Actualités : Les artisans de la victoire
L’Algérie s’est qualifiée de fort belle manière pour la phase finale de la Coupe du monde de football. Cette qualification sanctionne merveilleusement bien une formidablement synergie dans l’effort. De tous les acteurs et à différents niveaux, notamment lors de la grande explication, le 18 novembre dernier, entre Fennecs et pharaons en la très hospitalière terre soudanaise. La victoire, belle et fort méritée, est, en cela, une bonne leçon de solidarité active. Les joueurs Vivre l’enfer sur les bords du Nil (Le Caire) et retrouver, quatre jours plus tard, la ressource, la force et l’énergie nécessaires pour faire descendre les pharaons du haut de leur pyramide est forcément quelque chose d’exceptionnel. Vraiment. Les poulains à Rabah Saâdane, traumatisés après l’agression sauvage dont ils ont été victimes au Caire, ont, sur le rectangle vert du stade d’El Merrikh et pendant 90 minutes, fait la démonstration de ce que «à cœur vaillant, rien n’est impossible». Ce mercredi 18 novembre, les capés nationaux étaient non seulement braves mais aussi très à l’aise techniquement, administrant à leurs adversaires du jour une belle leçon de football. Ils avaient tellement maîtrisé leur sujet (la partie) qu’il n’a manqué à Amr Zaki qu’à mordre à pleines dents le gazon comme l’a fait un certain Rubesh lors de l’inoubliable Algérie-Allemagne en 1982. Les Egyptiens, qui doivent savoir, une fois pour toutes, que le football est un sport qui se pratique balle au pied et non la langue déliée, auraient pu encaisser plus d’un but, n’étaient, disons-le, les arrêts-réflexes de leur portier. Les joueurs algériens, nullement complexés, avaient su occuper les espaces, faire circuler le ballon et faire courir les Egyptiens. Face à un Fawzi Chaouchi impérial, l’attaque égyptienne n’avait rien pu faire. Sa défense s’était également éreintée à faire face aux assauts répétés des attaquants algériens, servis par les deux métronomes que furent Ziani et Meghni. Que dire alors de ce diable de Antar Yahia qui fusilla d’un tir foudroyant le malheureux El-Hadari ! Que dire aussi de Halliche qui puisa dans sa blessure subie au Caire l’énergie nécessaire pour contrer les assauts égyptiens, attestant de ce que sans le concours de moyens extra-sportifs, les Egyptiens étaient largement prenables ! Cependant, outre ces individualités, le onze algérien avait livré, à Khartoum, une partie de haute facture, avec, au bout, une inestimable victoire. Les joueurs avaient à cœur de vaincre, de poursuivre l’aventure en Afrique du Sud et, si besoin était, de montrer qu’ils n’ont pas usurpé leur place de leader du groupe depuis l’entame des joutes. Ils l’ont fait au grand dam des Egyptiens qui écument l’amertume de n’avoir pas su jouer au football. Ils mesurent, comme dirait l’autre, leur faiblesse à l’aune de la supériorité des nôtres. Rabah Saâdane On retiendra, peut-être longtemps, cette image contrastée d’un Rabah Saâdane assis, flegmatique et serein et d’un Hassen Shehata debout, inquiet, criant et gesticulant depuis la ligne de touche. C’était au Cairo Stadium lors du match Algérie-Egypte. Shehata, comme au Collisé de la Rome antique, haranguait ses gladiateurs qui livraient bataille à des adversaires physiquement affaiblis, moralement abattus, traumatisés. Saâdane, lui, observait, silencieux, le comportement de ses capés grisés par la peur. En ces moments, difficile de faire le vide et de se concentrer entièrement sur l’ouvrage. L’enfer vécu la veille présageait du pire. La peur est humaine. Mais il n’avait pas douté de la qualification. Il savait qu’il drivait un groupe capable de se surpasser dans les pires situations de difficulté. Il n’avait, de ce fait, point besoin de suggérer quelques compléments tactiques. La défaite par 2 à 0 ne l’a pas affecté outre mesure. Preuve qu’il s’est de suite remis au travail. Il avait à tâche de rehausser le moral de sa troupe, de la faire récupérer de son incommensurable effort pour livrer la bataille de Khartoum. Il n’avait pour cela que quatre jours. Pari difficile, à l’évidence. En vieux routier, Saâdane, l’expérimenté, a réussi. A Khartoum, il a coaché à l’aise, à travers un schéma de jeu qui, sans être le meilleur qui soit, devait annihiler l’effort de l’adversaire et assurer la victoire. Il a vu juste. De plus, loin du chaudron du Caire et de son environnement mortellement hostile, Saâdane s’est totalement concentré sur son sujet. Il a dirigé son équipe d’une main de maître et, contrairement à son habitude, il n’était pas resté scotché à son siège, sur le banc de touche. Il a communiqué opportunément ses orientations… de vive voix. Et la victoire fut… Mohamed Raouraoua Il retrouve la présidence de la Fédération algérienne de football (FAF) à un moment vital pour le football national : les tours qualificatifs pour Johannesburg. Il lui fallait, outre le redressement de la discipline à travers les championnats des différentes catégories, construire une équipe nationale digne de représenter le pays au plan international. On lui reconnaît la paternité de l’amendement Fifa qui a permis à Meghni, Yebda, Abdoun et autres de vêtir les couleurs nationales. Raouraoua a énormément contribué au plus qu’honorable parcours de l’équipe nationale. Rarement cette dernière a bénéficié d’aussi bonnes conditions de préparation. Il faut dire qu’en la matière, Raouraoua est irréprochable. En Egypte, lors du caillassage du bus transportant l’EN, il était d’avis à rentrer au pays, en même temps que saisir l’instance internationale organisatrice de la compétition, la Fifa, en l’occurrence. On l’a vu à la fin du match cracher toute sa colère à l’endroit de Zaher. Il n’a pas mâché ses mots (ni le chewing-gum) pour dire tout l’irrespect dont est digne son homologue égyptien, après le lynchage de l’Algérien par les Egyptiens. Au Soudan, il prépara comme il se devait le séjour de l’équipe nationale, lui garantissant les bonnes conditions de récupération et de préparation. Il a accompli sa mission comme il le fallait, en patriote consciencieux, jaloux des couleurs nationales. Air Algérie Faire atterrir près de 20 000 supporters algériens en un laps de temps extrêmement réduit dans un pays lointain et vers lequel il n’y a pas de dessertes aériennes directes relève de la gageure. Air Algérie l’a fait. Sans la mobilisation de cette compagnie, Khartoum n’aurait certainement pas été aux couleurs algériennes avant, pendant et après le match du 18 novembre. Air Algérie a assuré une cinquantaine de dessertes Alger-Khartoum, permettant ainsi à des milliers de supporters des Verts d’être près du onze national lors de la grande explication. Les avions d’Air Algérie ont volé de jour comme de nuit. L’effort est louable, plus même. Sollicité au pied levé, la compagnie était à la hauteur. Les supporters Les joueurs algériens n’étaient nullement dépaysés au pays de Omar El Bachir. Certains ont avoué s’être sentis à Blida, tant les gradins étaient bondés de supporters algériens. Cette présence massive de supporters les a énormément aidés au plan moral, tant ils avaient besoin d’évacuer le traumatisme quasi solitaire vécu au caire où il y avait tout au plus 2 000 supporters algériens. Aussi, les supporters algériens, qui aiment l’équipe nationale d’un amour disons fusionnel, ont grandement contribué à la victoire des Verts. Leur mobilisation à la faveur de cette belle entre l’Egypte et l’Algérie jouée à Khartoum a été formidable. Ils ont fait des milliers de kilomètres, pour certains sans une livre soudanaise en poche, pour donner de la voix et encourager les capés de Rabah Saâdane. Pour cela, ils ont aussi artisans de la victoire. Le président Bouteflika Le Soudan est loin. S’y rendre, en temps normal, suppose escale au Caire ou ailleurs, donc un véritable chemin de croix. Mais lorsque la volonté politique est là , nulle destination n’est impossible. Grâce à la décision prise par le président Bouteflika d’envoyer massivement des supporters à Khartoum, le Soudan est devenue la porte d’à -côté. Outré, pour ne pas dire plus, par l’attitude des Egyptiens, médias, supporters et autorités, qui ont démultiplié les agressions sauvages contre l’équipe nationale et tout ce qui est Algérien, le président Bouteflika a pris peut-être l’une des plus patriotiques décisions qu’il eut à prendre depuis 1999 : établir un pont aérien avec le soudan, solliciter et obtenir la suppression des visas d’entrée pour les supporters algériens, faire supporter à la trésorerie publique le coût de la billetterie (avion et stade) pour 9 000 supporters et instruire les daïras de délivrer rapidement des passeports (sauf-conduits) pour les supporters qui ne disposaient pas du document de voyage. Le geste du président Bouteflika est inédit. Nul autre avant lui ne l’a fait pour un match de football. Un geste qui le rend aussi artisan de la victoire des Verts. S. A. I.
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