mesures spéciales au sein des hôpitaux
Vous avez des soins pour vos enfants au CCI de l'hôpital Mustapha ?
Prière de vous munir de couchage et de consommables pharmaceutiques !
par Rachid Benslama
La meilleure indication de l’activité clinique d’un service en milieu hospitalier reste inéluctablement le rôle de l’infirmier quant à la prise en charge du malade qui ne doit pas se limiter uniquement à son «bagage» pratique, mais à un vaste ensemble que la législation hospitalière impose.
Ce n’est malheureusement pas le cas au sein de certains services de chirurgie de CHU à l’image de celui de l’hôpital Mustapha d’Alger (CCI). Beaucoup d’anomalies, en porte-à -faux avec la réglementation et les instructions ministérielles.
Nourriture et literie interdites… mais permises Lorsque le ministre de la Santé et de la Population avait donné instruction qu’à compter du 30 juin 2006, la nourriture et la literie provenant de l’extérieur pour les malades hospitalisés devaient être interdites, il voulait ainsi tourner une page dans le mode de gestion de nos hôpitaux et le faire repartir, pourquoi pas, sur de bonnes et solides bases.
La note ministérielle qui a été envoyée aux 185 secteurs sanitaires, 13 CHU (centres hospitalo-universitaires) et 31 EHS (établissements hospitaliers spécialisés), est tout bonnement bafouée quatre mois après. Les parents des malades et les agents paramédicaux continuent d’enfreindre la directive, puisque les premiers ramènent les victuailles sans que les seconds y voient un inconvénient.
«Je ne suis pas au courant de cette circulaire ministérielle», nous lance un père venu rendre visite à son fils hospitalisé. «Même si elle émane du président de la République, moi, je ne laisserai pas mon fils manger la nourriture de l’hôpital.
D’ailleurs, je pense que la note que vous évoquez n’existe pas, car à chaque fois que je ramène un repas et des couvertures pour mon fils, personne ne m’en empêche. Le problème doit se poser entre le ministre et les travailleurs de la santé.
Je crois que le personnel paramédical n’applique pas la note du ministre, si note il y a bien sûr», affirme-t-il, avant d’ajouter : «Les agents de l’hôpital se retrouveront entre la marteau et l’enclume si cette note venait à être appliquée.
Ils sont, d’une part, obligés de l’appliquer et, d’autre part, contraints de se laisser attendrir par les sentiments lorsque des parents, par exemple, les supplient de donner des fruits ou des yaourts à leurs enfants hospitalisés».
Pour Mohamed, qui s’apprêtait à faire sortir son fils, il faut d’abord améliorer les conditions d’hospitalisation, avant de débattre ce qui doit ou ne doit pas exister. «Durant l’hospitalisation de mon fils, je ramenais tous les jours de la nourriture.
J’avais à cœur qu’il mange bien et propre. Pensez-vous que l’on va donner de l’eau minérale aux malades tout au long de leur séjour à l’hôpital ? Parlez plutôt du vacarme qui sévit dans le service et qui indispose considérablement les enfants hospitalisés», clame-t-il.
J’achète des médicaments pour que l’on change les pansements de mon fils ! Autre lacune relevée au sein de ce service, celle de la prescription, sur ordonnance, de pansements que les parents doivent acheter dans les officines pour permettre qu’ils soient régulièrement changés.
Généralement, on leur prescrit de la Bétadine, un antiseptique très prisé, des compresses stériles, du sparadrap et, parfois, des désinfectants comme le Dakin ou l’eau oxygénée. Tous ces produits sont portés sur la nomenclature nationale des médicaments, d’où leur disponibilité au niveau de la PCH.
Néanmoins, on continue, inlassablement, de les prescrire, obligeant ainsi les parents à les acheter. «Mon fils en est à sa cinquième intervention chirurgicale. Il est né avec une malformation au niveau des doigts. A chaque fois, on me prescrit, sur ordonnance, des produits que je vais acheter chez le pharmacien.
Je n’ai jamais cherché à savoir pourquoi, parce que ce qui prime c’est la santé de mon fils», nous dit ce père de famille que nous avons croisé juste à l’entrée du service CCI. Y a-t-il pénurie de pansements au niveau de la PCH ou des CHU ? Non, si l’on cite en parallèle (et en exemple) le centre de diabétologie de la polyclinique Verdier, dépendant du secteur sanitaire de Bologhine.
Dans cette unité de soins où grouillent les malades, la Bétadine y est très utilisée pour les plaies, notamment au niveau des pieds. Là aussi, on n’a jamais eu de pénurie et l’on n’a jamais prescrit d’ordonnance aux malades pour aller acheter ces produits.
Les compresses stériles, le sparadrap et la Bétadine n’ont jamais fait l’objet de pénurie à la polyclinique Verdier. «Auparavant, la médecine était gratuite et il ne nous manquait rien. Aujourd’hui, la nuitée est payante pour les malades hospitalisés, tandis qu’on nous délivre – et c’est un comble – des ordonnances pour acheter des produits pharmaceutiques qui seront utilisés par les services de l’hôpital, lors des changements de pansements de nos enfants.
Ne trouvez-vous pas cela un peu drôle ?» s’interroge une vieille dame venue rendre visite à son petit-fils. Comment situer les responsabilités dans ce genre de situation, d’autant que le ministre de la Santé avait récemment transmis une circulaire à toutes les structures hospitalières et établissements de santé, concernant non seulement la traçabilité des produits médicamenteux (de la production jusqu’à la consommation par le malade), mais aussi les prévisions annuelles et autres facteurs entrant dans le cadre de la gestion pharmaceutique ? On a beau parler de manque de produits dits «de confort», mais on constate même que des indispensables consommables de base comme le sparadrap ou la Bétadine en arrivent à manquer dans des enceintes hospitalières, comme c’est le cas au niveau du CHU Mustapha.
Dur, dur de se procurer une place à l’hôpital ! Un citoyen qui a fait hospitaliser sa fille pour une appendicite a dû faire le parcours du combattant pour qu’elle puisse bénéficier des soins postopératoires d’usage, indispensables après une telle intervention chirurgicale.
Huit jours après que sa fille eut quitté l’hôpital Mustapha, ce même citoyen a dû la ramener en urgence parce que la plaie, mal cicatrisée, était devenue purulente. Très choqué et affolé, ce père de famille ne savait plus à quel saint se vouer, surtout lorsqu’il a appris, une fois sur place, qu’il devait aller acheter lui aussi… les pansements.
«Aujourd’hui, nous a-t-il dit, il n’est plus question de se contenter de surveiller son enfant pendant son séjour à l’hôpital, il faut continuer à le faire même après, jusqu’à la guérison totale. Dans le milieu hospitalier, les infections peuvent se déclarer une semaine, voire deux après l’intervention.
Aujourd’hui, je me demande comment la plaie de ma fille a pu s’infecter», nous dit-il sur un ton bien amer. Le comble, c’est qu’il faut vraiment tremper sa plume dans l’arc-en-ciel pour pouvoir dénicher une place à l’hôpital. «C’est complet !» vous signifie-t-on, comme s’il s’agissait d’un hôtel de luxe.
Un homme, la cinquantaine, sort d’un service. Du bout des lèvres, il balbutie quelques mots pas gentils du tout. On comprend, dès lors, qu’il n’a pas encore trouvé de place pour hospitaliser son fils. Un autre père de famille, accompagné de son enfant, est sur le point de quitter le service.
Nous l’abordons : - Bech’fa pour votre fils, monsieur ! - Merci, mais il n’a pas encore été opéré. - Ah bon ? - On vient de le programmer pour le mois de janvier prochain et j’en suis très satisfait, car cela fait des mois que je cours pour son hospitalisation.
- Vous venez de loin ? - Oui, je viens d’Adrar. Je suis là depuis six heures ce matin (NDLR : il était 14h20 quand nous l’avons abordé). Mon fils doit se faire opérer de la colonne vertébrale et je suis obligé d’attendre jusqu’à janvier.
Déjà que j’ai trouvé un créneau… Dehors, un ciel bleu plante le décor et inonde de lumière les chambres des bambins hospitalisés. Une lueur d’espoir et de joie pour ces enfants innocents. Nous quittons l’enceinte hospitalière avec l’espoir de voir tous ces «faux problèmes» se dissiper, car il y va de la santé des enfants, de ceux qui sont nés pour être heureux.
Par un heureux concours de circonstance, en passant au niveau de la rue Hassiba-Ben Bouali, nous nous surprenons à entendre, parmi tout le vacarme ambiant et sortant du poste radio du véhicule d’un automobiliste, la voix d’Yves Duteuil qui interprétait cette merveilleuse chanson : Prendre un enfant par la main.
A méditer ! R. B.
http://www.jeune-independant.com/display.php?articleId=27145
mesures spéciales au sein des hôpitaux
ALORS QUE L'INTERDICTION D'INTRODUIRE LITERIE ET NOURRITURE ENTRE EN VIGUEUR SAMEDI :
Si le ministère de la Santé tient sa promesse, les patients qui seront admis dès samedi devront se contenter de la nourriture servie par les hôpitaux et de la literie que ces derniers mettront à leur disposition. A quelques jours de cette date-butoir, un nombre impressionnant du personnel de la santé ignorait tout de cette mesure. Médecins et paramédicaux expriment leurs doutes alors que les malades promettent de ne pas accepter d'ingurgiter la nourriture insipide servie ni de dormir dans des draps à la propreté plus que douteuse.
«Jamais sans mes draps»
La sortie médiatique du ministre de la Santé, reprise à la Une de plusieurs journaux, n'a apparemment pas eu beaucoup d'écho auprès des premiers concernés. La corporation est en effet partagée entre des personnes n'ayant «jamais entendu parler de ça» et des personnes qui «ne croient plus aux effets d'annonce». Pour s'en convaincre, petit tour au service des admissions du plus grand CHU d'Alger. A quinze jours de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation, les personnels y travaillant sont incapables de donner le moindre renseignement à ce sujet. Ils affirment que l'administration ne les a pas informés. L'un d'entre eux croit se souvenir avoir lu sur les colonnes des journaux qu'à compter du 30 juin, couvertures et victuailles seront bannies. Ironique, il explique qu'il suffit de regarder ce qui se passe aux abords de son service pour comprendre la complexité de la situation. La scène est classique : le parent d'un patient arrive les bras chargés de draps, de couvertures et d'oreillers. C'est devenu une tradition, presque une religion. Chaque malade charrie avec lui de la literie, beaucoup de literie. Il n'est un secret pour personne que les matelas, les draps et les oreillers des hôpitaux sont loin d'être un modèle de propreté. Blancs à l'origine, ils sont devenus gris, auréolés de taches. Des haillons qui n'ont de draps que le nom. Ce qui fera dire à un mari venu faire admettre sa femme au service d'obstétrique, que le ministère de la Santé a mis la charrue avant les bœufs. «Avant de prendre ce genre de mesures, ils auraient dû améliorer les conditions d'accueil des malades.». Un avis que partage un petit groupe de médecins rencontrés au niveau du service de cardiologie. S'ils sont au courant de la décision de la tutelle, ils restent cependant très sceptiques. Ils estiment que les habitudes ont la peau dure. A moins d'une véritable révolution dans les hôpitaux, ces pratiques qui sont entrées dans les mœurs risquent de ne pas disparaître. Les malades trouveront toujours une connaissance qui connaît une connaissance qui travaille au niveau du service X et qui pourra introduire les produits prohibés. Et pour l'heure, il n'est pas permis de parler de révolution. Il semblerait que rien n'a été fait pour renouveler la literie des hôpitaux. Autre souci majeur des malades : la restauration. Sans exiger des plats dignes d'un cinq étoiles, ils réclament le droit à une alimentation moins infecte. Un quinquagénaire cardiaque hospitalisé depuis une semaine en a gros sur le cœur. Il ne comprend pas qu'on puisse servir des œufs bouillis et une portion de fromage pour le déjeuner. Evidemment que ce jour-là , il n'y a pas touché car sa famille est arrivée à une heure sonnante avec un plat spécialement mijoté pour lui. Si les médecins sont souvent en désaccord avec leurs patients à cause de ces repas trop copieux, ils font souvent preuve d'indulgence. Il faut vraiment être obligés de le faire pour avaler les plats servis. Mais de quelle manière ces derniers sont-ils élaborés ?
Le diététicien, l'incompris du service
C'est au diététicien, au médecin et à l'économe qu'échoit la mission de préparer un menu hebdomadaire. En fonction du budget alloué à l'alimentation, ils décident de ce que les malades mangeront. Le diététicien et le médecin doivent veiller à ce que les plats proposés ne soient pas incompatibles avec les différentes pathologies des malades. Les choses ne se passent pas toujours comme cela. Démotivés, les cuisiniers ne font aucun effort et pensent même que la diététique est un luxe qu'un hôpital ne peut se permettre. Sous-payés, ils font le minimum au grand dam d'un diététicien exerçant dans un EHS à Alger. Passionné par son métier, il ne comprend pas que la corporation soit à ce point marginalisée et incomprise. Issu de l'Institut des technologies de la santé publique, il explique que grâce à la diététique beaucoup de symptômes peuvent disparaître. «En observant des règles simples, on peut améliorer le quotidien des malades», dit-il, espérant que la nouvelle réglementation en vigueur permettra de réhabiliter la profession de diététicien, souvent dénigrée par les médecins et rejetée par les paramédicaux. Lorsqu'en avril dernier, Amar Tou annonçait ces nouvelles dispositions, il avait évoqué les mesures d'accompagnement et un budget «spécial» qui permettrait aux structures sanitaires de renouveler leur literie et de proposer aux malades des plats moins insipides. La question des diététiciens n'a en aucun cas été évoquée. La convocation adressée aux directeurs des CHU et dans laquelle le ministère écrit «à défaut de diététicien, veuillez déléguer un technicien en assainissement », renseigne sur le déficit de diététiciens. Tous les secteurs sanitaires ne bénéficient en effet pas des services d'un spécialiste en nutrition. Ce dernier, maillon fort de la chaîne, mériterait d'être réhabilité. Ce n'est qu'en améliorant la qualité des repas et en veillant aux strictes règles d'hygiène que sera réinstaurée la confiance perdue depuis fort longtemps en les institutions. En attendant, le spectacle continue : marmites et couvertures continuent leur ballet. Les malades espèrent ne pas en être privés, ils ne croient pas en les promesses du ministère de la Santé et ne désespèrent pas d'introduire «comme au bon vieux temps» tout ce qu'il leur faut pour survivre dans des conditions plus ou moins acceptables. Le système D a encore de beaux jours devant lui….
Nawal Imès
En dépit des nombreuses sollicitations, le ministère de la Santé est resté sourd à notre demande d'autorisation d'effectuer un reportage au sein du CHU Mustapha. Le département de Amar Tou a érigé le silence comme politique de communication et a imposé cette loi à l'ensemble des cadres du secteur. Disposé à nous recevoir et à nous ouvrir les portes de son établissement, le directeur général a dû attendre le feu vert de la tutelle qui refuse obstinément de communiquer.