Massacre du MARDI 17 octobre 1961

Les évÚnements du 17 octobre 1961 désignent la répression ayant frappé une manifestation organisée par le Front de libération nationale algérien (FLN) en faveur de l'indépendance de l'Algérie à Paris. Des dizaines à des centaines d'Algériens, selon les sources, sont morts lors de la confrontation avec les forces de l'ordre alors dirigées par le préfet de police Maurice Papon. Certains d'entre eux ont été jetés dans la Seine. Les manifestants internés dans des centres de détention pendant quatre jours y auraient subi des violences.

Sommaire

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Contexte historique [modifier]

Le FLN et la communauté algérienne [modifier]

Créé par des anciens de l'Organisation spéciale, bras armé du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), un mouvement nationaliste dirigé par Messali Hadj[1], le FLN qui se distingue par une stratégie insurrectionnelle, se trouve en conflit frontal avec le Mouvement national algérien (MNA), nouveau parti des Messalistes. DÚs le mois d'avril, le FLN décide de passer à l'assassinat des responsables messalistes en France. Jean-Paul Brunet considÚre que dÚs 1957, le FLN a pris le dessus sur son rival[2].

Cette guerre civile entre AlgĂ©riens a sans doute coĂ»tĂ© la vie Ă  quelque 4 000 victimes. Un des enjeux de cette lutte fratricide que se sont livrĂ©es les deux organisations nationalistes sur le territoire français, Ă©tait l'encaissement de l'impĂŽt rĂ©volutionnaire prĂ©levĂ© sur les travailleurs algĂ©riens en mĂ©tropole. À la fin de l'annĂ©e 1960, le MNA n'aurait plus disposĂ© que de 6 000 cotisants contre 120 000 pour le FLN[3].

La communautĂ© algĂ©rienne en France connait une forte expansion: 211 000 personnes en 1954 et 350 000 en 1962. Une grande partie de cette communautĂ©, 150 000 personnes, dont 8 000 femmes et 29 000 enfants en 1961, est concentrĂ©e dans le dĂ©partement de la Seine. Les travailleurs algĂ©riens, souvent manƓuvres, parfois ouvriers qualifiĂ©s, vivent souvent dans des bidonvilles comme Ă  Nanterre, Aubervilliers, Argenteuil ou Bezons ou dans les quartiers les plus misĂ©reux de Paris comme la Goutte d'Or ou MĂ©nilmontant[4].

L'imposition prĂ©levĂ©e sur la communautĂ© algĂ©rienne en France reprĂ©sente prĂšs de 80% des ressources du FLN, le restant provenant des aides de la Ligue arabe. Pour le travailleur algĂ©rien, il reprĂ©sente entre 5% et 9% de son salaire[5]. L'emprise du FLN sur la communautĂ© algĂ©rienne en France s'Ă©tend Ă  certains domaines de la vie quotidienne. Par exemple, il prescrit le respect de la loi coranique et interdit la consommation d'alcool. Le recours aux tribunaux français est Ă©galement prohibĂ©. Les contrevenants peuvent ĂȘtre purement et simplement Ă©liminĂ©s[6].

L'organisation militaire du FLN en France [modifier]

Jusqu'en 1958, le FLN est organisĂ© selon une structure pyramidale classique qui permet aux cadres un bon contact avec la base, mais qui rend l'appareil permĂ©able Ă  l'investigation policiĂšre. De fait, en septembre 1958, aprĂšs des attentats spectaculaires, la police parvient Ă  dĂ©manteler l'appareil du mouvement. Le FLN se rĂ©organise alors en s'adaptant aux rĂšgles de sĂ©curitĂ© basĂ©e sur de petits groupes de trois ou de six. Le FLN peut ainsi compter sur environ 450 hommes en rĂ©gion parisienne pour former ses groupes de choc en marge desquels il faut rajouter 8 katibas (compagnies) de 31 hommes chacune, constituant l' « Organisation spĂ©ciale Â», organisation de combat formĂ©e de tireurs confirmĂ©s et de techniciens des explosifs, chargĂ©e des missions difficiles et de l'Ă©limination des « traĂźtres Â»[7].

Les supplétifs algériens de la police française: la FPA [modifier]

C'est à cet appareil militaire du FLN que la préfecture de police de Paris dirigée par Maurice Papon à partir de 1958, doit faire face. Le 30 novembre 1959, le premier ministre Michel Debré décide de constituer une Force de police auxiliaire (FPA) composée de musulmans algériens volontaires qui sera commandée par le capitaine Raymond Montaner[7].

L'objectif des FPA est de disloquer l'organisation du FLN en arrĂȘtant les responsables et en empĂȘchant le prĂ©lĂšvement des cotisations. Ils parviennent Ă  rallier les AlgĂ©riens menacĂ©s de mort par le FLN et Ă  recruter des indicateurs parmi les commerçants[8]. La mĂ©thode utilisĂ©e par les hommes de Montagner est invariable: occupation d'hĂŽtels habitĂ©s par les travailleurs algĂ©riens, infiltration et recueil de renseignements, violences policiĂšres, tortures[8]. Dans les archives policiĂšres, Linda Amiri a retrouvĂ© une plainte dĂ©posĂ©e par un breton au teint mat, torturĂ© pour qu'il avoue. Autrement dit, conclut Linda Amiri, toute personne au teint mat est soupçonnĂ©e de cotiser au FLN et susceptible de donner des informations[8].

La premiÚre compagnie de FPA implantée dans un quartier du XIIIe arrondissement parvient à disloquer l'organisation frontiste dans cet arrondissement. Ce succÚs amÚne le préfet de police à implanter une deuxiÚme compagnie dans le quartier de la Goutte d'Or. DÚs lors, les patrouilles en file indienne de ces hommes en calots bleus, mitraillette à la ceinture, fait partie du paysage des XIIIe et XVIIIe arrondissements. Dans la lutte que mÚne la préfecture de police de Paris contre le FLN, les FPA sont en premiÚre ligne[7].

L'efficacitĂ© de la FPA, conclut Jean-Paul Brunet, a eu pour contrepartie l'emploi de moyens illĂ©gaux et moralement condamnables comme les arrestations et dĂ©tentions arbitraires et la pratique systĂ©matique de la torture[9]. Ces mĂ©thodes sont dĂ©noncĂ©es dans la presse de gauche, et ce sont peut-ĂȘtre ces protestations, mais aussi l'ouverture des premiers pourparlers d'Évian entre le gouvernement français et le GPRA Ă  la fin du mois de juin 1961, qui aboutisent au regroupement des compagnies de FPA au fort de Noisy Ă  Romainville. Toujours est-il que les nĂ©gociateurs français d'Évian prĂ©sentent le regroupement des FPA comme un geste de bonne volontĂ© de la France, en Ă©change duquel le FLN annoncera l'arrĂȘt des attentats contre les policiers français[9]. Partisan de l'AlgĂ©rie française et conseiller municipal de Paris, Bernard Lafay dĂ©nonce ce geste, alors que François Rouve, secrĂ©taire du syndicat gĂ©nĂ©ral de la police prĂ©sente au conseil gĂ©nĂ©ral de son syndicat le regroupement comme la rĂ©ponse positive du gouvernement Ă  l'une de leur revendication. Il prĂ©cise mĂȘme «  nous avons obtenu que les cars conduisant les supplĂ©tifs soient conduits par des chauffeurs auxiliaires supplĂ©tifs, et non par des chauffeurs de la police municipale Â»[9].

AprĂšs une visite au fort de Noisy, Jean Viatte PrĂ©sident de la Commission de vĂ©rification des mesures de sĂ©curitĂ© publique, qui reprĂ©sente Ă©galement Maurice Patin, prĂ©sident de la Commission de sauvegarde des LibertĂ©s et droits individuels, termine son rapport en ces termes: « Le regroupement des forces supplĂ©tives et leur casernement Ă  Noisy-le-Sec semblent avoir mis fin Ă  certains excĂ©s antĂ©rieurs... Â»[9].

L'efficacitĂ© des FPA conduit rapidement le FLN Ă  dĂ©clencher avec eux une guerre sans merci. Le poste de la Goutte d'Or est attaquĂ© par deux groupes armĂ©s le jour mĂȘme de son installation, le 20 novembre 1960, puis le 4 dĂ©cembre. D'une façon gĂ©nĂ©rale, les postes et les cafĂ©s tenus par la FPA dans le XVIIIe arrondissement sont la cible de commandos qui y subissent de lourdes pertes, mais en provoquent Ă©galement chez l'adversaire[9].

En avril 1961, les mĂ©thodes de la police et plus particuliĂšrement des FPA en marge de la lĂ©galitĂ© sont Ă  l'origine d'un diffĂ©rent opposant le garde des sceaux Edmond Michelet Ă  Maurice Papon. Michel DebrĂ© donne raison Ă  Papon et confirme que les AlgĂ©riens peuvent ĂȘtre internĂ©s 15 jours avant que le procureur n'en soit informĂ©. Il obtient Ă©galement de la part de de Gaulle le renvoi de Michelet le 24 aoĂ»t[10].

Les attentats FLN contre la police française [modifier]

Les supplĂ©tifs de la FPA ne sont pas les seuls Ă  ĂȘtre visĂ©s par le FLN, il y a Ă©galement des victimes parmi les policiers français depuis le dĂ©but de la guerre. Dans certains cas, il s'agit de ripostes lorsqu'un suspect refuse d'ĂȘtre interpellĂ© et tire sur ses poursuivants, mais dans d'autres cas, il s'agit d'attentats Ă  l'initiative du FLN[11]. Ces attentats connaissent une recrudescence en 1961 et plus particuliĂšrement Ă  partir du mois de septembre.

Policiers tués ou blessés par attentat[12]
Pays
1958 1959 1960 Jan-oct 1961
Tués
12
4
9
29
Blessés
22
10
29
76

Parmi les 47 tués, on compte 15 FPA, 3 contractuels de la SATFMA (Services d'assistance technique aux FMA), 23 gardiens de la paix de la police municipale et 4 officiers de police judiciaire. Au total, depuis 1957, les services de la police ont dénombré 2124 attentats imputés au FLN. Dans la plupart des cas, il s'agit visant des Algériens qui contreviennent d'une façon ou d'une autre à la loi du FLN. 1252 morts et 1291 blessés ont été enrégistrés[11].

Les premiĂšres nĂ©gociations d'Évian entre le gouvernement français et le GPRA dĂ©butent le 20 mai 1961. 15 jours aprĂšs, on observe une suspension des attentats et cette trĂȘve se poursuit pendant les pourparlers de Lugrin qui se tiennent Ă  la fin du mois de juillet et pendant le mois d'aoĂ»t[11]. Le 29 aoĂ»t, les attentats reprennent subitement. On en compte 5 Ă  Paris et dans la proche banlieue. La vague d'attentats de septembre et octobre 1961 sera d'une ampleur que l'on avait jamais connue. Sept policiers en seront victimes en septembre. Il semble bien que les commandos du FLN aient reçu pour consigne d'attaquer indistinctement tout policier ou militaire en uniforme[11].

La cause de la reprise des attentats n'est pas claire : il est peu probable qu'elle ait Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e par le GPRA vis-Ă -vis duquel de Gaulle a fait une concession le 5 septembre en reconnaissant le caractĂšre algĂ©rien du Sahara. Jean-Paul Brunet a Ă©crit qu'il a bien pu exister un dĂ©calage entre le GPRA et la FĂ©dĂ©ration de France et cite le nom de Mohammedi Saddek, le coordinateur de la FĂ©dĂ©ration de France qui aurait personnellement fait preuve d'indiscipline en lançant la vague d'attentats[11]. Le 27 aoĂ»t, puis le 16 septembre, le comitĂ© fĂ©dĂ©ral de la FĂ©dĂ©ration de France, qui rĂ©side alors en Allemagne, Ă©crit Ă  Mohamed Zouaoui, chef de l'ensemble des opĂ©rations Ă  Paris, pour lui demander sur quels principes ou quelles directives il se basait pour abattre de simples gardiens de la paix, puis le 7 octobre ordre est donnĂ© de cesser toute attaque contre les policiers[13]. Pour les historiens britanniques House et MacMaster, la vague d'assassinats a Ă©tĂ© lancĂ©e Ă  un niveau infĂ©rieur Ă  celui de Zouaoui, par les chefs des deux wilayas de la rĂ©gion parisienne qui contrĂŽlent les activitĂ©s des Groupes armĂ©s (GA)[13].

De la colÚre des policiers à la généralisation des sévices et aux assassinats [modifier]

Les attentats dont ils sont victimes engendre chez les policiers une vĂ©ritable psychose. Il apparait que le corps des policiers, excĂ©dĂ© par les attentats, est prĂȘt Ă  se faire justice lui-mĂȘme[14]. Dans le bimensuel du syndicat de la police parisienne, syndicat le plus reprĂ©sentatif des policiers, l'un de ses dirigeants, Paul Rousseau, se croit obligĂ© d'Ă©crire pour raisonner ses troupes : « Camarades du SGP, ne vous laissez pas aller Ă  des actes qui ne sont pas en accord avec votre maniĂšre de penser; groupez-vous autour de vos cadres syndicaux, agissez comme des hommes reprĂ©sentant la justice, et non comme des justiciers Â». L'ensemble de la communautĂ© policiĂšre se sent concernĂ©e et les obsĂšques de chacune des victimes se dĂ©roulent en grande pompe dans la cour de la prĂ©fecture de police, en prĂ©sence des plus hautes autoritĂ©s[15]. Le 3 octobre, aux obsĂšques du brigadier DemoĂ«n, Maurice Papon dĂ©clare dans son allocution : « Pour un coup donnĂ©, nous en porterons dix Â»[16]. Dans la journĂ©e, il aura l'occasion de passer dans plusieurs commissariats oĂč il autorise verbalement ses hommes Ă  tirer dĂ©s qu'ils se sentent menacĂ©s. Il donne sa parole qu'ils seront couverts[17]. Par ailleurs, il ne cesse de donner des consignes tendant au respect de la lĂ©galitĂ©. « GradĂ©s et gardiens, Ă©crit-il, se doivent de toujours garder leur sang-froid et d'Ă©viter les brimades qui engendrent le ressentiment et la haine et qui font finalement de jeu de l'adversaire[18]. Dans un rapport au ministre de l'intĂ©rieur datĂ© du 9 octobre, il attire l'attention sur le « malaise profond dĂ©celĂ© au sein des services... qu'il n'est pas possible de laisser s'aggraver ... sans courir les plus grands risques Â»[19].

L'exaspĂ©ration des fonctionnaires de police s'exprime en effet au cours des semaines qui prĂ©cĂšdent le 17 octobre, par une pratique de sĂ©vices de plus en plus gĂ©nĂ©ralisĂ©e. À l'occasion des divers contrĂŽles d'identitĂ© et formalitĂ©s administratives auxquelles devaient se soumettre les FMA (Français musulmans d'AlgĂ©rie) comme on appelle alors les AlgĂ©riens, le passage Ă  tabac devient de plus en plus frĂ©quent[20]. La hiĂ©rarchie se montre souvent incapable de tenir ses hommes. Les avocates Marie-Claude Radziewsky et Nicole Rein assurent souvent la dĂ©fense des victimes de ces exactions policiĂšres. L'un de leur clients est un marchand de tapis arrĂȘtĂ© le 17 octobre prĂšs du mĂ©tro BarbĂšs. RouĂ© de coups, il se met Ă  hurler. Un brigadier tente de s'interposer « Allez, ça suffit comme ça Â», mais le policier mis en cause lui rĂ©pond « Je n'arrĂȘterai que si je veux Â»[20]. Outre les passages Ă  tabac, les sĂ©vices peuvent consister en destruction de papiers d'identitĂ© ou en vols purs et simples, d'argent ou de montre. Encore le vol reste-t-il relativement rare, tandis que le bris volontaire des montres lors des passages Ă  tabac est beaucoup plus rĂ©pandu[20]. Quand des plaintes sont dĂ©posĂ©es, l'IGS doit diligenter une enquĂȘte, mais suite aux consignes du prĂ©fet Papon, le commissaire divisionnaire de l'IGS s'efforce gĂ©nĂ©ralement de dĂ©douaner les hommes mis en cause[21].

Au-delĂ  des sĂ©vices ordinaires, certains policiers se laissent aller Ă  des violences beaucoup plus graves. Malheur au suspect apprĂ©hendĂ© aprĂšs un attentat ! Le 4 octobre, au cours de la rĂ©union hebdomadaire du SCINA (Service de coordination des informations nord-africaines), son prĂ©sident demande si la recrudescence des dĂ©couvertes de cadavres de FMA dans la Seine ne pourrait pas ĂȘtre consĂ©cutives Ă  des reprĂ©sailles policiĂšres[21]. Les statistiques des homicides commis sur des Nord-Africains dĂ©gagent en effet une tendance particuliĂšrement nette.

Nord-Africains décédés en 1961 à la suite d'homicides réels ou possibles[22]
Morts
Jan Fev Mars Avril Mai Juin Juil Août Sept Oct Nov Dec Total
Nombre de cas total 19 16 20 28 25 20 8 12 48 93 11 8 307
dont cas douteux 2   5 8 3 1 3 2 9 25 2 6

Parmi les 93 homicides du mois d'octobre, 55 ont Ă©tĂ© commis avant la manifestation du mois d'octobre. Quelle part faut-il imputer aux policiers ou groupes parapoliciers opĂ©rant aprĂšs les heures de service ? Jean-Paul Brunet qui a Ă©pluchĂ© les dossiers estime qu'une dizaine de cas sont presque certainement Ă  mettre dans cette catĂ©gorie, mais qu'«à titre d'hypothĂšse provisoire», les morts d'octobre d'avant le 17 sont « en majoritĂ© imputables au FLN Â»[23]. House et MacMaster, s'appuyant sur le fait qu'aucun Ă©lĂ©ment ne vient Ă©tayer l'hypothĂšse d'une recrudescence d'assassinats fratricides au sein de la communautĂ© algĂ©rienne, ni au sein du FLN, ni entre le FLN et le MNA, la majoritĂ© des homicides d'octobre doit ĂȘtre imputĂ©e aux violences policiĂšres[24].

Le couvre-feu [modifier]

Le 5 octobre, le prĂ©fet de police Papon diffuse un communiquĂ© de presse qui institue un couvre-feu pour les Nord-Africains. « Il est conseillĂ© de la façon la plus pressante aux travailleurs algĂ©riens de s'abstenir de circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue parisienne, et plus particuliĂšrement entre 20h30 et 5h30 du matin. Â» Officiellement, il s'agissait « de mettre un terme sans dĂ©lai aux agissements criminels des terroristes algĂ©riens Â»[25]. En fait, il s'agit pour Papon de riposter au FLN pour prendre un avantage dĂ©finitif dans la « Bataille de Paris Â» qui oppose depuis 1958 le FLN qui entend contrĂŽler toute la population algĂ©rienne vivant dans la rĂ©gion parisienne Ă  la police parisienne dirigĂ©e par Papon[26]. Le couvre-feu est effectivement une gĂȘne considĂ©rable pour les activitĂ© du FLN dont les activitĂ©s Ă©taient vespĂ©rales et nocturnes[26]. ParallĂšlement, les services de la SATFMA dĂ©livrent en grand nombre des laisser-passer, de mille Ă  quinze cents par semaine. Le 15 novembre, sur les 90 000 travailleurs algĂ©riens du dĂ©partement de la Seine, 14 000 auront obtenu un laisser-passer[26].

Sur le plan intĂ©rieur, le couvre-feu est violemment critiquĂ© pas seulement par les forces de gauche comme le parti communiste et la CGT, mais Ă©galement par le MRP, et mĂȘme par le commissaire Dides, ancien dĂ©putĂ© poujadiste qui prĂ©sente la mesure comme « une manifestation de racisme contraire Ă  nos traditions Â»[26]. Selon la constitution de 1958, les AlgĂ©riens Ă©taient des citoyens Ă  part entiĂšre et ils ne devaient donc pas ĂȘtre l'objet de mesures discriminatoires. Les 30 dĂ©putĂ©s algĂ©riens dĂ©noncent eux-aussi ces « mesures vexatoires, discriminatoires, pour ne pas dire racistes Â»[27]. C'est d'ailleurs parce que le couvre-feu est lĂ©galement indĂ©fendable que, selon communiquĂ© de Papon, il est seulement conseillĂ© de s'abstenir de circuler la nuit. La police a naturellement donnĂ© Ă  ce « conseil Â» un caractĂšre tout Ă  fait impĂ©ratif[27].

La manifestation du 17 octobre [modifier]

Le FLN décide de riposter au couvre-feu en organisant une manifestation [modifier]

Tout de suite aprĂšs l'Ă©tablissement du couvre-feu, le responsable parisien Zouaoui envoie au comitĂ© fĂ©dĂ©ral un rapport : il y mentionne le couvre-feu et la duretĂ© de la rĂ©pression engagĂ©e par Papon. Il prĂ©conise des actions nocturnes rassemblant hommes, femmes et enfants. AprĂšs avoir consultĂ© en Belgique, le 10 octobre, les hommes de terrain, Zouaoui, Saddek et Omar Ouhadj, syndicaliste de l'AGTA (Amicale gĂ©nĂ©rale des travailleurs algĂ©riens), le comitĂ© fĂ©dĂ©ral conduit par Omar Boudaoud se rĂ©unit Ă  Cologne et fournit des instructions dĂ©taillĂ©es pour une sĂ©rie d'actions articulĂ© en trois phases. Le 14 octobre, Zouaoui transmet Ă  son tour son plan d'actions dĂ©taillĂ© au comitĂ© fĂ©dĂ©ral: Action de masse dans la soirĂ©e du mardi 17 octobre, grĂšve des cafĂ©s, commerces et hĂŽtels le 18 et manifestation de femmes et d'enfants le 20[28],[29].

Le mot d'ordre est donnĂ© aux militants qui ne doivent le communiquer Ă  la base que dans la journĂ©e mĂȘme du 17 octobre pour que la police soit au courant le plus tard possible. Tous les AlgĂ©riens, hommes, femmes et enfants doivent participer Ă  la manifestation. Le port d'armes est absolument interdit. Les hommes seuls et les familles ont pour mission d'atteindre Ă  20h30 un certain nombre de lieux sur les principaux boulevards et places de la capitale[30]. La participation Ă  la manifestation revĂȘt un caractĂšre obligatoire pour les populations contrĂŽlĂ©es par le FLN, ce qui n'empĂȘche pas que par sympathie la majoritĂ© des manifestants penche du cĂŽtĂ© du FLN[31].

Mise en place du dispositif de police [modifier]

Ce n'est que dans la journĂ©e du 17 que l'information parvient au cabinet de Papon. À 16h20, tous les services de la prĂ©fecture de police reçoivent un tĂ©lĂ©gramme informant que « Le FLN ordonne Ă  tous les FMA de sortir ce soir 17 octobre en fin d'aprĂšs-midi et en soirĂ©e sur les grands axes de la capitale [...] afin de manifester pacifiquement contre les rĂ©centes mesures prĂ©fectorales Â». Consigne est donnĂ©e dans ce mĂȘme tĂ©lĂ©gramme d'apprĂ©hender les manifestants, de conduire les hommes au Palais des sports, les femmes et les enfants devant ĂȘtre conduits au poste de police de la rue Thorel, dans le IIeme arrondissement[26]. Pour faire face Ă  la manifestation, la prĂ©fecture mobilise 716 hommes de la police municipale, 662 hommes de la Gendarmerie mobile et 280 CRS, soit au total 1658 hommes, Ă  peine quelques sections de plus que pour les journĂ©es de monĂŽmes du Bac, remarque Jean-Paul Brunet qui verra dans cette faiblesse des effectifs l'un des facteurs ayant conduit Ă  la violence[26], ce qui n'est pas le point de vue de House et MacMaster[32].

La tension des policiers est extrĂȘme. Sur les frĂ©quences districts utilisĂ©e par la police et que peuvent capter les policiers qui rejoignent dans leurs cars leurs lieux d'affectation, circulent des rumeurs signalant que cinq policiers ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© tuĂ©s par les AlgĂ©riens[33].

La manifestation du 17 octobre [modifier]

Les diffĂ©rents historiens ayant travaillĂ© sur cette journĂ©e du 17 octobre, Jean-Luc Einaudi, Jean-Paul Brunet et les britanniques Jim House et Neil MacMaster font ressortir que la rĂ©pression policiĂšre de la manifestation sera d'une violence extrĂȘme, causant des dizaines de morts parmi les manifestants algĂ©riens.

Le FLN avait prĂ©vu de concentrer la manifestation sur trois grands secteurs, zone de l'Étoile pour les AlgĂ©riens de la banlieue ouest, les boulevards Saint-Michel et Saint-Germain pour ceux de la banlieue sud et enfin les Grands boulevards pour ceux de la banlieue nord et nord-est[34]. Le 17 octobre, il pleut en fin d'aprĂšs-midi. Entre 20 000 et 30 000 AlgĂ©riens, hommes, femmes et enfants, vĂȘtus de l'habit du dimanche pour tĂ©moigner de leur volontĂ© de dignitĂ©, commencent Ă  se diriger vers les points de regroupements[35].

Une colonne de 10 000 personnes en provenance des bidonvilles de la banlieue ouest : Nanterre, Bezons, Courbevoie, Colombes et Puteaux, se rassemble au rond-point de la DĂ©fense et se dirige vers le Pont de Neuilly en vue de gagner le secteur de l'Étoile. Cette colonne est bloquĂ©e au pont de Neuilly oĂč est installĂ©e une section de la FPA, sept hommes du commissariat de Puteaux et ultĂ©rieurement une section d'une compagnie d'intervention, soit en tout 65 hommes. C'est ici, au Pont de Neuilly que se dĂ©roule un des affrontements majeurs de la soirĂ©e. Jusqu'Ă  19 heures, la police arrive Ă  faire face et Ă  diriger au fur et Ă  mesure des arrivĂ©es 500 AlgĂ©riens vers le commissariat de Puteaux. Lorsque des milliers de manifestants sont au contact des policiers, ceux-ci doivent faire usage de leurs « bidules Â», ces longs bĂątons en bois dur de 85 cm de long. Une cinquantaine de manifestants arrivent quand mĂȘme Ă  passer. Des coups de feu sont tirĂ©s. D'aprĂšs Brunet, ce sont sans doute les « chocquistes Â» du FLN qui auraient tirĂ© en l'air les premiers coups de feu pour provoquer un affrontement[36]. D'aprĂšs House et MacMaster, c'est plus vraisemblablement la police car aucun policier n'a Ă©tĂ© touchĂ©[37]. Que les policiers aient tirĂ© et qu'ils se soient livrĂ©s Ă  des actes d'une violence extrĂȘme n'est pas contestĂ©. Qu'il y ait eu des morts dans ce secteur, que durant toute la nuit des hommes aient pu ĂȘtre jetĂ©s dans la Seine depuis les ponts de Neuilly, d'Argenteuil ou d'AsniĂšres ne l'est pas non plus [36],[37].

D'autres manifestants ont pu joindre le secteur de l'Étoile par le mĂ©tro, mais de nombreux cars de police se tiennent prĂȘts Ă  recevoir les AlgĂ©riens qui sortent des bouches de mĂ©tro pour les diriger vers les centres d'internement. Plus de 2 500 AlgĂ©riens sont apprĂ©hendĂ©s dans ce secteur oĂč les violences restent Ă  un niveau modeste. Il en est de mĂȘme dans les secteurs de la Concorde et dans une moindre mesure, de l'OpĂ©ra oĂč 2 000 manifestants sont conduits aux centres d'identification[38].

Par contraste, les incidents du secteur des Grands Boulevards sont particuliĂšrement violents et sanglants. Les AlgĂ©riens avaient pu rĂ©ussir leur rassemblement place de la RĂ©publique. Ils brandissent des drapeaux et Ă©charpes aux couleurs vertes et blanches du FLN et scandent les slogans « AlgĂ©rie algĂ©rienne Â», « LibĂ©rez Ben Bella Â». Ils se heurtent Ă  deux compagnies de CRS devant le cinĂ©ma Rex. Des coups de feu partent d'un car de police transportant des interpellĂ©s vers le commissariat de la rue Thorel et qui est bloquĂ© par des manifestants. AprĂšs les Ă©vĂ©nements, l'Ă©tat de la voie publique sera comparable Ă  celui du Pont de Neuilly : dĂ©bris de verre, chaussures perdues, flaques de sang, nombreux blessĂ©s gisant sur le trottoir[39],[40].

Le troisiĂšme secteur d'affrontements violents est celui du secteur Saint-Michel Saint-Germain, Ă  proximitĂ© de la prĂ©fecture de police dans la cour de laquelle les cars de la police dĂ©versent des flots de manifestants interpellĂ©s, plus d'un millier au total. Dans la rue, les forces de police encerclent les manifestants qu'ils chargent et frappent. Pour Ă©chapper aux coups des policiers, certains prĂ©fĂšrent se jeter du Pont Saint-Michel. Des Ă©chauffourĂ©es se prolongent jusqu'Ă  22h30 boulevard Saint-Germain et dans le secteur de Saint-Sulpice oĂč des coups de feu sont tirĂ©s[41],[42].

La nuit du 17 au 18 octobre dans les centres d'identification [modifier]

Entre 17h et minuit, une noria incessante de cars de police et d'autobus rĂ©quisitionnĂ©s dĂ©barquent entre 6 000 et 7 000 algĂ©riens au Palais des sports de la porte de Versailles. Au cours de ces transports, les corps sont parfois empilĂ©s les uns sur les autres. AprĂšs une heure du matin, les 32 derniers cars, contenant 2 623 « FMA Â» (Français musulmans d'AlgĂ©rie, selon la dĂ©nomination de l'Ă©poque) sont dirigĂ©s vers le Stade de Coubertin[43]. Des centaines de manifestants blessĂ©s ont Ă©tĂ© dirigĂ©s sur des hĂŽpitaux. Dans cinq hĂŽpitaux seulement, on compte 260 blessĂ©s hospitalisĂ©s. Jean-Paul Brunet note que sur ces 260 blessĂ©s, 88 sont entrĂ©s entre le 19 et le 21, ce qui tĂ©moignerait de la persistance des brutalitĂ©s policiĂšres bien au-delĂ  de la nuit du 17 octobre[44]. Parmi les policiers, une dizaine a Ă©tĂ© conduite Ă  la Maison de santĂ© des gardiens de la paix pour des blessures lĂ©gĂšres[43]. Certains des blessĂ©s hospitalisĂ©s viennent du Palais des sports oĂč les 150 policiers qui assurent la garde des dĂ©tenus se livrent Ă  des brutalitĂ©s dont le syndicaliste policier GĂ©rard Monate dira dans les semaines suivantes « ...d'aprĂšs ce que nous savons, il y a eu une trentaine de cas absolument indĂ©fendables Â»[43]. Tous les internĂ©s ne sont pas systĂ©matiquement frappĂ©s au Palais des sports, mais des sĂ©vices sont Ă©galement exercĂ©s avant l'arrivĂ©e, dans les commissariats ou pendant les transports[43]. Jean-Luc Einaudi a recueilli nombre de tĂ©moignages d'appelĂ©s du contingent affectĂ©s au service sanitaire, d'assistantes sociales et mĂȘme de certains policiers dĂ©crivant la « vision d'horreur Â» qui les a saisis Ă  l'entrĂ©e du Palais des sports ou du Stade de Coubertin[45]. Les sĂ©vices sur les dĂ©tenus se poursuivent jusqu'au 20 octobre oĂč la salle de spectacle doit ĂȘtre libĂ©rĂ©e pour un concert de Ray Charles[46].

Dans la cour de la prĂ©fecture de police de l'Ăźle de la CitĂ© les 1 200 dĂ©tenus sont reçus par des « comitĂ©s d'accueil Â». Vingt blessĂ©s graves, souvent victimes de traumatisme crĂąnien doivent ĂȘtre Ă©vacuĂ©s vers l'HĂŽtel-Dieu et d'autres hĂŽpitaux[47],[46].

La journée du 18 octobre et les jours suivants [modifier]

Le FLN avait prĂ©vu une grĂšve gĂ©nĂ©rale des commerçants nord-africains et une nouvelle manifestation sur la voie publique, mais il ne bĂ©nĂ©ficie plus de l'effet de surprise. À 12h30, 60% des quelque 1 400 commerces concernĂ©s sont effectivement fermĂ©s et les simples admonestations policiĂšres restent sans effet. Il faut attendre 17 heures pour qu'un ordre soit donnĂ© d'arrĂȘter les commerçants grĂ©vistes. 79 commerçants sont effectivement arrĂȘtĂ©s et la menace est assez efficace pour faire rouvrir les commerces Ă  partir de 18h30[48].

Pour les manifestations de la soirĂ©e, l'encadrement du FLN est considĂ©rablement affaibli par les arrestations de la veille, alors que la police a mobilisĂ© 3 000 hommes, substantiellement plus que les 1 658 de la veille. La prĂ©fecture de police a fait le choix, ce soir lĂ , de privilĂ©gier la dispersion Ă©nergique aux arrestations massives[48]. Les 1 856 arrestations du 18 octobre s'ajouteront quand mĂȘme aux 11 518 de la veille. Dans ces conditions, les seules vĂ©ritables manifestations rassemblant quelques milliers de personnes se dĂ©roulent en banlieue, Ă  Nanterre et Ă  Colombes[48]. À Nanterre, un vĂ©hicule de police est atteint par une balle. Les policiers ripostent faisant huit blessĂ©s[48].

Le dénombrement des morts [modifier]

En 2006, House et MacMaster notent que la question du nombre exact d'AlgĂ©riens tuĂ©s par les forces de l'ordre restent la question la plus ardemment dĂ©battue, les deux protagonistes de cette bataille de chiffres Ă©tant Jean-Luc Einaudi et Jean-Paul Brunet[49]. Les auteurs britanniques qualifient de minimalistes l'estimation de Brunet, de 30 Ă  50 morts pour le 17 octobre et les journĂ©es alors que des commentateurs du livre d'Einaudi croient comprendre de son ouvrage La Bataille de Paris que les policiers ont fait ce soir-lĂ  plus de 200 morts[49]. Les historiens britanniques prĂ©cisent que dans la liste d'Einaudi des 246 victimes pour lesquelles la date du dĂ©cĂšs est connue, 141 dĂ©cĂšs ont Ă©tĂ© enregistrĂ©s avant le 17 octobre. Les chiffres de Brunet et d'Einaudi couramment citĂ©s ne concernent donc pas la mĂȘme pĂ©riode[49]. Brunet avait mis ce point en Ă©vidence en 2003 et dĂ©nonçait Ă©galement dans l’exploitation de cette affaire un « mythe forgĂ© pour les besoins d’une cause militante Â»[50].

Il n'en reste pas moins qu'une fois ces questions de périodes considérées éclaircies, des divergences subsistent, notamment pour désigner les meurtriers des 109 décÚs d'Algériens enregistrés à l'automne 1961. Brunet a imputé un grand nombre de ces victimes au FLN[23], alors qu'en gros, House et MacMaster se rangent du cÎté d'Einaudi en imputant l'essentiel de ces décÚs aux violences policiÚres [24].

Un autre aspect du dĂ©bat sur le nombre de victimes concerne la possibilitĂ© que des corps n'aient pas Ă©tĂ© retrouvĂ©s et n'aient pas Ă©tĂ© enregistrĂ©s Ă  l'Institut mĂ©dico-lĂ©gal. Pour Brunet, la culture policiĂšre rejette toute dissimulation de cadavres[51]. Pour House et MacMaster, il est Ă©galement probable que « certains corps ont Ă©tĂ© enterrĂ©s en secret plutĂŽt que d'ĂȘtre remis aux autoritĂ©s françaises tant redoutĂ©es Â»[52]. Brunet rejette cette possibilitĂ© : « hormis peut-ĂȘtre quelques cas extrĂȘmes, on voit mal comment dans un pays dĂ©mocratique cette Ă©ventualitĂ© aurait pu se produire et comment, aprĂšs presque un demi-siĂšcle, des restes humains n’aient pas Ă©tĂ© retrouvĂ©s. »

RĂ©percussions politiques [modifier]

Les réactions de la Presse [modifier]

Dans la nuit du 17 au 18 octobre, Papon publie un communiquĂ© de presse selon lequel la police a dispersĂ© une manifestation Ă  laquelle les AlgĂ©riens ont Ă©tĂ© contraints de participer sous la menace du FLN. Toujours selon le communiquĂ©, la police sur laquelle des coups de feu avaient Ă©tĂ© tirĂ©s avait dĂ» rĂ©pliquer, faisant deux morts et plusieurs blessĂ©s chez les manifestants. Il est Ă©galement fait Ă©tat de l'hospitalisation d'une douzaine d'officiers de police et du prochain renvoi en AlgĂ©rie de tous les manifestants arrĂȘtĂ©s[53].

Nombreux avaient été les journalistes à couvrir la manifestation du 17 [54], mais la censure de la presse en vigueur pendant la guerre incitant à la prudence, c'est ce point de vue officiel que reflÚte la presse quotidienne le 18 au matin, mais dÚs le 19, les journaux publient une version plus détaillée des évÚnements. De nombreux journalistes se rendent dans les bidonvilles de la banlieue parisienne et y découvrent les signes de la violence policiÚre qui a sévi non seulement le 17 octobre, mais aussi la période précédente[53].

Si L'HumanitĂ© et LibĂ©ration rĂ©futeront nettement le bilan gouvernemental, mĂȘme Le Figaro, publie des articles sur les exactions commises par la police, Ă©voquant par exemple des « scĂšnes de violence Ă  froid Â» dans les centres d'internement. Le Monde rendra Ă©galement compte de ces conditions de dĂ©tention exĂ©crables et de l'invraisemblance des annonces officielles, mais dans l'ensemble, la presse populaire, le Parisien libĂ©rĂ©, L'Aurore, Paris Match reproduisent la version officielle Ă  laquelle va adhĂ©rer tout naturellement la majoritĂ© de la population française[55].

Le numĂ©ro de TĂ©moignage chrĂ©tien datĂ© du 27 octobre. consacrera un dossier complet au massacre des AlgĂ©riens, avec un Ă©ditorial d'HervĂ© Bourges et le tĂ©moignage et les photos d'Élie Kagan. D'autres photos de ce dernier paraĂźtront dans le journal de gauche France Observateur. La radio, par contre, ne rĂ©vĂšle pas les Ă©vĂ©nements et la tĂ©lĂ©vision française raille la presse amĂ©ricaine, accusĂ©e d'avoir affirmĂ© que « la Seine charriait des cadavres d'AlgĂ©riens Â». L'ensemble des revues de gauche, L'Express, Esprit, Les Temps modernes, au sujet de la violence de la semaine du 17 au 20 octobre, souligne Ă  quel point la rĂ©pression en France ressemble Ă  ce qui se passe en AlgĂ©rie[55].

Le 26 octobre, Georges Montaron, directeur de TĂ©moignage chrĂ©tien, Claude Bourdet, directeur de France Observateur, Emmanuel d'Astier de la Vigerie, directeur de LibĂ©ration, le RP Avril, directeur de TĂ©lĂ©rama, le Pasteur Lochard, Jean-Marie Domenach, directeur de la revue Esprit, Jean Schaeffert et AndrĂ© SouquiĂšre, organisent Ă  la MutualitĂ©, un meeting pour « protester contre les violences policiĂšres et la rĂ©pression de la manifestation du 17 octobre 61 Ă  Paris Â» biographie de Georges Montaron sur le site de Daniel Montaron.

Les réactions des parlementaires [modifier]

À la fin du mois d'octobre, Maurice Papon et le ministre de l'intĂ©rieur Roger Frey doivent faire face Ă  un feu roulant de questions embarrassantes, d'abord au conseil municipal de la ville de Paris le 27, puis Ă  l'AssemblĂ©e nationale le 30 et enfin au SĂ©nat le 31. Au conseil municipal de Paris, Claude Bourdet demande s'il est vrai qu'aucun policier n'a Ă©tĂ© blessĂ© par balle, que des rumeurs faisant Ă©tat de morts de policiers se sont propagĂ©es la soirĂ©e du 17, sur les ondes de la police, que 50 AlgĂ©riens ont Ă©tĂ© tuĂ©s dans la cour de la prĂ©fecture et s'il est vrai, enfin que 150 cadavres ont Ă©tĂ© repĂȘchĂ©s dans la Seine[56]. Papon ignore ces questions et la demande de Claude Bourdet de constitution d'une commission d'enquĂȘte est rejetĂ©e par 43 voix contre 39[56]. À l'AssemblĂ©e nationale, c'est le dĂ©putĂ© EugĂšne Claudius-Petit, de sensibilitĂ© Centre-gauche qui lance une attaque fĂ©roce contre la police mettant en Ă©vidence les incohĂ©rences de la version du ministre de l'intĂ©rieur. Au SĂ©nat, c'est le socialiste Gaston Defferre qui lance l'attaque, se basant sur un dossier prĂ©parĂ© par HervĂ© Bourges. Frey rĂ©pond en dĂ©fendant les policiers, victimes des terroristes et maintenant en butte Ă  des « rumeurs odieuses Â» et Ă  une campagne de « dĂ©nigrement Â». Il ne peut refuser la crĂ©ation d'une commission d'enquĂȘte, mais la veille du dĂ©bat au SĂ©nat, des informations judiciaires sur les mort de 27 AlgĂ©riens avaient Ă©tĂ© ouvertes et le 30 novembre Frey se retranchera devant la loi qui interdit la constitution de commissions d'enquĂȘte pour les affaires traitĂ©es par la justice pour dĂ©clarer qu'il Ă©tait dĂ©liĂ© de son engagement avec Defferre[56].

La position du gouvernement [modifier]

On sait trĂšs peu de choses sur les rĂ©actions aux Ă©vĂšnements d'octobre au plus haut niveau du pouvoir. Ni de Gaulle ni ses ministres ne font mention des Ă©vĂšnements dans leurs mĂ©moires ou dans des confidences recueillies par tel ou tel[57]. House et MacMaster discutent de la situation paradoxale qui voit l'apogĂ©e de la violence au moment oĂč les deux parties, gouvernement français et GPRA entrent dans la phase finale des nĂ©gociations. L'une des explications est que chacune de deux parties a prĂ©cisĂ©ment intĂ©rĂȘt Ă  nĂ©gocier en position de force[57].

Pour le GPRA, Ă  la tĂȘte duquel le libĂ©ral Ferhat Abbas est remplacĂ© le 27 aoĂ»t par Ben Khedda perçu comme plus intransigeant, il importe que des manifestations de masse dĂ©montrent sa popularitĂ© en mĂȘme temps que le caractĂšre pacifique des manifestations doit rassurer l'opinion publique et apaiser l'inquiĂ©tude des Pieds-Noirs sur l'avenir qui les attend dans une AlgĂ©rie indĂ©pendante[57].

De Gaulle a Ă©galement intĂ©rĂȘt Ă  lancer des messages tour Ă  tour intransigeants et conciliants. Entre 1958 oĂč il est poussĂ© au pouvoir par les partisans de l'AlgĂ©rie Française et les Accords d'Évian qui scelleront le sort d'une AlgĂ©rie indĂ©pendante en mars 1962, il doit accompagner chaque nouveau pas vers l'indĂ©pendance par une attitude de fermetĂ© destinĂ©e Ă  calmer les partisans de l'AlgĂ©rie française[57]. Cette mĂȘme dĂ©marche le conduit, le 18 aoĂ»t, Ă  refuser la dĂ©mission du premier ministre Michel DebrĂ©, farouche partisan de l'AlgĂ©rie française, mais en contrepartie, il lui laisse la plus grande libertĂ© dans la conduite de la bataille contre le FLN, Ă  commencer par le renvoi du garde des sceaux Edmond Michelet qui ouvre la voie Ă  des mĂ©thodes plus musclĂ©es[57]. DebrĂ© s'accroche alors Ă  l'espoir que les nĂ©gociations puissent se faire avec une force plus modĂ©rĂ©e. Son conseiller Constantin Melnik avait crĂ©Ă© le FAAD ( Front algĂ©rien d'action dĂ©mocratique) en juillet 1960, expĂ©rience qui ne sera abandonnĂ©e sur ordre de de Gaulle que le 20 octobre Ă  la veille de la reprise des nĂ©gociations avec le GPRA[57]. D'aprĂšs House et MacMaster, c'est pour mettre la pression sur le FLN de juillet Ă  octobre 1961 que de Gaulle donne Ă  DebrĂ© et ses proches suffisamment de libertĂ© pour mettre en Ɠuvre une stratĂ©gie d'intransigeance et l'extrĂȘme violence antialgĂ©rienne qui se dĂ©chaĂźne au cours des mois de septembre et d'octobre 1961 est moins le fait d'extrĂ©mistes incontrĂŽlables au sein de la police que l'instrument d'une politique Ă©laborĂ©e par le gouvernement[57].

Le 28 octobre lorsque les Ă©missaires français et algĂ©riens se rencontrent Ă  nouveau Ă  BĂąle, les dirigeants français comme ceux du FLN reconnaissent implicitement qu'il est dans leur intĂ©rĂȘt mutuel d'oublier les Ă©vĂšnements sanglants du 17 octobre pour pouvoir passer Ă  autre chose[57]. House et MacMaster citent Malek, l'un des nĂ©gociateurs algĂ©riens qui observe que le GPRA interprĂšte le 17 octobre comme une « dĂ©marche classique de tout pouvoir Ă©tabli d'accroĂźtre la pression sur l'ennemi au moment mĂȘme oĂč l'on s'apprĂȘte Ă  nĂ©gocier avec lui Â»[58].

Vers l'oubli [modifier]

Aux journĂ©es des 17 et 18 octobre vont succĂ©der d'autres tueries, elles aussi liĂ©s Ă  la guerre d'AlgĂ©rie : 74 AlgĂ©riens sont abattus par la police et par l'armĂ©e au cours des manifestations de cĂ©lĂ©bration du 7e anniversaire du soulĂšvement du 1er novembre 1954.

DĂšs la deuxiĂšme semaine de novembre, malgrĂ© les informations sur les corps repĂȘchĂ©s dans la Seine et les dĂ©bats sur la possible crĂ©ation d'une commission d'enquĂȘte parlementaire, L'HumanitĂ©, LibĂ©ration et Le Monde sont les seuls Ă  continuer Ă  s'intĂ©resser Ă  la rĂ©pression policiĂšre du 17 octobre qui ne bouleverse pas la gauche et ne supprime pas sa division. Un rapprochement des diverses forces de gauche ne se produira que quelques semaines plus tard pour protester contre la menace de l'Organisation armĂ©e secrĂšte. Dans l'espace mĂ©moriel de la gauche, la tuerie du 8 fĂ©vrier 1962 lors de l' Affaire de la station de mĂ©tro Charonne prendra le dessus sur les Ă©vĂšnements d'octobre[59]. D'autres violences liĂ©es Ă  la fin de la guerre d'AlgĂ©rie comme les provocations de l'OAS, la fusillade de la rue d'Isly le 26 mars 1962, les reprĂ©sailles contre les pieds-noirs et enfin l'assassinat de plusieurs dizaines de milliers de harkis ont conduit Ă  effacer quelque peu dans les mĂ©moires le souvenir d'octobre 1961[60].

Historiographie et aspects mémoriels [modifier]

Plaque commémorative implantée sur une passerelle d'Aubervilliers, sur le canal Saint-Denis

En 1961, Paulette Péju fut mandatée par le FLN pour rédiger rapidement un récit détaillé des évÚnements d'octobre. Ce projet prit d'abord la forme d'un recueil d'articles de presse, Les ratonnades d'octobre publié chez Maspero, mais rapidement interdit à la vente[61]. Il faut attendre 1985 pour voir apparaßtre le premier livre important, que l'on doit à Michel Levine, Les Ratonnades d'octobre: un meurtre collectif à Paris en 1961. Ce livre, pratiquement ignoré des critiques et du public lors de sa parution avait été précédé en 1984 d'un roman de l'écrivain Didier Daeninckx, Meurtres pour mémoire, qui évoque sans le nommer Maurice Papon, en liant un ancien collaborateur au massacre de 1961[62].

En 1986, Ali Haroun, l'un des cinq membres du comitĂ© fĂ©dĂ©ral de la FĂ©dĂ©ration de France du FLN basĂ© Ă  Cologne, publie La 7e Wilaya[63] qui donne des informations sur la FĂ©dĂ©ration de France et notamment sur la journĂ©e du 17 octobre. L'annĂ©e suivante, Mohammed Harbi, lui aussi ancien membre fĂ©dĂ©ral, publie dans la revue Sou'al d'autres documents provenant du FLN et concernant l'organisation de la journĂ©e du 17. Autre tĂ©moin, mais de l'autre cĂŽtĂ©, Maurice Papon publie en 1988 Les chevaux du pouvoir[64] oĂč il valorise son rĂŽle dans la dĂ©faite du FLN et maintient ce qui Ă©tait en 1961 la version officielle des Ă©vĂšnements[65].

En 1991, paraĂźt la La Bataille de Paris, 17 octobre 1961 de Jean-Luc Einaudi que House et MacMaster qualifient de « travail le plus remarquable et le plus influent de tous ceux publiĂ©s Ă  cette date sur les Ă©vĂšnements. Einaudi qui n'a pas eu accĂšs aux archives de la police a pu exhumer un certain nombre d'informations nouvelles Ă  partir des archives d'Ali Haroun et du recueil de tĂ©moignages tant français qu'Ă©trangers. À l'Ă©poque oĂč sort le livre d'Einaudi, le public est beaucoup plus rĂ©ceptif que six ans avant, lorsque Levine avait publiĂ© le sien[65]. À la suite du travail d'Einaudi, Anne Tristan publie un recueil photographique Le Silence du Fleuve[66] et les documentaristes britanniques Philip Brooks et Alan Hayling produisent pour la tĂ©lĂ©vision le documentaire qui sera diffusĂ© le 2 mars 1993 par France 3[65].

Le procĂšs trĂšs mĂ©diatisĂ© de Maurice Papon qui se dĂ©roule entre octobre 1997 et avril 1998 provoque un regain d'intĂ©rĂȘt pour les Ă©vĂšnements d'octobre auxquels l'accusĂ© avait Ă©tĂ© mĂȘlĂ© de prĂšs. Bien que les faits reprochĂ©s Ă  Papon portent strictement sur la pĂ©riode de l'occupation, Einaudi est appelĂ© Ă  tĂ©moigner sur le rĂŽle de Papon sur les violences de 1961. La publicitĂ© entourant le procĂšs amĂšne alors le ministre de l'intĂ©rieur Jean-Pierre ChevĂšnement Ă  crĂ©er une commission chargĂ©e d'examiner les archives de la police sous la prĂ©sidence de DieudonnĂ© Mandelkern qui remet discrĂštement son rapport Ă  la presse en mai 1998. Trois historiens dont Jean-Paul Brunet sont alors autorisĂ©s Ă  accĂ©der aux documents originaux contenus dans les archives[67]. Le 3 juin 1998, la ministre de la justice Élisabeth Guigou crĂ©e, pour examiner les archives judiciaires, une autre commission d'enquĂȘte dirigĂ©e par Jean GĂ©ronimi. L'exploitation de ces archives permet Ă  Jean-Paul Brunet de publier en 1999 Police contre le FLN oĂč il conclut que le nombre de victimes des violences policiĂšres est bien infĂ©rieur Ă  celui mis en avant par Einaudi[67].

En fĂ©vrier 1999, Maurice Papon intente une action en diffamation contre Einaudi pour un article paru le 20 mai 1998, dans Le Monde, oĂč Jean-Luc Einaudi Ă©crit : « Je persiste et signe. En octobre 1961, il y eut Ă  Paris un massacre perpĂ©trĂ© par des forces de l’ordre agissant sous les ordres de Maurice Papon Â». L'ancien prĂ©fet de police perd son procĂšs en mars 1999 et c'est avec ce dernier que le massacre du 17 octobre revient vĂ©ritablement sur le devant de la scĂšne mĂ©diatique[67].

La polĂ©mique entre Einaudi et Brunet reste vivace et s'illustre par les deux chapitres que Brunet consacre Ă  l'affaire au dĂ©but de son livre sur Charonne[68]. Les Britanniques House et MacMaster notent que « au cours des dix derniĂšres annĂ©es, la question controversĂ©e de l'Ă©chelle de la rĂ©pression de 1961, de plus en plus politisĂ©e, devient un Ă©lĂ©ment essentiel des enjeux mĂ©moriels de la guerre d'AlgĂ©rie Â»[69]. C'est Ă  ces aspects mĂ©moriels qu'House et Mac Master consacrent plus de la moitiĂ© de leur ouvrage Paris 1961, les AlgĂ©riens, la terreur et la mĂ©moire publiĂ© en anglais en 2006 et traduit en français en 2008. Les historiens britanniques tentent d'arbitrer la querelle de chiffres entre Einaudi et Brunet, mais une autre historienne britannique leur reprochera leur partialitĂ© contre Brunet[70]

Le 17 octobre 2001, quarante ans, jour pour jour, aprĂšs les faits, le maire de Paris, le socialiste Bertrand DelanoĂ«, inaugure la plaque commĂ©morative sur le pont Saint-Michel. Aucun reprĂ©sentant de la droite municipale ne dĂ©sira participer Ă  la cĂ©lĂ©bration.

Le jour mĂȘme, l'aprĂšs-midi, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, le secrĂ©taire d'État Ă  la DĂ©fense chargĂ© des anciens combattants Jacques Floch Ă©voqua notamment Ă  propos des Ă©vĂ©nements du 17 octobre « un couvre-feu appliquĂ© sur la base du faciĂšs Â». La plupart des dĂ©putĂ©s du RPR et de DĂ©mocratie libĂ©rale ont alors quittĂ© l'AssemblĂ©e nationale, critiquant la « rĂ©cupĂ©ration politique Â» d'un tel Ă©vĂ©nement.

Annexes [modifier]

Bibliographie [modifier]

Littérature [modifier]

Filmographie [modifier]

Musique [modifier]

Articles connexes [modifier]

Liens externes [modifier]

Notes et références [modifier]

  1. Gilbert Meynier, Le PPA-MTLD et le FLN-ALN, Ă©tude comparĂ©e, dans La guerre d'AlgĂ©rie, dir. Mohammed Harbi, Benjamin Stora, Robert Laffont 2004, collection de poche Pluriel, p. 609
  2. Jean-Paul Brunet, Police contre FLN, le drame d'octobre 1961, Flammarion, 1999, p. 28-29
  3. Brunet, Police contre FLN, p.29-31
  4. Brunet, Police contre FLN, p.34
  5. Brunet, Police contre FLN, p.35
  6. Brunet, Police contre FLN, p.49
  7. a, b et c Brunet, Police contre FLN, p.60-63
  8. a, b et c Linda Amiri, La répression policiÚre en France vue par les archives, dans La guerre d'Algérie, dir. Harbi et Stora, Robert Laffont, 2004, p.595-598
  9. a, b, c, d et e Brunet, Police contre FLN, p.69-71
  10. Jim House et Neil MacMaster, Paris 1961, les AlgĂ©riens, la terreur d'État et la mĂ©moire, Tallandier, 2008, p.139 (paru en anglais en 2006)
  11. a, b, c, d et e Brunet, Police contre FLN, p.74-82
  12. Brunet, Police contre FLN, p.82
  13. a et b Jim House et Neil MacMaster, Paris 1961, p.125-126
  14. Brunet, Police contre FLN, p.90
  15. Brunet, Police contre FLN, p.83-84
  16. Brunet, Police contre FLN, p.87
  17. Brunet, Police contre FLN, p.89
  18. Brunet, Police contre FLN, p.91
  19. Brunet, Police contre FLN, p.93
  20. a, b et c Brunet, Police contre FLN, p.101-125
  21. a et b Brunet, Police contre FLN, p.125
  22. Brunet, Police contre FLN, p.138
  23. a et b Brunet, Police contre FLN, p.162
  24. a et b House et MacMaster, Paris 1961, les Algériens, p.211
  25. Brunet, Police contre FLN, p.163
  26. a, b, c, d, e et f Brunet, Police contre FLN, p.163-181
  27. a et b House et MacMaster, Paris 1961, les Algériens, p.135
  28. House et MacMaster, Paris 1961, p.129 et 149
  29. Brunet, Police contre FLN, p.167
  30. House et MacMaster, Paris 1961, les Algériens, p.152-153
  31. Brunet, Police contre FLN, p.171-178
  32. House et MacMaster, Paris 1961, p.153
  33. Brunet, Police contre FLN, p.183-185
  34. Brunet, Police contre FLN, p.185
  35. House et MacMaster, Paris 1961, p.152
  36. a et b Brunet, Police contre FLN, p.187-194
  37. a et b House et MacMaster, Paris 1961, p.154-158
  38. Brunet, Police contre FLN, p.196-194
  39. Brunet, Police contre FLN, p.200-206
  40. House et MacMaster, Paris 1961, p.159-161
  41. Brunet, Police contre FLN, p.206-212
  42. House et MacMaster, Paris 1961, p.158-159
  43. a, b, c et d Brunet, Police contre FLN, p.219-227
  44. Brunet, Police contre FLN, p.242-243
  45. Jean-Luc Einaudi, La Bataille de Paris: 17 octobre 1961, Ă©ditions du Seuil, 1991, p.189-191
  46. a et b House et MacMaster, Paris 1961, p.166
  47. Brunet, Police contre FLN, p.228-230
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17/10/2010
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