Démantèlement du Souk Abacha à Sétif : the day after

Démantèlement du Souk Abacha à Sétif : the day after

le 14.09.12 | 10h00

 
 

Erigé dans les années 1980, l’appendice du souk Abacha n’est depuis mardi qu’amas de gravats et ferraille.

Réquisitionnés par les pouvoirs publics, les engins de la commune qui n’est pour rien dans l’opération sont à pied d’œuvre pour réhabiliter l’espace. Pas moins de 800 stands de fortune, où on vendait vêtements, produits alimentaires et cosmétiques, le plus souvent périmés, ont été rasés.  Pour déloger plus de 1000 commerçants «exonérés» de toute charge ou imposition, pas moins de 600 policiers ont été mobilisés. N’étant pas une mince affaire, l’opération  a été émaillée d’échauffourées qui ont fait plus de 20 blessés dans les rangs des forces de l’ordre. Mêlés aux incidents, 40 individus ont été interpellés. Poursuivis pour divers griefs, cinq d’entre eux devront prochainement s’expliquer devant la justice. Notons que 48 heures après l’éradication de l’endroit qui a empesté la vie à la ville, 30 ans durant, la tension et perceptible de ce côté de la cité où les policiers sont sur le qui vive.

D’autant plus que les «délogés» reviennent à la charge et regardent impuissants les manœuvres des pelleteuses et gros engins venant à bout des «résidus» de la plaie. Approchés pour nous livrer certains secrets relatifs au souk et à l’opération, des «cadres» nous font des confidences sous le sceau de l’anonymat : «Il ne faut pas se voiler la face, le souk Abacha «bis» était entre les mains d’un cartel qui sous-louait les 2 ou 3m2  de la voie publique pour 10 ou 15 millions de centimes. L’endroit était à 95% occupé par des gens qui ne résidaient pas la ville de Sétif. La complicité des travailleurs de la commune et d’anciens policiers qui ne voulaient pas  du démantèlement d’Abacha, et ce, pour des raisons évidentes, a fait capoter les tentatives des dernières années. L’endroit qui se trouvait hors contrôle des services de l’Etat générait annuellement des milliards et des milliards de dinars.

En ces lieux des gens ont amassé des fortunes», diront nos interlocuteurs qui enfoncent le clou : «Pour gagner plus et écouler des produits alimentaires de qualité douteuse ou périmés, certains grossistes qui ont trouvé la parade, refilent leur poison à des jeunes désœuvrés qui n’éprouvaient aucune difficulté à  écouler la marchandise contre des prix défiant toute concurrence. L’inconscience des consommateurs a encouragé les vendeurs. La complaisance, pour ne pas dire la complicité, de la municipalité - propriétaire des lieux - est pour beaucoup dans la prolifération des vendeurs à la sauvette qui représentaient un réel danger pour les riverains.» «Pour mettre un terme au fléau de l’informel, on doit mener une guerre sans merci contre les contrefacteurs basés  notamment à El Eulma et Aïn Oulmène, insistent nos interlocuteurs, l’opinion est en droit de savoir que bon nombre de produits nuisibles à la santé  (tabac à chiquer, frik, eau minérale, confiseries et autres) sont  fabriqués illégalement à Aïn Oulmène.

Adeptes du gain facile, des importateurs d’El Eulma qui ne se soucient guère du bien-être de leurs concitoyens vont jusqu’à fabriquer en Chine des vêtements douteux, des compteurs d’eau et des ustensiles de cuisines hors normes.» De leur côté, les «délocalisés» fulminent : «Il est vrai que nous avons travaillé dans l’illégalité durant presque 30 ans, mais les pouvoirs publics qui ont bien fait de raser le marché doivent penser aux véritables commerçants désemparés. Le moment est venu pour faire un recensement des marchands qui se retrouvent du jour au lendemain au chômage.

La situation ne peut plus durer car  nous  avons des familles à nourrir.» Pour  les habitants des quartiers environnants, l’Etat a repris son territoire : «Après presque 30 ans de cauchemar, nous revenons à la vie, oui, nous revenons à la vie. Ne pouvant supporter le diktat de ces faux marchands qui nous obligeaient à nous réveiller à 4 ou 5 h du matin, de nombreux voisins étaient dans l’obligation de brader leur logement.  Les autres se sont abonnés chez des psychiatres», dira Laïd, l’un des habitants de la cité des 132 Logements qui a souffert le martyre des décennies durant.        

Kamel Beniaiche
 


14/09/2012
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 76 autres membres