VIOLENCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
VIOLENCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
Il y a péril en la demeure
REPÈRE PAR NORA CHERGUI
ENSEIGNANTE AGRESSÉE À TIZI OUZOU
Le directeur de l’éducation rassure
ASSOCIATIONS DE PARENTS D’ÉLÈVES,
SYNDICATS ET PSYCHOLOGUES SONT UNANIMES
«Un fléau à prendre au sérieux»
ANNABA
Nécessaire redynamisation du contrôle de la sécurité en milieu scolaire
VIOLENCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
Il y a péril en la demeure
Après les stades, la violence s’en prend de nouveau à l’institution pédagogique la plus importante de la société. Il s’agit, bien entendu, de l’école qui enregistre, ces temps-ci, de nombreuses agressions, à l’intérieur même des établissements scolaires.
Les journaux ne cessent de rapporter, en effet, des situations conflictuelles, de malaises sociaux et un mal-être de la famille éducative dans son ensemble, des élèves et des enseignants essentiellement. Aucune raison ne peut justifier dans le principe l’administration d’une violence qui est la négation de l’être humain. Mais elle pourrait s’expliquer dans certains cas de légitime défense. Mais, malheureusement, ce n’est pas souvent le cas des actes de violence rapportés par la presse nationale.
Les auteurs, des enfants qui sont pénalement responsables de leurs actes répréhensibles, s’en prennent à leurs enseignants et vice-versa, souvent, à cause d’une futilité. Les parents qui sont par contre civilement responsables des faits commis par leurs enfants, s’en mêlent à leur tour pour agresser un enseignant, à l’intérieur même de l’enceinte de l’école. Inadmissible et pourtant vrai.
Ce qui ne va pas dans le sens de l’apaisement de cette situation de crise sociale qui implique la mobilisation de toute la société pour y mettre fin.
Il y a, en outre, cette autre situation inextricable où un élève a giflé, récemment, un enseignant, une image brisée de père ou de mère. Qu’en est-il des enfants qui s’en prennent à l’emblème national et à leurs enseignants ? C’est inouï ! C’est le moins que l’on puisse dire lorsque l’on connaît les valeurs sacrées de ce symbole de la nation et les sacrifices consentis pour qu’il flotte dans une Algérie libre et indépendante. L’histoire est pourtant enseignée, dans ce sens, dans ses moindres détails aux générations post-indépendantes.
L’école a surtout pour mission d’instruire et d’éduquer les enfants sur la base des valeurs de clémence, de fraternité et de pardon entre les gens aussi différents soient-ils. Mais cet objectif ne peut être atteint si les familles sont démissionnaires en la matière, selon des sociologues qui incriminent le manque de cohésion sociale. Ils pointent du doigt aussi «l’importation de la violence» par le biais des médias, de l’Internet et des jeux électroniques qui font fureur chez les ados et les enfants.
Les écrans de TV et les sites d’Internet dans des cybercafés véhiculent des images de violence à profusion. Il y a vraiment un problème de crise de société qui sévit, à petit feu, dans l’ensemble des pays de la planète.
La globalisation a contribué à la propagation de ce virus dans le monde, y compris dans les sociétés qui étaient immunisées, jusque-là , par la préservation de leurs cultures et traditions.
La violence s’est «globalisée» finalement. C’est pourquoi les spécialistes parlent de prévention, de retour aux sources et de lutte contre la cybercriminalité.
La société doit se réapproprier toutes les valeurs authentiques et universelles pour extirper ce mal du siècle à la racine. Question de vie commune, de concorde civile et d’existence pacifique.
Meziane Atmani.
L’école au …. piquet
C’est universel. La première mission de l’école est de donner aux élèves les clés pour comprendre le monde. Mais qu’en est-il pour l’école algérienne ? Est- elle en mesure d’accomplir cette mission ? C’est loin d’être le cas. Il n’y a qu’à voir ce qui s’y passe pour en être convaincu. Avec le temps, la fonction du temple du savoir est devenue similaire à celle d’une garderie. Des enfants fréquentent l’école six jours sur sept, sans comprendre la finalité. Pis encore, pour certains, c’est une corvée que d’aller à l’école. Pourquoi un tel désintérêt pour les études et le savoir ? Les enseignants sont plus préoccupés par les revendications salariales. Les grèves cycliques qui ressemblent plus à l’école buissonnière ont gravement porté atteinte à cette prestigieuse institution synonyme «d’ascenseur social». A cela s’ajoutent les scandales qui se suivent et qui ne se ressemblent pas. Des faits graves ont lieu au sein de l’école. Une élève meurt devant ses camarades, après que la «prof» l’eut sévèrement punie. Certes, la justice a disculpé l’enseignante, mais l’incident remet sur le tapis la question du châtiment corporel infligé aux élèves. Et l’on a fini par admettre que ce sadisme presque ordinaire fait partie des mœurs des établissements scolaires. Et au nom de la discipline, la société ferme les yeux sur cette violence qui, à son tour, a engendré une autre violence. Et si certains professeurs sont des disciples de l’éducation par le bâton, ils ont réussi à la transmettre aux élèves. Et c’est avec consternation que nous découvrons que la violence a changé de camp. Et quand ce ne sont pas les élèves qui se permettent de gifler le prof en plein cours, ce sont les parents qui agressent les enseignants, et de surcroît dans la salle de cours. Comme cela s’est passé à Tizi Ouzou pas plus tard qu’avant-hier. Ceci ne relève plus du fait divers, mais suscite des interrogations. Car il y a violation de la «franchise scolaire». Et c’est la limite du tolérable. En revanche ce qui intolérable, c’est de découvrir qu’un enseignant pervers, à qui on a confié des enfants, les 8 ans à peine entamés, se permet d’abuser sexuellement des chérubins sans défense. La presse a fait écho de cette tragédie qui a eu lieu à Bouira. D’aucuns diront que ce sont des cas isolés, et qu’il est interdit de mettre tout le corps enseignant dans la même enseigne. On n’en disconvient pas. Mais il n’en demeure pas moins que ces cas ternissent l’image de l’école censée éduquer et former des générations. Et justement revenons à la mission de l’enseignant en particulier et à celle de l’école en général. Le professeur est avant tout un éducateur. Et c’est à lui de donner l’exemple. Certains se plaignent, car leur autorité est contestée. Mais quel image donnent-ils à leur élèves lorsque l’on sait que certains n’hésitent pas à user d’un langage vulgaire pour se faire respecter ? La pédagogie, c’est tout un art, et communiquer avec un jeune public n’est pas à la portée de tous. L’affaire des cinq lycéens (des terminales) qui ont porté atteinte à l’emblème national, sans mesurer la gravité, et qui sont aujourd’hui sur le banc des accusés rappelle à tous que le plus grand coupable reste l’école. Car elle n’a pas su inculquer à ces enfants les vraies valeurs. Et c’est là tout le drame.
N. C.
ENSEIGNANTE AGRESSÉE À TIZI OUZOU
Le directeur de l’éducation rassure
L’affaire de l’enseignante agressée dans un collège de la ville de Tizi Ouzou a vite fait réagir la direction de l’éducation. En effet, le premier responsable M. Nordine Khaldi s’est déplacé hier matin au collège en question pour s’enquérir de la situation qu’il a tenu à déplorer vivement.
Après avoir rencontre le chef d’établissement qui lui avait fait un état des lieux et les problèmes rencontrés en matière de sécurité du fait que l’établissement est ouvert à tous les vents, l’enseignante victime et les représentants syndicaux UGTA, le directeur de l’éducation a tenu à rassurer tout le monde quant à la prise en charge effective des préoccupations des enseignants et de la direction de cet établissement.
Des assurances qui ont fait que les syndicalistes ont décidé de surseoir au sit-in prévu dimanche prochain au siège de la direction de l’éducation. Aussi cette affaire pose la problèmatique de la sécurité dans les établissements scolaires. En effet, ces établissements en manque d’effectifs en raison de l’équation et ratio (élèves-personnel) édictés par la fonction publique sont confrontés à des difficultés de gestion de la sécurité.
D’autant que certains de ces collèges et autres écoles situés dans des zones populeuses ne sont guère sécurisés de par leur configuration à l’image des CEM Ameyoud-Smaïl et Lotfi du chef-lieu de wilaya. S’agissant du premier nommé, la clôture et les murs d’enceinte de par leur hauteur sont facilement accessibles aux personnes étrangères. Mieux ce collège attend toujours la réfection d’un mur d’enceinte longeant une importante route qui a été démoli depuis plus de deux mois mais attend toujours sa nouvelle érection. Ceci pour dire que les chefs d’établissement et les personnels sont en continuel danger devant des jeunes désœuvrés qui tentent de faire valoir leurs muscles sous les effets des psychotropes et autres drogues pour épater les jeunes filles, quitte à massacrer un enseignant.
Le plus grave en est que les parents se sont mis de la partie pour malmener ces personnels au lieu de prendre en charge leurs enfants en difficultés scolaires, voire psychologiques. D’où la nécessité de voir les associations des parents d’élèves plus actives et plus présentes sur le terrain en organisant des réunions périodiques avec les représentants des enseignants et autres adjoints d’éducation qui sont les plus proches des élèves
Rachid Hammoutène.
ASSOCIATIONS DE PARENTS D’ÉLÈVES, SYNDICATS
ET PSYCHOLOGUES SONT UNANIMES
«Un fléau à prendre au sérieux»
La violence dans les établissements scolaires qui a tendance à prendre de l’ampleur ces dernières années est du point de vue des spécialistes liée étroitement aux développements de la société et, à un degré moindre, à l’éducation familiale.
Des intervenants dans le secteur de l’Education s’accordent à dire que le phénomène devient de plus en plus préoccupant et nécessite une prise en charge immédiate. M. Dif Allah, psychologue expérimenté exerçant dans un hôpital à Alger, indique que la violence à l’école reflète d’une manière générale ce qui se déroule dans la rue. Soulignant une étude évaluative en cours relative au phénomène, ce psychologue note qu’«à l’instar de ce qui se passe dans la société algérienne, la majorité des cas de violence signalés dans des établissements scolaires ont des liens avec la décennie de violence qu’a connue le pays». M. Dif Allah relève deux principaux cas de violence. Il s’agit des cas de psycho-traumatisme et de la violence institutionnelle.
Pour ce qui est du premier cas, il dira que l’élève ayant assisté à des scènes de violence cultive «automatiquement» le sentiment de la violence : «C’est la majorité des cas examinés jusqu’ici», a-t-il commenté. S’agissant de la violence institutionnelle, il note que celle-ci est le produit de quelques responsables des établissements scolaires qui recourent souvent à des comportements violents, physiques ou verbaux, à l’égard des écoliers.
«Ces cas sont enregistrés beaucoup plus dans les paliers primaire et collège. Les élèves sont parfois victimes de la brutalité de leurs enseignants, surveillants ou autres administrateurs», constate-t-il se référant à la même étude que ses services sont en train d’élaborer. En parfaite connaissance du dossier, le psychologue Dif Allah a évoqué aussi la part des médias, l’Internet et des jeux vidéo dans l’ampleur qu’a pris le phénomène dans nos écoles. Le fléau constitue également la préoccupation des organisations syndicales relevant du secteur de l’Education nationale. M. Boukrouh, de l’organisation du Conseil national autonome des enseignants secondaires et technique (Cnapest) affirme que la sécurité dans les milieux scolaire figure parmi les revendications du syndicat.
«L’enseignant se trouve parfois confronté à des cas de violence provenant et des élèves et des parents. Il y a des centaines de cas de ce genre qu’on signale presque quotidiennement.
Il y a même des enseignants qui se font tabasser devant leurs élèves par des individus venus d’ailleurs». Et à ce syndicaliste d’ajouter en toute objectivité que « je ne dirai pas que tous les enseignants sont justes, il y en a ceux qui commettent des erreurs impardonnables dont les élèves sont victimes. Je ne parle pas ici uniquement des agressions physiques ou verbales mais aussi de l’autre visage de violence qui se manifeste dans la notification des élèves ou autre chantages. Tout ça doit être pris au sérieux par les parties concernées pour que le milieu scolaire accomplisse la mission qu’il lui est dévolue».
Du côté des parents d’élèves, l’association de la wilaya d’Alger, représentée par l’un des ses membre, Khaled Youcef, suppose que «seules des actions de sensibilisation sur le sujet pourraient réduire un tant soit peu la montée exponentielle du phénomène».
M. Kechad.
Nécessaire redynamisation du contrôle
de la sécurité en milieu scolaire
Une unanimité s’est dégagée à Annaba tant parmi les responsables du secteur de l’éducation qu’au niveau des associations de parents d’élèves autour de la «nécessaire redynamisation des mécanismes de contrôle de la sécurité en milieu scolaire».
Des parties étroitement liées à ce volet, comme la protection civile, les responsables du secteur et les parents d’écoliers, ont réaffirmé avec force cette nécessité.
Aïcha B., une parente d’élève, a estimé que l’école, «centre de rayonnement et d’épanouissement», dès lors qu’elle «dispose de tout un arsenal juridique et d’une large panoplie de mécanismes liés à la préservation de l’intégrité physique des élèves et à leur santé», se doit de «traduire dans les faits les textes réglementaires relatifs à la sécurité des écoliers».
Cet avis est partagé par les responsables de la protection civile dont un représentant a déploré le fait que l’exécution sur le terrain des dispositions réglementaires liées à la sécurité des élèves n’est pas toujours de mise comme en attestent, a-t-il précisé, les observations signifiées par les éléments de ce corps aux responsables concernés au cours de «visites de contrôle effectuées au niveau de 78 établissements scolaires de Annaba». Des visites qui ont permis, a ajouté le même responsable, de «relever, juste pour l’exemple, que les extincteurs en place dans les écoles ne sont conformes aux normes que dans un cas sur cinq».
Le même représentant de la protection civile a relevé «l’absence d’issues de secours dans les établissements scolaires, notamment ceux réalisés au cours de ces dernières années, ainsi que des défauts dans les raccordements électriques et de gaz». Une situation qui a conduit la protection civile, a-t-il encore indiqué, à adresser des rapports aux parties concernées, en l’occurrence la direction de l’éducation et les communes lorsqu’il s’agit d’écoles primaires. ,Interrogé sur les dispositions prises en matière de renforcement du suivi sanitaire et sécuritaire au sein des établissements éducatifs, le directeur de l’éducation de la wilaya de Annaba, Salim Benadher devait indiquer, de son côté, qu’une campagne de contrôle des conditions liées à la santé et la sécurité en milieu scolaire a été menée en coordination avec les équipes de la Sonelgaz.
Ces visites de contrôle, qui ont ciblé les établissements scolaires de la daïra de Annaba, ont permis de relever, a cependant reconnu le directeur de l’éducation, «des lacunes et des défaillances» liées à la non-conformité de certaines installations d’alimentation en gaz et électricité ainsi que l’absence de chauffage dans certains établissements d’enseignement secondaire de la ville de Annaba, tels les lycées Pierre et Marie Curie, Amar Laskri et Larbi Ben M’hidi. Assurant que ce problème sera «pris en charge dans les plus brefs délais possibles», le directeur de l’éducation a affirmé que des visites similaires sont prévues à travers le reste des établissements éducatifs de la wilaya qui compte, a-t-il précisé, 219 écoles primaires, 71 CEM et 33 lycées, accueillant un total de plus de 122.000 élèves. Parallèlement à ce programme spécial visant la réhabilitation des conditions de scolarité et de sécurité des élèves, M. Benadher a indiqué qu’en plus des efforts tendant à améliorer la qualité des repas servis par les cantines scolaires, un programme est actuellement mené dans le cadre de l’entretien des écoles.
Toutefois, sur le plan de la couverture sanitaire, une série de lacunes, liées essentiellement à «la faiblesse de la prise en charge médicale des malades chroniques et au manque de médecins spécialistes et de psychologues», a été évoquée par les services de la médecine scolaire de Annaba qui dispose de 21 UDS (unités de dépistage et de suivi).
Plus de 100.000 consultations et/ou prises en charge médicales ont été effectuées, durant l’année scolaire actuelle, a indiqué le responsable du service de médecine scolaire, Redouane Mohamed, précisant que la couverture médicale est estimée à plus de 86% tandis que les prises en charge spécialisées ne dépassent guère les 65%, même si, a-t-il encore affirmé, «ces consultations médicales ont permis de dépister plus de 300 cas de cardiopathie».
L’accent a été mis, dans ce contexte, sur la nécessité de «dynamiser le rôle des comités chargés de la santé devant être créés incessamment», en vue d’un «meilleur suivi, d’une sensibilisation permanente et d’une coordination sans faille entre les dispositifs de santé, les établissements éducatifs et les associations de parents d’élèves».