
Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE ROUIBA : LâUGTA MISE EN FAILLITE «Sidi-SaĂŻd nous a vendus» Par Boubakeur Hamidechi hamidechiboubakeur@yahoo.fr
Le constat est certes chargĂ© de colĂšre mais il est aussi un arrĂȘt de mort adressĂ© Ă ce syndicat officiel. Le fait quâil ait pour auteurs les travailleurs de la zone industrielle de Rouiba ne vaut-il pas son pesant de discrĂ©dit ? Il paraphe, en quelque sorte, le sentiment quâĂ©prouvaient en novembre dernier les fonctionnaires de lâenseignement quand ils dĂ©cidĂšrent dâentamer une longue grĂšve de maniĂšre autonome. Pris Ă partie nommĂ©ment, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de lâUGTA a mĂȘme fait lâobjet dâallusions dĂ©shonorantes de la part des grĂ©vistes. Ne manquant pas de mĂ©moire, ils nâeurent aucune peine Ă mettre en exergue certaines turpitudes du passĂ© et les «casseroles » que lui coĂ»tent sa docilitĂ© actuelle. Une terrible suspicion qui a, singuliĂšrement, changĂ© la perspective mĂȘme de ce vaste dĂ©brayage. En effet, tout en rĂ©futant les dĂ©cisions de la rĂ©cente tripartite, les grĂ©vistes en veulent paradoxalement moins au pouvoir quâils ne sâen prennent au syndicat. TraitĂ© de capitulard, celui-ci serait, selon eux, Ă lâorigine de la dĂ©gradation de leurs conditions socio-Ă©conomiques. Ou tout au moins complice de la politique discriminatoire de lâEtat. Ainsi cette grĂšve, qui est en train de se durcir, exprime une double contestation. Dâabord elle met en avant le rejet des nouvelles dispositions relatives aux droits Ă la retraite et aux rĂ©munĂ©rations du travail, ensuite elle appelle au retrait de la confiance en lâUGTA en sa qualitĂ© de nĂ©gociateur. Lui reprochant dâavoir dĂ©sertĂ© sa vocation de dĂ©fenseur des catĂ©gories de salariĂ©s par inclination carriĂ©riste, ils accusent ses instances de corruptibilitĂ©. Reprenant les mĂȘmes arguments utilisĂ©s par les courants autonomes, les syndicats dâentreprise, agissant sous le sigle UGTA, commencent Ă mettre en doute la probitĂ© de la commission exĂ©cutive. Autant croire quâun vent de fronde est en train de se lever Ă lâintĂ©rieur de cette maison. Le syndicalisme, version UGTA, prend eau de toutes parts. Il est aujourdâhui dĂ©savouĂ© violemment jusquâĂ lâĂ©claboussement des notables qui la contrĂŽlent. Cette nomenklatura, issue de congrĂšs prĂ©fabriquĂ©s et reconduite chaque fois selon les mĂȘmes modalitĂ©s, est non seulement combattue de «lâextĂ©rieur » (les autonomes) mais Ă©galement contestĂ©e de lâintĂ©rieur. Voire poussĂ©e vers la porte de sortie. En termes de crĂ©dit, les actuels dirigeants, dont le plus visible est Sidi- SaĂŻd, sont indiscutablement clouĂ©s au pilori lĂ oĂč les revendications lĂ©gitimes empruntent la voie de lâaffrontement. Tournant le dos aux vĂ©ritables attentes, nâontils pas contribuĂ© Ă dĂ©voyer lâaction syndicale pour se dĂ©vouer Ă la fonction peu glorieuse de pompier au service de lâappareil dâEtat jusquâĂ en devenir son supplĂ©tif ? Câest cette image quâils renvoient dâeux chaque fois quâils sont sollicitĂ©s en qualitĂ© de partenaire pour sceller le destin du monde du travail. Appendice du gouvernement, lâUGTA nâa eu de cesse, depuis au moins cinq annĂ©es, de composer avec celui-ci plutĂŽt que de relayer les dolĂ©ances de sa base. En somme, elle traita en prioritĂ© les incertitudes du gouvernement au lieu de se pencher dâabord sur les inquiĂ©tudes des travailleurs. Telle quâelle se prĂ©sente actuellement, cette «Centrale» est bien loin de rappeler quâelle fut, Ă un moment de longue histoire, la bonne adresse pour exprimer son dĂ©saccord avec les mandataires de lâEtat. De cette vocation, il ne reste presque rien. Fortement insĂ©rĂ©e dans lâarmature du pouvoir, elle fonctionne comme un vecteur modĂ©rateur de la revendication Ă la demande du gouvernement. Et pour ĂȘtre plus prĂ©cis, sur son injonction. De concessions, supposĂ©es tactiques, en compromissions politiques insoutenables, nâa-t-elle pas fini par «dĂ©sespĂ©rer» Rouiba ? Ce bastion de lâouvriĂ©risme algĂ©rien oĂč, jusquâĂ rĂ©cemment, le taux de syndicalisation des salariĂ©s Ă©tait encore respectable, vient dâentrer lĂ©galement en dissidence avec un appareil dont il dĂ©couvre la dĂ©testable duplicitĂ©. En perdant son vaisseau- amiral que reprĂ©sente ce fleuron industriel, lâUGTA est dĂ©finitivement mĂ©tastasĂ©e. NâĂ©tant mĂȘme plus en mesure dâassumer le rĂŽle de «coupe-feu» face Ă la contestation comme il est exigĂ© dâelle par le pouvoir, lâon peut dĂ©sormais sâinterroger sur son devenir. Autrement Ă©crit : Ă quoi sert un tel syndicat pour le pouvoir ? Son inefficacitĂ© par deux fois vĂ©rifiĂ©e sur le terrain (grĂšve des enseignants et celle de Rouiba) pourrait convaincre le rĂ©gime Ă changer de «partenaire». A moins quâĂ dĂ©faut dâun syndicalisme de substitution, il prĂ©fĂšre le ravalement de façade de la mĂȘme maison en y dĂ©lĂ©guant un autre personnel ! DiscrĂ©ditĂ©s Ă Rouiba et un peu partout, Sidi-SaĂŻd and Co pourraient alors ĂȘtre remerciĂ©s. Les congrĂšs extraordinaires ne sont-ils pas faits pour cela dâailleurs ? B. H.
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