Hépatite C : Alerte rouge à Aflou


Hépatite C :

Alerte rouge à Aflou

le 27.12.13 | 10h00

| © photo : AFP
 

32 diabétiques se sont retrouvés  porteurs du virus de l’hépatite C au centre de dialyse d’Aflou, dans la wilaya de Laghouat. Les contaminés accusent le centre. Les responsables de l’établissement démentent et renvoient les causes de la contamination au manque de conscience des patients. La maladie se propage dans la ville. El Watan Week-end est allé à la rencontre de ces malades délaissés.

«Avant, on soignait notre diabète. Aujourd’hui, nous avons deux maladies, parfois trois à la fois. Le diabète, l’hépatite C et B !» Une femme décédée récemment. 56 patients sont sous hémodialyse au centre de dialyse d’Aflou à l’intérieur du pays, à 110 km de Laghouat. Tous ont rejoint initialement l’établissement pour des problèmes de diabète ou d’hypertension. Aujourd’hui, le centre compte 32 cas d’hépatite parmi les 55 existants. Deux cas d’hépatite B, un cas d’hépatite B et C et 29 autre autres d’hépatite C. Mais tous ont, au minimum, deux maladies à la fois, l’hépatite et le diabète. Les patients accusent le centre de dialyse d’Aflou d’être responsable de leur contamination. «Ils ne nettoient pas assez les machines d’hémodialyse. Vous pouvez trouver du sang partout sur nos lits. Il n’y a que deux femmes de ménage. Elles sont vieilles. Parfois, elles ne touchent même pas notre linge», confie Belkacem Mammeri, 38 ans et père de deux enfants. Diabétique depuis quelques années, Belkacem a peur de contracter l’hépatite C, comme c’est le cas de ses amis, que nous avons rencontré au siège de l’association El Chifa, basée à Aflou, qui fournit gratuitement des médicaments aux nécessiteux. «Cela fait neuf mois seulement que je suis sous hémodialyse et j’ai déjà l’hépatite C. Le médecin n’a pas su comment me l’annoncer. Je ne vous cache pas que suis toujours sous le choc. Depuis, je n’ai même pas osé prendre ma fille dans mes bras. J’ai peur qu’elle soit contaminée», s’emporte Tahar Mouâti, 37 ans et père, lui aussi, de deux enfants.


Contaminés


Certains dénoncent certaines pratiques qui ont mis en danger la santé de ces patients. «Les personnes atteintes d’hépatite B et C sont hémodialysées par une seule machine. C’est un grand problème ! Sachant que dans le cas de l’hépatite B, un simple contact par voie orale suffit pour transmettre la maladie», s’indigne Belkacem. Rencontrés au niveau de l’EPH d’Aflou, le docteur Nacer Mahmoudi, directeur adjoint des activités de santé au dans cet établissement, et le docteur Souidania, médecin généraliste au centre de dialyse, démentent ces accusations. «Il est vrai qu’il existe des risques de contamination au niveau du centre car l’hépatite C est une maladie transmissible par transfusion. Mais ce n’est pas le cas ici, car nous respectons tous les protocoles», déclare le docteur Mahmoudi. Les deux médecins avancent une autre hypothèse concernant les cas de contamination de leurs patients. Pour eux, ils ont pu contracter la maladie ailleurs ou alors pour cause de non-respect des consignes du staff médical. «Il est difficile de leur expliquer toute la procédure. Et puis, ils ne respectent pas toutes nos consignes. Ils se côtoient fréquemment et partagent leurs affaires personnelles. Ceci a sûrement augmenté les risques de contamination, surtout que nous avons un cas de sida dans notre établissement», ajoute Dr Mahmoudi. Pour Aïssa Daoudi, 48 ans et père de sept enfants, qui a découvert sa contamination depuis trois mois seulement, la lenteur des procédures précédant le traitement est en cause. «Nous sommes fatigués. Il faut faire le tour du monde pour obtenir nos analyses médicales. Je ne sais toujours pas où est-ce que j’ai été contaminé, mais ma vie a changé depuis. J’ai perdu espoir», regrette Aïssa, qui essaye de cacher ses émotions devant ses amis. Est-ce un problème de moyens ou de conscience ?  


Administration


Les réactions des uns et des autres étaient vives. «Nous ne pouvons reprocher quoi que ce soit à nos deux jeunes médecins. Ce sont des généralistes qui n’ont pas beaucoup d’expérience. En revanche, nous souhaitons avoir des médecins plus expérimentés», revendique pour sa part Belkacem. «Pour ne pas exclusivement responsabiliser le centre de dialyse, je pense qu’il existe, à la fois, un problème de conscientisation et de moyens. Mais seule l’administration est responsable du malheur qui nous arrive. C’est le cas de tous les problèmes que rencontrent les Algériens», ajoute Abdelmalek Ferdi, célibataire, âgé de 30 ans et diabétique depuis 20 ans. Il poursuit : «Il n’y a pas de politique de transplantation d’organes dans notre pays. Sinon, certains d’entre nous qui ont jusqu’à 5, 10 ou même 20 ans d’hémodialyse ne seraient pas restés toute cette durée. En Europe, l’hémodialyse n’est faite que pour les personnes âgées contrairement à nous qui sommes presque tous jeunes. L’administration doit augmenter le nombre des infirmiers et celui des machines d’hémodialyse. Elles tombent en panne fréquemment. L’administration doit aussi former son personnel. Rien que pour donner un exemple, il faut absolument respecter la durée de stérilisation des machines avant d’entamer l’opération.» Il est diabétique depuis 20 ans. Cela fait déjà deux années qu’il a découvert son hépatite C. «Je pense que c’est au niveau de l’ancien centre de dialyse que j’ai contracté l’hépatite C. Avant, nous n’avions pas beaucoup de matériel. J’ai sûrement été contaminé par les anciens patients venus de Laghouat», explique Abdelmalek Ferdi.


Causes


Les uns accusent les autres. Les déclarations diffèrent. La maladie se propage à Aflou à rythme sournois.  Dr Mahmoudi décrète l’alerte et insiste sur la nécessité d’intervention de la société civile ainsi que celle d’impliquer l’Etablissement public de santé de proximité (EPSP) qui a pour rôle la prévention contre ce genre de maladies contagieuses. «Nous oublions parfois que nous avons commencé à travailler depuis plus de douze ans. Le nombre de patients me semble infime par rapport à toutes ces années de service. Mais je ne vous cache pas que le nombre des contaminés non pris en charge est plus important. Ils ne se présentent pas au centre de dialyse pour qu’on puisse les prendre en charge», ajoute Dr Mahmoudi. Pour le docteur Souidania, d’autres facteurs sont à l’origine de la récente recrudescence de l’hépatite C à Aflou. «Les coiffeurs et surtout les dentistes sont aussi responsables. Nous n’avons pas de société consciente qui serait en mesure d’éluder ces maladies contagieuses. Le patient atteint d’hépatite C doit prévenir son dentiste et son coiffeur afin qu’ils prennent leurs précautions et désinfecter leurs instruments», explique Dr Souidania.


Conscience


Malgré le travail effectué par l’EPSP, les personnes que nous avons rencontrées continuent de penser que le dispositif mis en œuvre par les autorités sanitaires est insuffisant. Un constat partagé par le président de l’association El Chifa, Mohamed Sandil, qui voit en cette situation l’affaire de tous les citoyens, mais aussi celle des associations, des autorités et des établissements scolaires et sanitaires. L’hépatite C n’est pas seulement une maladie mortelle, elle devient une entrave pour les malades dans leur vie quotidienne. Omar Adjeb, 28 ans et célibataire, combat le diabète depuis son enfance et l’hépatite C depuis quelques années. Il raconte qu’il n’a jamais perdu espoir. Malgré sa double maladie, il a continué, malgré tout, ses études. Aujourd’hui, il est enseignant à Aflou et il est heureux de faire partie de l’association El Chifa. Pour autant, il ne tient pas à minimiser la complexité que sa situation lui impose. «Je suis obligé de manger des sucreries pour m’aider à lutter contre l’hépatite C mais dans le même temps, je suis aussi diabétique. Ce n’est pas facile à gérer», confie avec tristesse Omar. Parmi les autres malades, Abdelmalek Ferdi refuse de se marier de peur de ruiner la vie de sa conjointe. «Ma vie est déjà brisée. Et je ne veux pas faire de même pour celle qui acceptera de m’épouser. Je préfère souffrir tout seul. Même ma conscience sera tranquille ainsi.»

 

C’est quoi l’hépatite C et comment se transmet-elle ?

L’hépatite C est une maladie contagieuse atteignant le foie, qui résulte d’une infection virale. Elle se manifeste avec une gravité variable, qui peut aller d’une forme bénigne qui dure quelques semaines à une maladie chronique. Le virus de l’hépatite C se transmet généralement lorsque le sang d’une personne infectée pénètre dans l’organisme d’une personne sensible.


l’hépatite C Est-elle mortelle ?

L’hépatite C peut s’avérer mortelle si elle parvient à certains degrés de virulence, mais elle peut être guérie avec des antiviraux. Il y a des sortes d’hépatite C qui guérissent spontanément avec le temps. Si le patient suit convenablement le schéma de traitement, les chances de guérison sont élevées. Il n’existe actuellement aucun vaccin prévenant contre l’hépatite C. Néanmoins, la recherche à ce sujet se poursuit

 

Quelles sont les précautions à prendre pour éviter l’hépatite C ?

La transmission du virus de l’hépatite C s’effectue le plus souvent par exposition à du sang infectieux dans les situations suivantes :
réception d’une transfusion sanguine, de produits sanguins ou d’un greffon contaminés ;
injections réalisées avec des seringues contaminées ou blessures par piqûre d’aiguille en milieu de soins ;
utilisation de drogues injectables ;
Naissance chez une mère infectée par l’hépatite C.

 

Meziane Abane
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27/12/2013
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