Barakat annonce des actions de protestation pour le 24 et 27 mars
Barakat
le 22.03.14 | 17h15
Le mouvement a appelé le peuple algérien à « rejeter » le scrutin présidentiel du 17 avril et l’invite à « exprimer son refus par des moyens pacifiques ».
Le mouvement Barakat compte tenir deux rassemblements de protestation lundi et jeudi prochains à Alger.
Dans un communiqué rendu public, ce samedi, à l’issue de la réunion de son bureau de coordination, le mouvement a précisé que le sit-in du 24 mars se tiendra à 11heures devant le siège de la télévision de l’Etat (ENTV), sis au 21 boulevard des martyrs à Alger. Ce sit-in a été décidé pour dénoncer « la fermeture du champ audiovisuel » et « la discrimination » exercée par les médias publics devenus « un instrument au service d’une minorité de corrompus au pouvoir ».
Le deuxième sit-in de protestation est prévu jeudi le 27 mars à 11 heures, devant la FAC centrale d’Alger.
Barakat a relevé, dans son communiqué, que le pouvoir en place « continue sur la voie qu’il a tracée depuis 1962 » qui consiste en « la fermeture du champ politique et l’organisation d’élections présidentielles formelles dont les résultats sont connus d’avance ».
Le mouvement a appelé l’ensemble du peuple algérien à « rejeter » le scrutin présidentiel du 17 avril et l’invite à « exprimer son refus par des moyens pacifiques pour arriver à une solution politique civique et consensuelle ».
http://www.elwatan.com/actualite/barakat-annonce-des-actions-de-protestation-pour-le-24-et-27-mars-22-03-2014-250145_109.php
Farouk Djouadi
Mots-clés
Différents courants politiques à Harcha
Le rejet du quatrième mandat rassemble
le 22.03.14 | 10h00
Les partis et personnalités politiques appelant au boycott de la présidentielle ont réussi, hier, à rassembler des milliers de personnes à la salle Harcha. Les boycotteurs, qui se projettent déjà dans l’après-17 avril, veulent se poser comme un front politique alternatif en s’inscrivant durablement dans le temps.
Début officiel du printemps. Il fait beau. Alger s’anime. Les bambins sont de sortie. Juste après la prière d’El Djoumouâ, les familles envahissent les parcs publics, le Jardin d’essai, les centres commerciaux ou encore la nouvelle promenade qui longe la baie. Dans le lot, il y en a qui ont préféré s’offrir un week-end politique du côté de la salle Harcha. Et pour cause : c’est là que se tient le premier meeting populaire des «5+1», le front fraîchement créé des partisans du boycott et qui comprend : le RCD, le MSP, Jil Jadid, Ennahda, le FJD de Djaballah et l’ex-candidat à la présidentielle Ahmed Benbitour. Le meeting doit commencer à 15h. Une heure avant, des cortèges de militants et de citoyens convergent vers la salle. Un dispositif léger des forces de police quadrille les abords de la salle et les voies qui y mènent.
Devant la grille principale, un groupe d’islamistes s’est formé. Des militants de l’ex-FIS. Ils semblent guetter quelqu’un ou quelque chose. Des policiers en uniforme et en civil les ont à l’œil. 14h25. Ali Benhadj débarque et provoque un petit mouvement de foule. «Ya Ali, ya Abbas, el djabha rahi labess», scandent ses fans. Les policiers les laissent faire. Ils pénètrent à l’intérieur du complexe sportif, en rangs serrés, derrière Ali Belhadj. Ils prennent place sur un flanc de la salle, juste en dessous de tribunes dominées par des drapeaux berbères. Echanges d’amabilités par slogans interposés, mais les choses en resteront là. La salle continue à se remplir. Tous les gradins sont pleins, de même que l’arène centrale où des chaises en plastique ont été disposées. Une tribune a été aménagée au fond. Il fait chaud. Effet de serre. Des slogans fusent en attendant l’entrée sur scène des tribuns : «Y’en a marre de ce pouvoir», «Djazaïr horra, dimocratia» ou encore «Echaâb yourid isqat ennidham».
«Mou-qa-ta-â»
Un chauffeur de salle invite les présents à répéter après lui le mot d’ordre du meeting : «Mou-qa-ta-â» (boycott). Une large affiche répercute le même slogan : «Boycott, boycott pour l’Algérie». 14h55. Saïd Sadi fait une entrée triomphale. Il est accompagné de maître Ali Yahia Abdennour, avec son élégance légendaire, la tête coiffée d’astrakan. Cameramen et photographes se ruent vers eux. Des sympathisants du RCD entonnent : «Assa, azekka, Sadi yella yella». 15h. Les tribuns tant attendus font leur entrée en traversant la salle. Ils se fraient difficilement un chemin au milieu d’un véritable ciment humain. Ils montent sur l’estrade. Photo de famille en levant les bras, la main dans la main. L’image est séduisante. Celle d’une opposition qui aura su transcender ses divergences pour faire front face au «nidham». Le chauffeur de salle scande de nouveau «mou-qa-ta-â», suivi en chœur par un public chauffé à bloc. L’un des organisateurs récite la Fatiha suivie de Qassaman et d’une minute de silence à la gloire des chouhada et des victimes de Ghardaïa.
C’est Soufiane Djillali qui ouvre le bal. L’ordre de passage a été décidé par tirage au sort. «Et tout le monde a respecté le verdict de notre urne», glisse malicieusement l’un des animateurs du meeting. Le président de Jil Jadid étrenne son discours sur fond de «ulac el vote ulac». «Nous sommes heureux de voir cette salle pleine et, en son sein, des Algériens de différentes sensibilités. C’est une belle image qui dit notre disposition à travailler la main dans la main, car nous sommes tous dans la même tranchée. Nous luttons tous pour l’Algérie de demain», déclare Soufiane Djilali, avant d’ajouter : «Ce meeting est la meilleure réponse au régime qui ne cesse de répéter : c’est moi ou le chaos.» «Ils veulent nous imposer un Président absent, un président fantôme qui ne s’adresse plus au peuple et qui n’a d’autre souci que son intérêt personnel.
Après 22 mois de silence, il a parlé pendant 14 secondes pour dire ‘djit bach netrachah’ (je suis venu pour me présenter). Il n’a eu aucun mot pour les citoyens qui meurent à Ghardaïa et ailleurs. Un clan a fait de cette élection une mascarade. Sellal et Benyounès se permettent même d’insulter le peuple. On a rappelé les ingénieurs de l’échec. Ouyahia, ils l’ont affamé du ‘koursi’ et maintenant, il court après. Belkhadem, dit sa voix (du Président) s’éteint et revient. Il nous parle d’un président disparu. Depuis février, nous sommes sortis du processus électoral pour entrer dans une logique de coup d’Etat», assène l’orateur dans un tonnerre d’applaudissements. Et l’ex-candidat à la présidentielle de plaider, en guise d’alternative, pour un Etat de droit, un système politique consensuel qui soit l’émanation du peuple. A la fin, Soufiane Djilali lance cette boutade : «Je vais vous confier un secret, mais ne le répétez à personne. Avec les chefs de parti réunis ici, nous sommes en train de comploter contre ce système ! Alors aidez-nous dans notre complot…»
«Le boycott n’est pas une fin en soi»
Mohcine Belabbas, président du RCD, prend le relais dans un arabe impeccable, saupoudré de phrases en kabyle : «Dans cette salle, je vois l’Algérie qui aspire à la dignité, à la liberté et à la justice.» Il poursuit : «Ce meeting est un tournant inédit, celui d’une Algérie pluraliste. Nous voulons transmettre un message de paix et de tolérance. C’est la preuve que les Algériens, malgré leurs différends et leurs différences, sont capables de dialoguer, échanger leurs visions.» M. Belabbas dresse au passage un sévère réquisitoire du régime avant de prévenir : «Si le pays demeure otage de ce système, son sort sera la destruction.» Il flingue le régime électoral actuel et la plaie de la fraude qu’il qualifie de «cancer». Toujours dans le même registre, le président du RCD parle de «hold-up électoral».
Pour lui, le pire des voleurs «est celui qui prive le citoyen de sa voix». Mohcine Belabbas est revenu sur la proposition de créer une commission indépendante d’organisation des élections qui a essuyé un refus entêté. Et de pointer du doigt la partialité de l’administration, de la justice, du ministère de l’Intérieur et du Conseil constitutionnel qui sont devenus, selon lui, des instruments au service de la fraude. Pour lui, l’enjeu, aujourd’hui, n’est pas uniquement de faire barrage au quatrième mandat mais de combattre l’ordre établi et le régime qui le soutient. «C’est un régime qui sème la haine et la fitna. Le M’zab est en état de guerre depuis cinq mois, où est la stabilité ?» s’écrie-t-il.
Pour lui, «le changement doit s’opérer d’une façon pacifique et organisée». «Le boycott n’est pas une fin en soi, c’est une manière de fragiliser le système et de vider le prochain mandat de toute sa substance.» «C’est le premier pas pour jeter les assises d’une période de transition afin de redéfinir les règles du jeu politique», appuie-t-il. Cela doit se faire dans le cadre de consultations élargies avec, pour finalité, une Constitution consensuelle, préconise-t-il, avant de conclure : «Ce système va tomber mais l’Algérie vivra !»
«L’acte de naissance d’une nouvelle ère»
Pour sa part, Mohamed Douibi, secrétaire général du mouvement Ennahda, s’attelle à expliquer les raisons du boycott : «Nous avons demandé des garanties pour sortir de la crise à travers des élections honnêtes. Nous avons exigé une instance indépendante qui organise les élections. Le régime a refusé. Nous savons pertinemment que le scrutin est truqué d’avance. Nous avons choisi de ne pas cautionner cette élection, notre participation s’apparenterait à un faux témoignage (chahadate zour).» Abondant dans le sens des interventions précédentes, Mohamed Douibi insiste sur le fait que cette sortie commune s’inscrit dans une démarche politique qui va au-delà du boycott. «Ce consensus exprime la profondeur de la classe politique», a-t-il souligné.
«Il s’agit maintenant de travailler autour d’un projet politique national d’avenir qui commence par une Constitution consensuelle.» «Notre projet est un projet politique qui rendra la parole au peuple. Aujourd’hui, vous avez signé l’acte de naissance d’une nouvelle ère», se félicite le leader d’Ennahda. A peine Abdallah Djaballah, président du Front de la justice et du développement, s’apprêtait-il à prendre la parole que le groupe des ex-FIS entourant Ali Benhadj se mit à le chahuter. Ils reviendront plusieurs fois à la charge mais ne parviendront pas à déstabiliser Djaballah.
Ce dernier finit par étrenner son discours en saluant ceux qui osent dénoncer l’injustice. Il salue également dans la foulée la population des Aurès «qui a brisé le mur de la peur». Et de faire remarquer : «L’Algérie n’est pas seulement devenue ‘‘mamlaka’’ (monarchie) mais ‘‘milkiya khassa’’ (propriété privée).» Et de brocarder ceux qui veulent imposer «un homme impotent, incapable de gérer sa propre personne, et qui se présente afin de permettre au régime de poursuivre sa politique de pillage des richesses du peuple». Abdallah Djaballah termine en appelant les autres candidats encore en course à rejoindre le front des boycotteurs.
Benbitour chante Min djibalina
Abderrazak Makri, président du MSP, fera, lui, une allocution très animée, invitant le public à répéter, à intervalles réguliers, des slogans-clés. Il entonnera tour à tour «Antoum fachiloune» (vous avez échoué) que reprendra la salle à l’unisson, suivi de «Antoum fassidoune» (vous êtes des corrompus) en parlant de «mafia intercontinentale». M. Makri dénonce vigoureusement la dernière vague de répression contre les «anti4» et la fermeture abusive de la chaîne Al Atlas TV. Il reprend son anaphore par un tonitruant «Antouma haggarine», avant d’entonner : «Nahnou mouqatioune» (nous vous boycotterons). L’orateur termine en appelant à méditer l’exemple tunisien où «la classe politique a su dépasser ses divergences et élaborer une solution».
Enfin, l’ex-candidat Ahmed Benbitour a souligné, à son tour, la forte portée symbolique de ce meeting qui, dit-il, «montre la bonne voie pour sauver l’Algérie». «C’est un comportement civilisé qui montre que les Algériens sont capables d’agir sans violence.» «Ce 21 mars 2014 fera date», note-t-il. Et d’appeler à une conférence nationale pour le changement. L’ancien chef de gouvernement plaide pour «un Etat fort par sa justice au lieu d’un Etat faible et uniquement fort par sa police». Clou de son intervention : Benbitour chante Min djibalina. Et toute la salle de le suivre. Moment fort en émotion. «Min djibalina talaâ sawtou el ahrar younadina lil istiqlal»…
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