cela reviendrait à "trahir le peuple". Le maréchal Tantaoui a annoncé mardi une présidentielle avant fin juin, qui permettra à l'armée de remettre le pouvoir exécutif à un chef d'Etat élu, mais les manifestants estiment cette annonce insuffisante. Au lendemain d'un accord conclu jeudi entre manifestants et forces de l'ordre pour faire cesser les violences, le calme a globalement prévalu à nouveau vendredi sur la place Tahrir. La police a muré la rue Mohamed Mahmoud, menant au ministère de l'Intérieur et théâtre des heurts les plus violents. Le ministre français de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand, a condamné vendredi "avec indignation les agressions dont ont été victimes les journalistes couvrant les manifestations au Caire" et "en particulier" une journaliste française de la chaîne France 3, frappée et agressé sexuellement jeudi par des hommes en civil dans le secteur de Tahrir. |